Le vin, bon ou mauvais pour la santé ?

Nous avions publié ici, en décembre dernier, les fruits du travail mené par Vin & Société avec l’appui du cabinet Alcimed, résultats d’une étude analysant l’ensemble des publications scientifiques sur la thématique vin et santé, issues de laboratoires de recherche dans le monde entier et répertoriées par le principal moteur de recherche de données bibliographiques dans tous les domaines de spécialisation de la biologie et de la médecine (PubMed).

Joël Forgeau, président de Vin & Société, constate que « de nouveaux modes de consommation ont émergé, on ne boit plus aujourd’hui comme hier. En toute chose il faut de la mesure, ni excès ni privation mais de l’éducation. » L’ensemble de la filière vin française représentée par Vin & Société est d’ailleurs engagée dans une démarche de responsabilité. « Plutôt que l’abstinence totale, dont on sait qu’elle est à la fois illusoire et inefficace comme l’histoire nous l’a démontré, Vin & Société prône l’éducation et le bien boire, c’est-à-dire une position de raison alliant plaisir et modération. ».

Bouillie statistique

Via son manifeste « Fiers & Responsables », Vin & Société rappelle à la fois le poids économique et culturel du
vin dans notre pays mais aussi la nécessité d’éduquer et de lutter contre les excès, dans le respect de soi comme
de ceux qui travaillent dans les métiers du vin. Extrait. « Dans un verre de vin, il y a un peu de géologie, de la géographie, du travail, de la précision, du savoir-faire, de la transmission, et surtout de l’éducation et de l’histoire. Traiter le vin uniquement en boisson alcoolique c’est mépriser l’histoire, faire une “bouillie statistique” avec notre culture. Autant calculer Monet en kilos de peinture et Ravel en décibels. Le vin nous invite à exercer nos facultés sensorielles. Le découvrir dans toute sa diversité, savoir le goûter, l’apprécier et le boire, avec sa tête et ses sens, cela s’apprend et cela se partage. »

Lancé en mai 2011, ce manifeste a fait le tour des régions françaises où il a remporté l’adhésion de nombreux élus de toutes sensibilités politiques venus le signer à l’occasion d’événements régionaux. Chacun peut le signer, en cliquant ici. Parmi les différentes actions de prévention, d’éducation et de responsabilisation de Vin & Société (notice de consommation destinée au grand public, cartes sur les repères de consommation), on retiendra la mise à disposition de “vinétuis” permettant de repartir chez soi avec une bouteille entamée au restaurant, pour la partager un autre jour et les partenariats mi sen œuvre avec la Sécurité Routière, en particulier lors des fêtes et salons viticoles. A total, 400 000 éthylotests ont été distribués l’an dernier.


Plus de vigilance

Le phénomène est maintenant bien connu, la consommation de vin a chuté de 70 % en 50 ans (et 25 % en 15 ans). Cela concerne toutes les catégories professionnelles et toutes les tranches d’âge. Les Français ont modifié leurs habitudes de consommation et selon le baromètre Santé INPES 2010, 17 % d’entre eux sont des consommateurs réguliers de vin (tous les jours ou presque), 45 % sont des consommateurs occasionnels (1 à 2 fois par semaine ou plus rarement) et 38 % sont non consommateurs. En 20 ans, la part de consommateurs réguliers a diminué de 30 %. Ces chiffres sont confortés par une étude baromètre IFOP 2011 réalisée pour Vin & Société indiquant que 71 % des Français se déclarent plus attentifs et plus vigilants quant à leur consommation d’alcool lors d’un repas.

Joël Forgeau indique que la filière est consciente « des risques liés à une consommation excessive et prend sa part de responsabilité au travers de Vin & Société. Quotidiennement, qualité, exigence et responsabilité guident notre action. » Il ajoute que cela n’empêche pas la filière d’être interpellée « par la montée d’un courant prônant l’abstinence qui nous semble excessif, inopérant et déresponsabilisant pour l’individu. Nous pensons que seule une société privilégiant l’éducation, la raison, et la responsabilité est à même de lutter contre les excès et ce, dans tous les secteurs. L’alimentation et la boisson ne doivent pas être vues sous le seul prisme de la nutrition et de la santé, c’est à la fois aux antipodes de la culture française, source d’inquiétude pour le consommateur et inopérant en terme de santé publique. »

Du plaisir et de la mesure

L’estimation des décès attribuables à l’alcool est un exercice dont les résultats sont très dépendants de la méthodologie utilisée. Ces estimations doivent donc être considérées avec précaution tant qu’aucun consensus scientifique n’existe sur la méthodologie. Ainsi, une étude récente annonçait de 28 000 à 49 000 décès attribuables à la consommation d’alcool. Cependant plusieurs points concernant la méthodologie utilisée peuvent être discutés, comme l’existence d’un délai entre la consommation d’alcool et l’apparition d’une pathologie (particulièrement
les maladies multifactorielles), l’influence non prise en compte du type d’alcool et l’influence, non prise en compte non plus, du mode de consommation alors que les effets d’une consommation modérée régulière et d’une consommation de type binge driking sont très différents.

Une consommation de 13 g d’alcool par jour (environ un verre et demi) serait à l’origine de 0,4 % des décès masculins et de 2 % des décès féminins, tandis que des consommations excessives sont à l’origine d’une part importante des décès, 32 % chez l’homme à 117 g par jour (11,7 verres) et 29 % chez la femme pour 85 g par jour (8,5 verres). Joël Forgeau conclut que le rôle de chacune et la mission de tous est de « lutter concrètement contre les excès dans tous les domaines » et non de stigmatiser une consommation « de plaisir et de mesure ». Son souhait est de voir évoluer « l’étouffant principe de précaution vers un principe de gestion du risque beaucoup plus pragmatique, dynamique et efficace applicable à un grand nombre de secteurs et de situations.» 

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