Vins d’Autriche, chapitre 2 : Heinrich Hartl, hier et aujourd'hui

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En chiffres

2 196 hectares
900 producteurs
25 % à l’export

Le jeune homme se glisse derrière le comptoir et me montre un faire-part accroché sur l’étagère derrière lui. Il s’agit d’un décès. Il ouvre un tiroir et me sort un paquet de ces avis barrés d’une croix. Tous ces gens étaient de bons clients. Sous l’ère industrielle, ils passaient à la Heuriger avant d’aller à l’usine, carburaient à cinq heures du matin et repassaient après leurs heures, pour décompresser, poussant souvent jusqu’à minuit. Ils embarquaient à la maison un litron supplémentaire, en cas de soif avant le coucher. Chez les Hartl, le grand-père cultivait, comme tous les paysans, du maïs, élevait des porcs et des vaches et faisait pisser la vigne pour écouler 60 000 litres de jaja à l’équivalent de 2,20 euros le litre.

Au cours du XXe siècle, la consommation a changé et les clients réguliers s’éteignent comme des bougies. Les quelques survivants s’accrochent au bon vieux temps et apprennent la mort des potes ou des anciens collègues en sirotant un Spritze (vin coupé d’eau gazeuse), le regard dans le vague. Les usines ont fermé, le nombre de Heuriger et de caves a fondu, les rendements dans la vigne aussi. Le fils Hartl a dû revoir la donne. Le scandale de l’antigel, en 1985, a précipité le mouvement, forçant le producteur, comme tous les vignerons autrichiens, à réduire le volume, privilégier la qualité, embaucher du personnel qualifié. Le suivant, Hartl III et 7e génération à Oberwaltersdorf, s’est attaqué au marché mondial avec confiance, travail et modernisme.

En 2001, ses études bouclées à l’Institut viticole de Klosterneuburg – fondée en 1860, c’est l’une des plus anciennes écoles d’agronomie au monde, Heinrich a puisé quelques savoirs en Nouvelle-Zélande, en Bourgogne, en Allemagne et au Portugal et a revisité le chai du sol au plafond (nouvelles cuves, fûts neufs). Le profil maison a radicalement changé : il propose désormais de belles cuvées puissantes et harmonieuses. Mais il avoue « faire le même chiffre d’affaires que son père avec beaucoup plus d’efforts, de paperasserie et de temps. Taxes et charges alourdissent les coûts de production. Le bénéfice est réduit à peau de chagrin ! » Le consommateur, qui trouve ses vins aux Etats-Unis, en Angleterre ou ailleurs, a tout à y gagner : son zweigelt est un vin sympa pour le barbecue du week-end et ses pinots noirs sont parmi les meilleurs du pays

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