L’énigme des blancs 1996 de Bourgogne (et d’ailleurs)

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Tout critique commet des erreurs de jugement, le moins souvent possible naturellement. Le public peut à juste titre les lui reprocher quand il a l’habitude de lui faire confiance, mais parfois ces reproches n’ont pas d’autres fondements qu’une connaissance très partielle de la matière de ces reproches et des généralisations abusives à partir d’exemples limités. Parmi les reproches qui m’ont été le plus souvent justement faits j’accepte parfaitement celui de mon trop rapide encensement du millésime 1975 à Bordeaux. Je reviendrai une prochaine fois sur le sujet. Les plus injustes et énervants (surtout lorsqu’ils proviennent de gens du métier) concernent les blancs 1996 en Bourgogne et mon affection pour les rouges de quelques producteurs bourguignons, en particulier l’ancien domaine Pernin-Rossin. Je n’ai jamais voulu y répondre, comme ils reviennent régulièrement sur le tapis de la « toile », et que le vieillissement suffisant des bouteilles fait office de juge de paix, je le fais maintenant.

 


Le cycle végétatif du millésime 1996 fut unanimement considéré à sa naissance comme favorable à une qualité optimale des vins blancs dans tout le nord de la France. Un état sanitaire parfait des raisins (aucun départ de botrytis, aucune maladie), entretenu par un vent du nord froid et protecteur, une production d’arômes complexes dans les baies du raisin liée aux nuits froides et au soleil clair de toute la fin de la maturation, un aspect visuel du raisin exemplaire et en plus une jolie récolte. Comme je le fais toujours j’ai mangé les raisins à la veille des vendanges et leur saveur pure et nette restera à jamais marquée dans ma mémoire. Les acidités demeurant fort élevées, gage d’un grand potentiel de vieillissement, on avait tout à gagner à attendre le plus possible avant de vendanger, d’autant qu’il n’y avait aucun danger de changement de temps. Il est sûr qu’on a vendangé trop tôt en champagne et que cette erreur, après les quelques années nécessaires pour la comprendre et la digérer a complètement changé les mentalités des meilleurs viticulteurs, surtout pour les chardonnays. En côte d’or, où les maturités étaient plus précoces et plus élevées, la tentation était grande de vendanger assez vite, mais un bon tiers des vignerons ont été sages et ont rentré un raisin de haut potentiel mais d’un équilibre original avec 12°,5/13° de richesse en sucre, des acidités fort élevées (6 à 7 grammes), et une bonne proportion d’acide malique. C’est là que les ennuis pour beaucoup ont commencé. Les fermentations malo-lactiques furent très longues et bien souvent même pas commencées à la fin du printemps ! A la veille du millésime suivant les vignerons n’ayant pas assez de place en cave ont bien été obligés de mettre en bouteille des vins non finis et ont donc demandé à leurs œnologues comment s’assurer que les vins ne refermenteraient pas en bouteilles ! Je vous laisse deviner toutes les manipulations de désacidification et de stabilisation qui ont hélas fragilisés un volume non négligeable de la récolte. Au moment de rendre compte du millésime mon erreur, si s’en est une, fut de fonder mon jugement sur ce que je goûtais chez les meilleurs vinificateurs, ceux qui me servent de référence parce que j’ai toujours considéré que le vrai potentiel d’un millésime se juge quand même chez ceux qui travaillent le mieux. Naturellement leur vin restait en fût (il fut mis en bouteille entre mars et juillet 1998, parfois même début septembre),et ce que je goûtais était miraculeux, à la fois frais, complexe, fluide, (la bonne fluidité, celle qui rappelle l’eau de roche), mais riche en extrait sec et parfaitement typé des terroirs.

