Left Bank Bordeaux Cup à Lafite Rothschild, ou comment soigner ses futurs ambassadeurs

Six mois de compétition, des tests de connaissances et des tastings à l’aveugle, mais aussi un wine tour et des dîners joyeux et prestigieux, les champions des clubs œnologiques des grandes écoles ont bien dégusté.

Le rapport entre Nini Peau’d’Chien, celle qu’on aime bien à la Bastille, le Sapeur Camember et la Commanderie du Bontemps ? Dans l’ordre, Charles Chevallier, Eric de Rothschild et la Left Bank Bordeaux Cup. Cette compétition qui voit s’affronter chaque année en finale huit grandes écoles et universités internationales à Lafite-Rothschild sous l’égide de la Commanderie du Bontemps, Médoc et Graves, Sauternes et Barsac se termine traditionnellement par un très joyeux dîner de clôture.

Le 25 juin dernier, les commandeurs en cape et chapeau y ont donc chanté un hommage à leur organisation sur l’air de Nini Peau’d’chien, pastiche signé Charles Chevallier (directeur technique de Lafite Rothschild) tandis qu’Eric de Rothschild, propriétaire de Lafite et président du concours, entonnait un couplet du Sapeur Camember. Histoire de bien faire comprendre que Bordeaux « is also about fun and pleasure », bref, qu’à Bordeaux, on sait s’amuser et jouir de la vie (on chantera aussi gaillardement « Le 31 du mois d’août »). Le business n’est donc pas tout. Enfin si quand même, c’est d’ailleurs dans ce but que ce challenge est organisé : instiller la connaissance et l’amour des grands crus de Bordeaux chez la future élite… future ambassadrice de ces superbes vins. L’équipe de New York Stern University a eu beau s’égosiller sur « New York New York » de Liza Minelli… “if I can make it there (à Lafite, of course), I’ll make it anywhere” – (« si je réussis ici, je réussirai partout »), les vainqueurs, ce n’était pas eux mais l’équipe de l’EDHEC Lille, foutus frenchies déjà lauréats en 2012. Qui en ont profité pour chanter La Marseillaise – soir de match oblige, ici et au Brésil pour une autre Coupe. D’accord mais dans « business » il y a aussi « show » et là, les Américains et les Anglais sont imbattables. Mention spéciale à l’équipe d’Oxford emmenée par un véritable showman qui s’est imposé par sa critique assertive des vins du dîner et s’est payé le culot de rappeler, en préambule puis en chanson, « qu’il n’y a pas si longtemps, Bordeaux appartenait à l’Angleterre ».

Du fond et du panache qui valent à Oxford, par ailleurs 2e du concours, le prix de la presse. Chaque équipe avait été priée de s’exprimer doctement sur les vins qui accompagnaient le dîner parmi lesquels un admirable Duhart-Milon 2003 servi en magnum. On retiendra le commentaire toujours souriant mais… d’Eric de Rothschild : « You missed the whole point of this wine . It is incredibly long and you arrive to an oasis at the end of it » – « Désolé, vous avez oublié de dire l’essentiel, la longueur incroyable de ce vin, c’est une oasis qui vous attend à la fin »”. Enjoy .

Mais revenons à la finale de cette 13e édition du premier concours international des clubs œnologiques des universités et grandes écoles. Huit équipes de trois concurrents chacune (Chinese University de Hong Kong, Copenhague Business shool, Edhec Lille, NYU Stern, Oxford, Nanyang University de Singapour, Skema Lille et Yale Law School) se sont affrontées dans l’imposant chai circulaire de Lafite, après avoir éliminé au cours des 6 mois précédents une quarantaine de clubs du monde entier. « C’est la première fois que nous avons autant de nationalités », souligne Emmanuel Cruse, grand maître de la commanderie du Bontemps et président du jury qui rassemble propriétaires, négociants, membres, journalistes. Concentrés mais pas stressés, les étudiants répondent à une QCM relativement aisé (Combien y a t- il de troisièmes crus classés dans l’appellation Pauillac ? Quel architecte a signé les nouveaux chaix de château Margaux ?…). Ca se complique à l’épreuve de dégustation à l’aveugle (vins proposés, La Tour Carnet (2009), Grand-Puy Ducasse, d’Armailhac et Phélan Ségur (2004), Branaire Ducru (2007), Lagrange, Guiraud et Coutet (2006), Nairac (2005), il s’agit de trouver le millésime ou l’appellation, de distinguer parmi trois vins les sauternes des barsac, etc. L’EDHEC a fait un sans faute sur le questionnaire et une seule sur le tasting. Baptiste Bonhomme, Alexandre Lambert et Octave Letellier et leur coach Lorenzo Fontana Giusti ont remporté un double magnum de Lafite et des billets Air France pour venir étancher leur soif de savoir plus souvent à Bordeaux, des rencontres et des frissons. Deux jours après, ils étaient intronisés dans la Commanderie du Bontemps lors de la prestigieuse Fête de la fleur. La cerise sur la Cup.

Béatrice Brasseur
Crédit photo : DR, Left Bank Bordeaux Cup

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