Les vins du Rhône, ceux qu’il faut déguster

Le Rhône vient de boucler sa semaine consacrée aux professionnels avec le salon Découvertes en Vallée du Rhône. Entre confirmations et trouvailles, notre envoyé très spécial a fait de vraies découvertes.

Découvertes, ou #DVR2019 pour les intimes, c’est plus de deux mille domaines et maisons qui exposent et font déguster leurs vins sur quatre sites en quatre jours. Une grosse logistique pour l’interprofession et un gros enjeu pour la région qui se dévoile dans toute sa diversité. Il faut dire qu’entre les blancs de Condrieu, les effervescents de Die, et les nombreux rouges du sud, le professionnel a de quoi faire son marché à tous les prix.

Olivier Borneuf a présenté avec passion des appellations en devenir avec de vraies personnalités.

Ils sont nombreux à jouer le jeu de la présentation collective, ce qui permet de goûter les millésimes récents des acteurs reconnus et de faire des découvertes. Au rayon « connu comme le loup blanc », on a pu discuter longuement avec Philippe Guigal qui payait de sa personne lundi à Ampuis. Guigal est un acteur de poids, tant par sa taille que par le rayonnement qu’il donne aux appellations du Rhône, nord et sud. Son côtes-du-rhône est une valeur sûre, jamais prise en défaut, et qu’on trouve à peu près partout dans le monde. En haut de la pyramide Guigal, on trouve la trilogie de côte-rôties parcellaires, dites LaLaLa, toujours taillée pour la longue garde. Au rayon découvertes, on rencontre les jeunes qui reprennent ou créent des domaines. Si des trentenaires comme Olivier Klein au Domaine de La Réméjeanne sont déjà bien identifiés, on débusque les tout nouveaux. Le Domaine Roman par exemple, où Arnaud Roman et sa sœur Anne-Lise mettent en bouteilles des côtes-du-rhône Plan de Dieu depuis 2015. Le Domaine Les Sibu, récemment créé, où le jeune Loïc Alazard veut faire des côtes-du-rhône Sablet et des gigondas dont on parle. Ça bouge aussi au Domaine de l’Espigouette où les frères Julien et Emilien Latour donnent un coup de jeune et bousculent les habitudes.

Catalyseur d’énergie
Inter Rhône, qui organise Découvertes, joue son rôle de catalyseur des énergies. Grâce à un travail minutieux de collecte d’informations, au niveau du vignoble mais aussi sur les marchés, elle dégage des axes stratégiques pour les années, voire les décennies à venir. Michel Chapoutier, qu’on ne présente plus, et Philippe Pellaton, qui dirige Maison Sinae (anciennement Laudun-Chusclan Vignerons) ont beaucoup parlé hiérarchisation et prémiumisation des appellations, avec l’idée sous-jacente de faire monter le niveau général, y compris des appellations régionales. Un gros travail est fait sur les côtes-du-rhône, avec parfois peut-être le risque de mettre la charrue avant les bœufs en voulant faire passer des villages en cru sans que toutes les conditions ne soient encore réunies. Certains vignerons devront apprendre la patience. Mais, à contrario, une masterclass Cairanne animée par Olivier Borneuf (expert pour le Guide des Vins Bettane+Desseauve) a montré qu’un passage en cru pour un ancien côtes-du-rhône villages, c’était en 2016, peut être probant. Tous les vins présentés, notamment les blancs du Domaine Alary et de l’Oratoire Saint-Martin, ont fait mouche. Comme quoi il n’y a pas que Marcel Richaud à Cairanne.

Laure Colombo a présenté le 1er millésime du domaine qu’elle a lancé avec son conjoint Dimitri.

Plus de vins blancs
Un autre axe de travail est la répartition des couleurs. Le Rhône, en particulier le Rhône méridional, est aujourd’hui particulièrement connu pour ses rouges charpentés. Mais les jeunes, que les marqueteurs appellent millenials pour justifier leurs bac+5, cherchent des vins plus frais tandis que le marché mondial réclame également des rosés et des blancs. Là encore le Rhône veut tirer son épingle du jeu, en travaillant évidemment sur les questions de maturité et d’acidité pour les rouges, mais aussi en augmentant la proportion de vins blancs produits, qui pourrait passer à 15 %, alors qu’elle est à 10 % aujourd’hui. Reste à le faire dans l’ordre et progressivement, pour que les vignerons, qui doivent investir et planter, soient eux-mêmes convaincus qu’il y a des débouchés… et que le Rhône sud n’a pas à rougir de ses blancs.

Photo d’ouverture : Philippe Guigal et Antoon Jeantet-Laurent, Goliath et David, deux acteurs désormais majeurs du vignoble du Rhône.

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