J’ai beaucoup acheté de vins pour moi-même et il m’en reste assez pour raconter l’histoire compliquée de leur vieillissement et le bonheur de savoir que les meilleurs ont encore un superbe avenir et répondent parfaitement aux promesses de leur naissance. Leur vieillissement fut donc compliqué, du moins pour ceux qui boivent leurs vins assez vite dans un monde où plus personne n’attend les 12 à 20 ans nécessaires pour que les grands terroirs délivrent toute leur race. Entre 2001 et 2006 beaucoup de vins, même chez les bons producteurs, se sont mis à jaunir et à prendre des goûts incompréhensibles et jurassiens de noix, de froment fort, voire de pomme blette, donnant le sentiment d’un vieillissement trop précoce. Mais ce qui était énervant était la variabilité de ces bouteilles car certaines des mêmes lots étaient parfaites ! C’est à ce moment que j’ai interrogé mes amis œnologues et que toute la filière a commencé à réfléchir à la cause de cette variabilité. Les bons vignerons, ceux qui ont vendangé mûr, cultivé correctement leurs vignes et attendu avant de mettre en bouteille ont bien sûr commencé à tout mettre sur le compte du bouchon, et non sans raison pour ceux qui avaient été traités au péroxyde, à la demande d’ailleurs des vignerons eux-mêmes, mal informés par leurs techniciens et qui stupidement préféraient pour des vins blancs des bouchons « blanchis » ! Mais cela n’expliquait pas tout, et surtout pas le fait que 24 heures ou plus après l’ouverture de la bouteille le vin redevenait plus clair et moins évolué ! Le même phénomène a été constaté pour Chablis, pour les champagnes et pour les vins de Marsanne de l’Hermitage. Il semble donc que le vin ait en bouteille vécu ce qu’en principe il doit vivre en période d’élevage en fût ou en cuve, une succession de passages oxydatifs puis réductifs, liée à l’activité autolytique du ferment. Aujourd’hui les grands terroirs donnent des vins exceptionnels, avec un arôme parfois sublime de truffe blanche né de l’acidité élevée, une vivacité et une intensité qui comme en Champagne n’ont pas été égalées depuis. On peut toujours imaginer ce que les vins auraient donné avec une maturité encore plus poussée, mais il vaut mieux ne pas mettre en concurrence avec un 1996 réussi un 1989 ou un 1999, malgré leurs grandes qualités et leur forte maturité, car ils apparaissent alors bien lourdauds. Voici quelques unes de mes références : … suivre

crédits photo d’ouverture : https://sensdeladigression.wordpress.com/2013/05/04/4-mai-1891-la-premiere-mort-de-sherlock-holmes/

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22 Commentaires

  1. Les professeurs sont ainsi faits qu’évoquer une possible remise en cause de leur jugement leur paraît nécessaire mais qu’au final leurs convictions profondes finissent toujours par être réaffirmées avec forces arguments! En ayant formé pendant plus de 20 ans, j’ai une certaine expérience de ces stratégies comportementales!

    Hors instruire un raisonnement à charge permet évidemment de justifier aisément son propos. Une funeste erreur ici.

    Les éléments avérés de ce millésime montrent que cette année de maturité froide a généré des degrés par dessiccation des baies sous l’influence des vents du Nord dans un contexte nébuleux excluant pluies et soleil. Les fruits étaient donc très sains, construits sur des degrés assez élevés et équilibrés par des acidités totales hautes. En moyenne sur des taux proches de 6,5. Mais l’acidité n’a jamais permis de mieux préserver les vins du vieillissement – une telle contre-vérité écrite par Michel Bettane qui révère les grands Ermitage blancs, je ne peux le croire! – et surtout il est essentiel de comprendre que la part tartrique de cette acidité totale était très élevée et que les acidités maliques n’avaient pu être dégradées par les rayons des “soleils” de Septembre. Cette équilibre était d’une absolue banalité pour tous les vignerons ayant œuvrés dans les années 60/70 et 80.

