De Chavignol à la Nouvelle-Zélande

Le village a beau être petit, ses fromages l’ont rendu extrêmement célèbre. Niché au fond d’une vallée surplombée par la Côte des Monts Damnés, à la lisière de la Loire et à la croisée de deux AOC (chavignol et sancerre), le village berrichon de Chavignol est le berceau de la famille Bourgeois, qui y possède des terres depuis des générations. Longtemps occupés par différentes cultures, la vigne seule ne suffisait pas à nourrir une famille, les Bourgeois se mettent sérieusement au vin le jour où Henri, le grand-père de la génération actuelle, décide d’abandonner chevaux, vaches, chèvres et champs de céréales pour se concentrer sur les quelques hectares qu’il possède sur les coteaux de Chavignol, en particulier ses vignes des Monts-Damnés. Un choix courageux pour l’époque dicté par une passion pour l’élevage du vin. A la génération suivante, les deux fils d’Henri se sont attachés à développer le domaine qu’il avait créé en y adjoignant une mosaïque de parcelles situées dans les meilleurs villages des appellations sancerre et pouilly-fumé. Ils ont fait connaître les vins de la Maison Henri Bourgeois dans les restaurants parisiens, puis dans ceux de la côte Normande jusqu’en Belgique. Au milieu des années 80, la famille a construit un chai gravitaire pour lequel il a fallu creuser la colline. Des travaux considérés alors comme pharaoniques.

ChavignolHenriBourgeois
Aujourd’hui, la famille Bourgeois (Arnaud est le directeur général, Lionel est le responsable du vignoble et Jean-Christophe, celui de la cave) cultive 120 parcelles sur 75 hectares. Les ventes de vin se répartissent par tiers entre la France (environ 2 500 restaurants et plus de 500 cavistes, mais pas de grande distribution), l’Europe et le grand export, vers 80 pays. Enracinée le long de la seule et unique rue de Chavignol, qui monte à pic vers les coteaux jusqu’au belvédère du Graveron, point de vue incontournable du Berry, la famille ne s’occupe pas que de pinot noir et de sauvignon, cépages emblématiques du terroir pour lesquels elle ne cesse d’améliorer sa connaissance des sols. Elle propose également un accueil très complet aux amateurs venus jusque-là en visite. Bien entendu, on peut visiter le chai (tous les jours, de 9 h 30 à 18 h) et se faire expliquer la sélection massale, l’enherbement et le scrupuleux suivi des parcelles. Mais l’on peut aussi découvrir la cuisine de Jean-Marie Bourgeois, un chef qui a travaillé sous les ordres de Claude Deligne, à l’époque où Taillevent acquiert ses 3 étoiles Michelin, avant de décider de reprendre le petit restaurant de son village natal. Depuis, le pas vers l’œnotourisme a été franchi. Très confortable et conçu dans un souci d’écologie, l’hôtel qui a ouvert à Chavignol, en 2008 est doté de deux restaurants qui conjuguent de façon différentes (bistro et gastronomique) le patrimoine culinaire et viticole de la région. Leur carte des vins ne présente pas moins de 140 références de vins de l’appellation.


Dans le même temps, l’aventure viticole de la famille Bourgeois s’est étendue jusqu’en Nouvelle-Zélande. Avec le projet de se remettre en question sur des terroirs radicalement différents et d’enrichir l’expertise acquise sur le sauvignon et le pinot noir à la faveur de deux vendanges et deux vinifications par an, l’une à Chavignol et l’autre aux antipodes, la famille a longtemps exploré les lieux avant de découvrir une colline vierge et verdoyante sur le versant Nord de la Wairau Valley, au nord de l’île du Sud, dans la région de Marlborough. Le Clos Henri Vineyard, en hommage à ce grand-père à l’âme vigneronne, est un vignoble de 42 hectares d’un seul tenant qui se situe sur une faille sismique séparant deux terroirs, une terre argileuse adaptée aux pinots noirs et une terre de galets, dans un ancien lit de rivière, où s’épanouissent les sauvignons. La famille a doté cette propriété accrochée à la montagne, qui regarde la célèbre Cloudy Bay de son propre outil de production. Ce terroir d’exception, où le mildiou est inexistant, est un formidable terrain d’expérience pour la biodynamie qui y est pratiquée depuis deux ans. Parallèllement, Clos Henri Vineyard a obtenu la certification de son vignoble en culture biologique pour le millésime 2013.

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