Voyage autour de la cave de Michel Bettane, #5

Les saveurs les plus originales des cépages languedociens
Pour faire la paire avec ma conscrite de Mélanie 2010, voici les Grands Carmes de Simone. Ce n’est pas que je souhaite à Mélanie de finir ses jours dans ce type de maison d’accueil, mais tout simplement parce que j’adore ce vin qu’on boit toujours trop jeune. On ne présente plus la gloire du vignoble aixois, Château Simone, ni la famille exemplaire qui l’a en charge depuis plusieurs générations, les Rougier. Sur une pente d’éboulis calcaires d’origine lacustre, exposée plein nord et abritée des violences climatiques (sauf, hélas, des sécheresses d’été des derniers millésimes), les meilleurs cépages languedociens, blancs en particulier, donnent leurs saveurs les plus originales, les plus fortes et les plus durables. Les Grands Carmes n’est pas un second vin mais un peu comme Alter Ego par rapport à Palmer, une autre expression du terroir, née de sols un peu différents, très voisins géographiquement des vignes qui jouxtent le château et d’un assemblage particulier qui privilégie la clairette (80 %) épaulée par 10 % de viognier pour le parfum et 10 % d’ugni blanc assez âgé, pour le mariage des deux autres.

Le cœur de la Provence, c’est ici
On le présente comme plus immédiat à boire qu’un château-simone, c’est bien dommage. Si son fruit est plus tentateur, il n’exprime qu’imparfaitement le génie de la clairette avant huit à dix ans d’âge. Ce cépage à l’amertume légère soulignant ses arômes fermentaires propres, hésitants entre le tilleul, la verveine et surtout le fenouil, est en fait une sorte de riesling languedocien qui a besoin de l’affirmation de son caractère terpénique pour s’accomplir. Ce caractère qui fait parfois penser à une odeur de pétrole renforce les notes de fenouil et a une résistance incroyable à l’oxydation. Après dix ans, la couleur et l’éclat de ce vin restent intacts, construits sur une matière noble, profonde, comme on n’en trouve plus que rarement dans nos chardonnays bourguignons modernes délavés ou vendangés verts. Grande viticulture, évidemment petits rendements et aussi art du pressurage et de l’élevage, considérablement aidés par la cave fraîche et enterrée dont bénéficie ce domaine. Rappelons que le cœur de la Provence est ici, pas plus au sud, et que les cépages blancs autochtones sont plus anciens que les cépages espagnols, aussi nobles et adaptés soient-ils, qui font le triomphe des rosés du Var.

Château Simone, Les Grands Carmes de Simone blanc, IGP bouches-du-rhône 2010
https://chateau-simone.fr/

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