    Comme souvent les fermentations alcooliques des moûts à forte teneur acide obtenu par dessiccation des baies ont fermenté rapidement sur le plan alcoolique et c’est cette conjugaison qui a généré ces notes peu nobles – ce sont des notes variétales – de truffe blanche, voire de pyrazine. Signifier qu’elles complexifient les vins est aussi pertinent que de relever les notes miellées sur les raisins de 2003 les moins bien nés! Ce qui est une suzlité à Jurançon dans les liquoreux de passerillage, est une faute lourde en nos contrées.
    Croquer les raisins en 1996 permettait de constater des raisins aux peaux durs et à la chaire ferme sur des pellicules verts fluos qui n’ont jamais doré et dont les pépins ont durant toute la campagne de vendanges – nous avons vendangé parmi les derniers! – un côté ligneux.
    Nous aimons cependant ces années fraîches en moyenne car leur énergie donne de la précision aux notes olfactives et car avec un débourbage qu’il est possible de réduire au minimum, en raison de l’absence totale de pourriture, les lies propres et abondantes autorisent une autolyse des levures lentes qui étoffe les vins et leur procure des accents tactiles “flavonoides” très souvent salvateurs sur la durée d’un élevage à deux hivers.
    Très peu de vignerons ont usé d’une desacidification au carbonate de potassium et s’ils l’ont fait – mais je n’en connais aucun en mes contrées – ils ont agit en amont avant FA car après FA ce geste brutalise tellement les vins que leur déséquilibre en devient évident et qu’ils sont irrémédiablement dépouillés.
    Les vins mis en bouteille avant vendanges sans contrôle des FML ne sont pas légion non plus car lorsqu’une FML traine à démarrer le vigneron sait ensemencer ces vins avec des bactéries lactiques depuis de très nombreuses années et s’il ne le fait pas il use d’autres artifices comme prélever une part de vins en fermentation dans un autre fut et l’ensemencer de manière indirecte. Je passe sur les petites astuces de cuverie dont nous disposons par ailleurs et j’affirme que signifier que les vignerons ont embouteillé des vins qui ont subi par la suite une autolyse des levures en bouteille selon un processus oxydo-réducteur n’a pas de sens. Je renvoie le lecteur à mes textes sur ces sujets s’ils en ont envie.
    En cas de FML partielle – et je rappelle que par ex Jacques Lardieres chez Jadot usait souvent de ce process – le vigneron “pris” par ces locaux exigus et le temps opère un sulfitage plus élevé et/ou filtre sur des plaques stériles qui tuent toutes vies levureennes dans les vins. À t’on jamais vu des Vouvray ou des Alsace repartir régulièrement en FML dans les flacons? Ils ne les réalisent pourtant pas!
    La polarité Redox de ces vins – rien à voir avec des FML partielles – est probablement à l’origine des évolutions parfois constatées et leur salinité intense reste d’ailleurs fixe lorsqu’ils s’effondrent. Cela provient uniquement de l’équilibre initial de fruits phénoliquement inaboutis et d’une maturité moléculaire les empêchant de développer des notes “climatiques” tout en exaltant un pôle variétal végétal. Pour avoir réalisé une VT totalement sèche fin Octobre je puis signifier que les raisins n’étaient pas plus chargés en alcool et encore plus acides sur le plan analytique. Une année où le terroir trace moins qu’à l’accoutumée .
    Leur évolution a beaucoup fait parler ” à posteriori ” à partir de 2002 si mes souvenirs sont bons, soit environ 4/5 ans après mise en bouteille et l’on a alors observé essentiellement une dégradation de l’olfaction en même temps que l’exaltation des arômes de pommes grany smith qui sont surtout le signe de lentes fermentations FML pas forcément d’une oxydation vraie. À chaque fois que cela se produit – voir 2008 – les vins passent par une étape ingrate où ils paraissent plus morts que vifs et finissent par passer ce cap mais hélas s’ils peuvent finir par faire d’honnêtes quilles, leur niveau n’est pas celui des grands. Irrémédiablement.

