Trois questions à Jean-François Préau. Le directeur de la cave coopérative champenoise Mailly Grand Cru revient en quelques mots sur les forces de la coopération dans le paysage viticole de la Champagne.
Faut-il encore des coopératives dans une appellation aussi prestigieuse que la Champagne ?
Non seulement il en faut, mais il y en a. Je rappelle que 70 % des vignerons, nos « déclarants de récolte », sont adhérents à une coopérative et que la coopération représente 9 % des ventes en Champagne avec 28 millions de bouteilles, le négoce pèse 213 millions de cols et les vignerons indépendants, 65 millions. Ces chiffres sont ceux publiés aujourd’hui (le 14 mai, NDLR) par le CIVC sur la période qui va du 1er avril 2013 au 31 mars 2014. Cela dit, ces chiffres masquent une réalité. Sur les 140 coopératives présentes en Champagne, seules 40 vendent des bouteilles à leurs marques. Les autres ne vendant qu’aux Maisons de Champagne, le négoce.
Qu’est-ce qui pousse le vigneron vers la coopération ?
Plusieurs choses. La tradition familiale, d’abord, très forte dans le mouvement coopératif qui, à l’origine, était très militant. Un deuxième élément tient au morcelage de la propriété qui rend l’offre de la coopération attrayante pour ces exploitants de petites structures. Ils trouvent auprès des coopératives un éventail de conseils, de savoir-faire et d’outils à même de les aider à mener leurs exploitations. Tout le monde n’est pas prêt à sauter dans un avion pour Hong Kong ou New-York et la coopération, c’est rassurant.
Mailly Grand Cru est une coopérative un peu particulière…
Depuis la création en 1929, Mailly Grand Cru s’est doté de statuts qui imposent aux adhérents d’être propriétaires à Mailly. C’est un petit village, nous exploitons 70 hectares seulement. Ainsi, nous avons préservé une structure à taille humaine qui ne compte que 80 adhérents. Nous sommes loin des chiffres des grandes coopératives de Champagne. Nous embouteillons à notre marque presque toute la production, en fonction des quantités de récolte. Et nous vendons à bon prix 450 000 bouteilles par an, exclusivement au travers des cavistes et de la restauration et pas une bouteille ne part vers la grande distribution.
Propos recueillis par Nicolas de Rouyn