Voyage autour de la cave de Michel Bettane, #4

Un véritable artisan des crus du beaujolais
J’ai décidé de faire le point sur un millésime « conscrit », conscrit en beaujolais désignant les filles et les garçons nés dans une année se terminant par le même nombre. Début mars, ils font une sympathique fête dans les villages où jeunes et vieux se retrouvent. Un exemple dans notre pays qui aime tant les fractures. Donc 2010 est conscrit avec notre terrible 2020. Mon choix s’est porté volontairement sur le vin d’un des vrais artisans nobles des crus du beaujolais, travailleur, respectueux du terroir et du style le plus capable de mettre en valeur dans la durée le cru. Daniel Bouland règne sur ses vignes de Corcelette sur Morgon mais a acquis et exploite une jolie parcelle sur les terres si spéciales de côte-de-brouilly, voisine du célèbre château Thivin. Il aime pour l’avoir appris de son père les vins colorés et charnus, vendangés mûrs, vinifiés pour extraire le maximum de matière possible, plutôt à chaud en fin de fermentation, donc aux antipodes d’autres remarquables et plus célèbres producteurs de son village.

Ce n’est pas un vin de soif…
Les sols métamorphiques du mont Brouilly tendent à donner des tannins fermes au gamay, ce qui ne lui fait pas peur. Dans son type de vinification il faut savoir ouvrir le vin au moins une heure à l’avance et surtout ne pas le déguster trop frais, ce qui ne convient qu’aux vins de soif et de fruit. 17/18° mettent parfaitement en valeur la richesse du nez, dans un grand verre, sur la prune, avec une petite amertume minérale qui est la marque même du terroir, la bouche ample, chaleureuse, généreuse même est loin d’avoir dit son dernier mot, le tannin est parfaitement intégré avec le toucher de bouche souple qui est propre au cépage. Je ne répéterai jamais assez que dans un vrai vin de terroir et de lieu les sensations tactiles sont aussi capitales que la saveur, et que le confort de la dernière se fait parfois aux dépens de l’expression du sol. À chacun, producteur ou buveur de faire ses choix, en matière de beaujolais, les miens sont faits depuis longtemps.
Daniel Bouland, cuvée Mélanie, côte-de-brouilly 2010

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