    Pierre Morey et François Jobard ont toujours défendu ces vins sans pourtant les considérer je crois comme “grands” mais il est clair qu’en moyenne les producteurs ne le révèrent guère et imaginer qu’ils puissent surpasser 89 et 99 est simplement hors de propos. Et bien entendu je parle des meilleurs vins des trois millésimes respectifs pour respecter votre postulat qui est d’évaluer la qualité d’une année selon les meilleures réussites de celle-ci.

    Mes – enfin ceux de Michel et moi – 1996 ont été mis en bouteille en Février 1998 et sans chercher à leur trouver de grandes qualités je puis signifier qu’ils sont encore vivants, assez purs et qu’ils ne me font pas honte, mais si loin du ” grand style”!

    Patrick Essa

  2. La vérité est dans les bouteilles et ce ne serait pas la première fois que je serai en désaccord profond avec Essa. Un critique comme je les aime doit savoir aimer. on jugera la capacité de ce dernier à définir le “grand style”à la qualité du pathetic pretense ” de son jargon oenologique…..

  3. Une réponse sans argument qui se contente de considérer qu’une parole parfois – pas toujours car il est bien des choses que nous partageons -discordante suffit à mettre en évidence son peu d’intérêt, ce n’est guère digne du conseiller qui affirme avoir fait évoluer les Bourgogne issus du pinot.
    Par ailleurs je vous invite à relire mon texte, il s’adresse à un professionnel et n’a nul besoin d’être vulgarisé pour devenir intelligible. Tout y est pesé et mesuré avec soin car lorsque on travaille sur les vignes et les vins, rien ne peut être laissé au hasard et au seul ressenti gustatif.

    Essa

    • La vérité reste dans les bouteilles et dans les mots : on jugera de l’étonnante auto satisfaction que les vôtres expriment et de votre indifférence à vouloir être compris de tous.

  4. Je n’ai pas de certitudes, encore moins de vision dogmatique, j’expose simplement des faits et une analyse fondée sur l’expérience vécue de la vinification de ce millésime et sur les nombreuses dégustations de celui-ci opérées au fil des ans. Mon texte est très simple à comprendre et pour plus d’informations je renvoie le lecteur s’il le souhaite aux chapitres “techniques” et à celui sur les “millésimes” de mon site. Tout y est clairement et fort simplement expliqué.
    Cordialement,

    Patrick Essa

    • Donc les faits sont susceptibles d’interprétations différentes et de nombreux producteurs et oenologues de talent ne partagent pas la vôtre. Et quelle élégance pour faire ici de la pub pour votre site!

  5. Bonjour,

    Il y a trois points principaux qui m’interrogent dans ce texte.

    Le premier c’est l’affirmation (relevée par Pat Essa) que l’acidité élevée garanti un bon vieillissement. Mon expérience n’a certes pas la vôtre mais ça me semble largement incorrect. D’une part, il est des millésimes acides qui vieillissent mal. D’autre part, il est des vins aux acidités particulièrement basses qui vieillissent très bien. A mon avis, il s’agit d’un paramètre parmi d’autres et que, seulement conjuguée à d’autres paramètres, permet effectivement de pronostiquer un vieillissement favorable. Ceci dit, le simple fait que des vins (blancs) à acidité faible ou haute vieillissent bien suffit à invalider l’idée qu’une haute acidité permet un bon vieillissement. D’ailleurs quand moi-même j’évalue le potentiel de vieillissement, ce n’est jamais en me fiant à l’acidité du vin.

    Le second concerne la supposée instabilité des vins qui n’ont pas fait la FML. Ces vins sont légion : loire (Sancerre, par exemple), Mosel allemande… or par exemple les vins de Mosel sont parmi les plus impressionnants en terme de potentiel de vieillissement (certes, il y a le sucre aussi…) et en Loire, les vins ne sont pas en reste en terme de tenue au temps (et je ne vous apprendrai rien là-dessus). Conséquemment, je ne pense pas qu’une FML partielle ou absente soit un réel problème.

