La vestale du vin

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C’était la maison du bonheur : trois femmes étonnantes, Colette la mère et ses deux filles, Cathy et Laurence, épicuriennes, généreuses, trois grandes vigneronnes suscitant l’admiration et l’affection de tous. Un destin cruel a mis fin à la vie de la cadette, Laurence, infiniment trop tôt, son cœur trop fragile a cessé de battre et nous prive à jamais de son talent et de son rayonnement. La communauté vigneronne alsacienne est en deuil et les témoignages de compassion envers Colette, Cathy et Martin, le compagnon de Laurence et le père de ses deux adorables petits enfants, ne manqueront pas. Toute l’équipe de bettane+desseauve partage leur douleur.

Michel Bettane

 

Il y a des nouvelles qui paraissent tellement inconcevables que l’on se refuse longtemps, même en écrivant ces lignes, à y croire. Laurence Faller nous a quittés. À 47 ans, emportée par une crise cardiaque. Elle qui était la beauté, le talent, la simplicité et la force de conviction incarnées. Depuis ses premières vinifications, elle avait démontré à tous et, en premier lieu à nous, une sensibilité et une précision inouïes. Laurence faisait partie du très petit cercle des artistes du vin, ceux qui savent donner à leur métier d’artisan méticuleux une dimension supérieure où l’on trouvait à la fois une extrême exigence, une implication de tous les instants et, au final, une vision aussi jusqu’au-boutiste que poétique d’une charge qui subjuguait aussi bien ceux qui goûtaient ses vins que ceux qui la rencontraient.

Certains de nos lecteurs et internautes ont eu la chance de la rencontrer en novembre dernier, lors de notre dernier B+D WineTrip à Saint-Émilion où nous avions consacré un master class exceptionnel aux grands vins réalisés par des femmes. Elle était venue avec l’une des cuvées emblématiques du domaine familial, le riesling Sainte-Catherine du Schlossberg et, au cours de ce moment rare en compagnie de passionnés et d’admirateurs, elle avait parlé du Domaine Weinbach, de son travail, de ses vins. Comme d’habitude, elle avait dissimulé une passion absolue sous un ton lisse et sage.

Sage comme Weinbach, imposant de majesté et de sérénité où Colette, Cathy et Laurence, vestales d’un Bacchus serein, veillaient et accueillaient comme nul autre domaine n’a jamais su ou pu le faire. Tous ceux qui ont déjeuné ou dîné là ont passé un moment inoubliable et rare.

Je me souviens enfin de la quête absolue d’excellence qui animait Laurence. Exerçant la mission de goûter, de commenter et, parfois, de juger les vins, Michel et moi-même étions au premier rang pour apprécier cette exigence. Elle était pour Laurence si impérieuse qu’elle l’a d’une certaine façon consumée. Comme les vestales antiques, Laurence s’est consacrée totalement à la mission qu’elle s’était fixée. Avec un succès que sa modestie l’empêchait de mesurer pleinement : ce don exceptionnel de vinificatrice a touché au cœur des milliers d’amateurs de par le monde.

À Colette, à Catherine et à ses deux enfants, toute l’équipe de Bettane+Desseauve, Michel Bettane et moi-même adressons le témoignage de notre amitié et nos plus sincères condoléances.

Thierry Desseauve

Photo D.R.

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1 COMMENTAIRE

  1. Laurence va nous manquer! Comme Thierry le dit, la soudaineté de cette perte est telle que j’ai du mal à réaliser. Je suis de tout cœur avec Catherine, Colette et les enfants de Laurence qui, pour la deuxième fois, perdent un être qui leur est si cher.

  2. Mes fortes pensées pour la famille Faller , et j’ ai rencontré Laurence sur nombreux d’ occasions , quand j’ ai travaillé pour la famille Perrin à Beaucastel.
    Un vrai choque pour moi.

    Mike Rijken Wine Safari

  3. Le domaine de Weinbach a bénéficié de l’expertise, du talent, de l’intelligence et du charme de Laurence Faller pour se maintenir tout en haut de la hiérarchie des vins d’Alsace pendant 20 ans. Convaincu par une telle maitrise de son art, j’étais reparti très peiné de ma dernière (grande) dégustation au domaine, avec l’Académie des Oenophiles, le mois dernier, dégustation au cours de laquelle Laurence Faller nous était apparue fragilisée. Aujourd’hui, je suis sans voix. Tous les vins qu’elle ne fera pas manqueront certainement aux amateurs d’Alsace, mais pas autant qu’elle à ses proches, et en 1er lieu ses 2 petits enfants, à qui nous devons tous penser aujourd’hui.

  4. Depuis que la nouvelle est tombée comme une lourde pierre, je n’arrête pas de penser à Laurence. Et à Colette et Catherine. Toutes les trois nous avaient reçus, Patrick Cronenberger et moi-même,nous avaient ouvert leur porte, leur chai, leurs vignes, leur passion, leur coeur. C’était pendant les vendanges 2004. Laurence s’était confiée, avec douceur, loin du vin, c’était une conversation de maman et future maman. Un moment que je n’oublierai jamais. Je pense à ses enfants et son mari, à sa petite maman et sa grande soeur. Et je pleure car je ne veux pas y croire. Que cette journée du 20 mai, jour de cet adieu nécessaire mais si douloureux, va être dure…

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