    Enfin, une question concernant le sujet des 1996. Parlons-nous ici, simplement du niveau des 1996 ou également des problèmes de “premox” comme disent les anglo-saxons. J’ai pour ma part rencontré un nombre non négligeable de ces bouteilles (mais pas que sur 1996, seules les plus “douloureuses” étaient de ce millésime – des Narvaux du domaine d’Auvenay) et ils n’étaient pas dans une phase. Ils étaient très stables dans l’oxydation 😉

    Bonne journée à vous.

    • Quelques précisions : les vins blancs vieillissent évidemment davantage par leur richesse en extrait sec que par leur acidité, mais dans le cas précis de ces 1996 l’acidité élevée ajoutée à la richesse préexistante réelle en sucre et en extrait semblait un bon gage de potentiel de vieillissement. J’aurais du être plus précis dans la formulation et merci de me le rappeler. Pour la question des FML je n’ai jamais mis en doute la qualité et le potentiel des vins conservant de l’acide malique mais j’ai expliqué le vieillissement précoce de nombre d’entre eux par les désadifications préconisées par certains pour mieux les stabiliser. Cela me semblait clairement exprimé. Enfin vous pouvez redéguster certains de ces 1996 aujourd’hui qui vous paraissaient oxydés et etre surpris par leur tenue au vieillissement, pour énigmatique qu’elle soit. Le titre choisi montrait mon embarras à comprendre les évolutions en dent de scie de ces vins. Mais la vérité est dans la bouteille et certains d’entre eux sont parmi les plus remarquables que j’ai eu la chance de rencontrer en trente ans de dégustations intensives. Et je ne crois pas au hasard…..

  6. Les 3 points de Matthieu ne sont pas les seuls à laisser dubitatif.

    L’histoire des péroxydes et du premox eut été une hypothèse de travail parmi d’autre que l’on pouvait entendre il y a plus de 10 ans. Asséner cela en 2014 relève d’une vision dinosauresque des choses, et plus gravement bidon. La confusion désacidification / stabilisation relève du même ( mauvais ) tonneau.

    Quand un critique entend éduquer la plèbe des vinificateurs de basse fosse grâce aux contacts éclairés qu’il entretient avec l’élite, alors autant que le professeur professe des choses actuelles et juste. Sinon, on descend de l’estrade, et on échange tout simplement.

    agitateur.

  7. content que vous vous connaissiez avec “Mathieu”et même que vous vous relayez dans le bousculement de mes manques de certitudes sur l’énigme de ces 1996.Comme vous semblez sûr de vous et bien donnez la nous l’explication rigoureuse et moderne et scientifiquement à la page de ces satanées variations des 1996 et sans vous cacher sous un pseudo et avec politesse s’il vous plait. Je ne demande qu’à apprendre.

    • Je souhaiterais juste indiquer que je ne cherchais pas à vous prendre à défaut. Simplement, certains aspects de votre article me posait question.

      Il reste que j’ai une vision différente des oxydations que j’ai constaté sur 1996. Je ne les pense pas temporaires ou relevant d’une phase. Mais là, je parle bien des problèmes d’oxydation prématurées, qui sont constatées également sur d’autres millésimes. Concernant le niveau global du millésime je ne me prononcerai pas, je n’en ai pas dégusté suffisamment. Loin de là.

      • Et vous avez bien fait de le faire, d’autant que votre propos était clair et immédiatement compréhensible, car non marqué d’animosité contrairement à celui d’ agitateur. Ce qui m’agace le plus dans ces 1996 fut dans les années 2000/2004 la variation de bouteille à bouteille d’un même lot, le même jour. Je n’ai eu des oenologues alors comme seule explication, et logique, la variabilité du bouchon, dont beaucoup étaient vraiment traités pour être blanchis. On me dit que cette explication est dinausorienne sans d’ailleurs daigner en donner une autre. Je ne me faisais aucune illusion sur l’hypothèse de l’oxydation à retardement, faute de meilleure, mais les Champagnes ont eu la même évolution sur pointe avec cette fois ci une vraie autolyse de levures! Celle d’une forte réduction est certainement plus plausible sauf sur la forme aromatique prise qui n’avait rien des mercaptans type noisette grillée qu’on a par exemple dans les 1999, en plus très mûrs. Enfin tous les 1996 partagent en France la même tendance à avoir des arômes de truffe blanche, des sauvignons de haute école aux plus grands Jurançons qui il est vrai l’ont plus souvent que d’autres. Cet arôme je le trouve très noble et ne méritant aucun sarcasme. Enfin la théorie de la maturité phénolique appliquée à des raisins blancs ne prend pas en compte la dimension artistique que donnerait celle de maturité idéale. On voit bien pour les rouges bordelais les ravages que le jusqu’au boutisme phénolique conduit sur les merlots et l’existence paradoxale de notes herbacées sur des raisins mûrs phénoliquement et ne contenant pas de pyrazine, et qui donneront certainement de l’élégance au vieillissement à des vins jeunes dénigrés par quelques techniciens. Enfin je crois me rappeler que les fermentations alcooliques ont souvent été plus lentes que ne le fait croire Essa, toute l’activité fermentaire , y compris évidemment la rétrogradation malolactique ayant eu tendance à la paresse…. Le mystère continue……Mais peut être agitateur va soulager nos doutes…….

  8. Ô combien il est difficile de parler de dégustation d’un millésime, mais faisons-le dans le respect d’autrui. Certains propos hatifs contre les écrits de Michel sont regrettables car on ne peut pas toujours être exhaustif en quelques lignes même bien pensées. Amateur passionné de vins et particulièrement (mais pas seulement) de ceux de Bourgogne, j’ai acheté et gardé des 1996 blancs et rouges en cave fraîche à température constante d’environ 10° depuis mes achats en direct des propriétés. J’ai goûté en 2008, puis 2009 le Clos de la Barre des Comtes Lafon, ainsi que les 1er crus de Saint-Aubin de chez Marc Colin. J’étais terrifié par l’incroyable acidité au point que j’ai contacté les Domaines pour leur en parler. Ce faisant j’ai réalisé que commencer par tester le Clos de la Barre dans ce genre d’année était une erreur et j’ai donc goûté Désirée qui n’était pas aussi difficile mais les deux vins à ce stade n’étaient pas du tout plaisants. Et boire le vin doit être un moment de plaisir. Idem pour les 1er crus de Saint-Aubin, le Domaine que je connais aussi de longue date m’avait proposé de les reprendre, j’ai préféré les garder et attendre . A partir de 2012 ces vins que je suivais changèrent heureusement, la perception gustative de l’acidité diminuant fortement. Fin 2014 nous ouvrons souvent ces 1996 qui sans être exceptionnels sont agréables à boire. Je reviens sur les commentaires de Mr Essa concernant 1989, c’était un millésime chaud qui était et est encore enjoleur pour les meilleurs (souvent trop riche), mais n’ayant aucun signe perceptible d’acidité.
    Concernant 1999 il en existe de grands que je commence à découvrir.
    Oui 1996 n’est pas au niveau de ce que l’on pouvait espérer mais il reste très buvable et parfois très agréable. J’ai goûté les Meursault Perrières 96 des Comtes Lafon et de Pierre Morey plusieurs fois cette année: très fondus et élégants.Bonne journée à tous.

  9. Bonsoir,

    En vrac:

    Pour l’animosité: j’étais bien tranquille au fond de ma grotte, jusqu’à la mise en lumière par la “réponse à petit philou” ou je lis: “Pire encore, …, agitateur…”. Quand ça chatouille, il y a des choses qu’on ne laisse plus passer.

    Je l’ai déjà dit, je le répète: vous ( la RVF d’une autre époque, avant même les prémices du net de masse ) m’avez accompagné dans mon approche et apprentissage du vin produit fini. Depuis, l’émancipation est passée par là mais c’est un autre problème. Recentrez vous sur les verticales, horizontales, etc…car vous y êtes crédibles et constructifs. Renseignez vous si vous voulez sur quelques aspects techniques, mais n’en faites pas un cheval de bataille ou un élément de différenciation, car vous prêtez alors un flanc trop facile à la critique ( vous aviez du me lire par ailleurs pour provoquer la réaction sur le “journalisme de promenade” ). Il y aura toujours des gens qui ont bu plus de DRC que soi même ( hein, François ), et il y aura toujours des garnisons complètes de gens plus calés que vous sur la technique pure. Terrain glissant.

    La géguerre blog vs fora vs B et D ne m’intéresse pas. D’ailleurs, j’ai parfois été très dur sur le fond et la forme avec votre forumiste préféré Jérôme P, notamment au cours d’une discussion épique sur un “carton cosmique”…..

    A nouveau comme Matthieu ( que je ne connais pas vraiment, d’ailleurs ): je ne dis pas que ça n’existe pas, mais des vins oxydés qui ressuscitent, j’en ai jamais croisé.

    Pour les variations inter bouteilles d’un même lot, d’une manière générale sans se focaliser uniquement sur le prémox: pour des différences faibles en proportion et en qualité, on pourrait se pencher sur le bouchon. Why not. Pour monter au niveau de ce que tout un chacun peut parfois observer, on doit obligatoirement réfléchir à d’autres pistes. Pour les micro-cuvées à forte valorisation en particulier, typiques de certaines régions et crus, on est obligé de penser aux conditions de la mise: avinage, vidange des résidus de lavage/rinçage et hétérogénéité des becs de tireuses, ré-incorporation de l’avinage dans le lot embouteillé, etc…..Pour les lots pseudo homogènes à X centaines de milliers de cols, évidemment,on ne détecte pas forcément des “problèmes”, mais simplement des vins un poil “différents”. Un vrai assemblage homogène dans ces conditions est quand même un vrai défi.

    Sur la question des prémox, on ne peut pas nier un ensemble multifactoriel de causes possibles, éventuellement cumulables, pas forcément dans l’ordre et non exhaustif:
    – trop de bois trop neuf,
    – la nutrition azotée de la plante, les rendements,
    – pressurage trop doux, débourbage trop sévère,
    – un SO2 efficace trop faible,
    – une évolution du process vers plus de manipulations et plus d’oxygénation des vins,
    – une hyper protection précoce, et un maillon faible “plus tard”, alors que l’inverse serait préférable si le process n’est pas homogène,
    Quelles que soient les raisons qui peuvent impacter un vin, c’est toujours difficile à entendre car il y a toujours un “coupable”. Coupable de pas connaitre un truc déjà plus ou moins connu, coupable de pas avoir anticiper un truc non connu, etc….Ainsi donc, avec une assemblée collégiale, il est à peu prés impossible de sortir une ligne commune avec des proprio, chefs de culture, conseillers agro, maîtres de chai, conseillers oeno, fournisseurs et prestataires. Facile mais tellement humain: c’est la faute à autrui…..

    Sur ce, je retourne dans mon village gaulois préféré. Certes, parfois, ça dégomme sévère. Ca ventile, ça disperse, sans se soucier en permanence de conséquences de “propos hâtifs”, ni même ( à la longue ) de mon anonymat. Mais à la fin, tout le monde finit autour du banquet ( sauf le barde François, suspendu en haut de l’arbre, mais si on le garde c’est qu’on l’aime bien ).

    • Parfait et merci y compris de reconnaître la variabilité des bouchons en oxygene dissous ou en défaut mécanique sauf que pour l’essentiel et ce qui nous intéresse les grands vins il ne s’agit pas de premox (horrible barbarisme pour oxydation prématurée) mais bien de réduction puisque les mêmes vins semblent plus jeunes aujourd’hui qu’hier. Vos généralisations hors sujet etconnues de tous sur l’oxydation précoce des vins des années 90 et 2000 n’expliquent en rien l’énigme de ces 96. Je suis déçu mais sans rancune.

  10. Les errements liés à l’oxygénation pendant la vinif ou après ne sont pas nouveaux et ne constituent pas une énigme en soi même s’ils sont difficilement prévisibles. La question qui se pose, dans le cas présent, est la suivante : un vin oxydé dans sa jeunesse peut-il inverser la tendance en vieillissant, sachant qu’il n’y a à priori aucune raison pour que ce soit le cas ? Est-ce qu’un passage plus ou moins prolongé en carafe ou en bouteille peut réduire un vin préalablement oxydé ? Oxygéner un vin réduit, soit, mais le contraire ? Simple problème de chimie. Si tel n’est pas le cas, c’est tout simplement que certains vins étaient instables et ont été ouverts trop tôt. Quant à ceux qui soi-disant ressuscitaient après 24 h d’ouverture, c’est tout simplement qu’ils n’étaient pas oxydés (même si ça y ressemblait).

    • Certes et je crois sur ce point partager votre avis. Il suffit de lire….Je n’ai jamais eu trop d’illusions sur l’autolyse à retardement et suis ravi de vous voir reconnaître l’énigme de l’instabilité à laquelle d’ailleurs malgré votre immense et respectable savoir oenologique vous ne donnez aucune explication.

  11. Mon immense et respectable savoir œnologique se limite peu ou prou à l’exercice diversement raisonnable de mes immenses et non moins respectables capacités intellectuelles, cher Maître. J’imagine par exemple que si l’on s’efforce de stabiliser le vin par diverses méthodes, c’est qu’il est instable par nature. Je crois savoir aussi que 96, avant d’être unanimement encensé, fut un millésime turbulent, à rebondissements, chose qui va dans le sens d’une instabilité accrue, répercutée à tous les niveaux (au niveau de certaines pratiques viticoles, par exemple, mais vous êtes mieux placé que moi pour savoir ce que les vignerons bourguignons fabriquaient au chais en 96). Quoiqu’il en soit, des vins de garde à priori, et pas de quoi s’affoler. Autrement dit, il peut être sage, en ce qui concerne de tels vins, d’attendre un peu pour en parler. Beaucoup sont aujourd’hui fort bons, voir excellents, et j’ai tendance à penser que cette histoire d’énigme du 96 n’est qu’une vue de l’esprit, une affabulation pure et simple, et qu’il n’y a par conséquent rien à expliquer de plus.

  12. Un vin instable n’est pas une énigme, il y en a toujours eu il y en aura encore. Il n’y a pas d’énigme 96, et vous le savez aussi bien que moi, même si vous avez du mal à l’admettre

  13. Ah au fait merci d’échanger quand même avec De Groin , Butane et Dechauve comme si élégamment vous caricaturez leur nom, avec le courage propre aux “pseudos” sur LPV, comme un petit garnement. Mais nos colonnes vous seront toujours ouvertes si le docteur Jeckyll en vous, comme dans votre précédent post prend le dessus sur Mr Hyde; Et si vous résistez à l’oukase de “chacun chez soi”. Bettane

  14. Revenons au sujet : il est plaisant qu’après avoir nargué le dinausore et nous avoir fait espérer q’il aurait une réponse scientifiquement rigoureuse et à la page pour expliquer ces 1996 vous aboutissiez à n’en donner aucune puisqu’il n’y a rien à expliquer : un vin instable il y en aura toujours eu et il y en aura encore! Reconnaissance étonnante de la fatalité ou du hasard, mais aussi quelle joie pour les pauvres “devins” que nous prétendons être d’avoir “prédit” qu’un jour si “on est sage et qu’on les attend un peu ” ils peuvent être bons voire excellents . Essa appréciera. Mais le devin reste sur sa faim car il ne croit jamais à la fatalité et fait confiance aux vrais scientifiques, ceux qui cherchent à comprendre, et donc à expliquer quand ils ont compris, pour progresser dans leur métier d’interface et de vulgarisateur.

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