Le Rhône nord : treize étapes très tendance

De Vienne à Valence, le Rhône taille son lit dans le granit, entre des pentes abruptes et des terrasses étroites (les chaillées), soutenues par des pierres sèches, exposées au froid mistral et à un soleil qui rôtit. De ces vignes acrobatiques exigeant un travail rude et surtout manuel, naissent des pépites. Bienvenue au royaume de la syrah et du viognier, promesses de rencontres de haut niveau et de dégustations qui tombent à pic, un chapelet d’appellations très à la mode. Par Pascale cassagnes

En terrasse sur l’histoire

Du haut des terrasses vertigineuses de l’appellation côte-rôtie, près de vingt-quatre siècles d’histoire viticole vous contemplent. Il est possible de remonter le temps avecla famille Guigal qui a sorti de ses réserves une belle collection d’objets gallo-romains de la vigne et du vin pour l’installer dans son tout nouveau caveau, près du château d’Ampuis (son siège social). À côté, une autre collection, celle des flacons Guigal, mais aussi Vidal-Fleury et Bonserine, se parcourt verre en main et un peu de latin aux lèvres : « Bonum vinum laetificat cor hominis » (le bon vin réjouit le cœur de l’homme).
Le Caveau du château – Domaine Guigal. 6, route de la Roche, 69420 Ampuis

Entre deux rives

Etablie depuis 1835 à Saint-Jean-de-Muzols, sur la rive droite du Rhône, la célèbre maison de négoce Delas vient de passer le pont, installant sur l’autre rive une partie de ses installations : plus de 3 000 m2 de chais, un vaste caveau-boutique, une maison d’hôtes privée. Au milieu, séparant les espaces, un étonnant mur de pierre ondule comme un voile agité par le mistral et les parcelles vallonnées de l’Hermitage.
Maison Delas Frères. 40, rue Jules Nadi, 26600 Tain-l’Hermitage

Stéphane super-star

Né pendant les vendanges 1977, Stéphane Ogier a grandi dans le parfum des barriques et collé très tôt son oreille aux cuves pour entendre le bouillonnement des vins, ceux des granites de la côte Blonde, ceux des schistes foncés de la côte Brune engendrant notamment la rare cuvée La Belle Hélène. Celui qui, à six ans, « via trois tonneaux que vinifiait sublimement (son) père », rêvait déjà de devenir vigneron joue aujourd’hui en virtuose de toutes les subtilités des syrah et viognier. Visites sur rendez-vous.
Domaine Ogier. 97, route de la Taquière, 69420 Ampuis

L’appel de la colline

Parcourir la colline de l’Hermitage permet non seulement de plonger dans un paysage grandiose – site classé – mais aussi de prendre la mesure du travail de titan que demande ici la culture de la vigne. Avec ses vélos (électriques), la maison Chapoutier fournit tout le matériel pour suivre le parcours et percer les secrets de ce vignoble de 136 hectares, peut-être le plus mythique de la vallée du Rhône. Après l’effort, le réconfort d’une dégustation au caveau ou dans l’un des gîtes au milieu du vignoble, avec l’option cave remplie.
Maison Chapoutier. 18, avenue du Docteur Paul Durand, 26600 Tain l’Hermitage

Syrah in the heart

Hermitage, côte-rôtie, cornas portent la syrah à des sommets d’expression. Plus grande productrice de syrah d’Europe, la cave de Tain fait découvrir cette diva du Nord avec des visites des vignes en gyropode ou en buggy, des dégustations sur l’eau ou dans des lieux insolites, des soirées vins et piano, des afterworks…
Cave de Tain. 22, route de Larnage, 26600 Tain-l’Hermitage

Les sortilèges de Cornas

Surplombant le village de Cornas, « terre brûlée » en celte, les coteaux très pentus font surgir un paysage saisissant. Difficilement accessibles, certaines parcelles recèlent de très vieilles vignes de syrah, dont celles des Ruchets, préphylloxériques. Pour les approcher, rien de mieux qu’un quatre-quatre piloté par l’un des coéquipiers de Jean-Luc Colombo, sorcier du Rhône et de l’appellation en particulier. Pour prolonger le séjour, Laure Colombo, vigneronne et œnologue aussi passionnée que son père, propose un gîte dans son domaine de Lorient, sur les hauteurs de Saint-Péray.
Domaine Jean-Luc Colombo. 10-12, rue des Violettes, 07130 Cornas

Conquête héroïque

Depuis 1996, Christine Vernay a posé son empreinte sur le domaine qui fit le renouveau de condrieu. Deux cuvées entre toutes, Maison Rouge et Blonde du Seigneur, traduisent sa vision des vins portés vers « toujours plus de clarté et de vibration. » Mais son inspiration, elle la puise aussi dans l’esprit familial, celui du grand-père Francis qui lança sa cuvée Coteau de Vernon en 1952 ou celui de son père Georges, dont le fameux Les Chaillées de l’Enfer traduit le dur labeur sur ces fortes pentes où tout se fait à la main. On parle ici de « viticulture héroïque ».
Domaine Georges Vernay. 1, rue Nationale, 69420 Condrieu

Veni vidi Vineum

La petite chapelle Saint-Christophe qui coiffe la colline de l’Hermitage appartient depuis 1919 au domaine Jaboulet. Ce lieu légendaire, où le chevalier de Sterimberg installé en ermite aurait planté la première vigne du cru, a donné son nom à l’un des plus grands vins du monde. Rien ne raconte mieux cette histoire qu’un verre de vin servi au bar ou au restaurant, autour d’une série d’accords divins.
Vineum Paul Jaboulet Aîné. 25, place du Taurobole, 26600 Tain-l’Hermitage

Verticale du Rhône

Vienne marque la porte d’entrée vinicole de la vallée du Rhône, et le pavillon du tourisme, l’indispensable seuil pour s’initier ou réviser ses bases. Comme un écho à la verticalité des vignes, un impressionnant mur de 900 flacons rassemble ici l’ensemble des appellations du vignoble septentrional. Pour un petit échauffement des papilles, grands et petits crus se goûtent aussi en libre-service. Indispensable avant toute escapade intense.
Pavillon du Tourisme. Cours Brillier, 38200 Vienne

Séjour sous bonne garde

À la croisée des vignobles de Crozes-Hermitage, de l’Hermitage et de Saint-Joseph, une ferme viticole du XVe siècle en galets du Rhône – ceux que l’on trouve dans les vignes – loge l’amateur dans un tonneau. Une véritable bulle boisée tout confort avec pour seuls voisins les poules et les oiseaux. Le matin, des confitures maison accompagnent le pain cuit au four à bois. De quoi couler un agréable séjour et peut être se bonifier ?
La Ferme des Denis, 26600 Chanos-Curson

Cépages blancs et or noir

Depuis ses précieuses sélections parcellaires, provenant de vignobles cultivés en biodynamie, jusqu’aux alliances vins et truffes, co-signées avec Karine et Franck Boissieux, trufficulteurs dans la Drôme des collines, la maison Ferraton a plus d’un trésor à faire découvrir. Lors de soirées thématiques, la rabasse parfume le restaurant du domaine, flirtant avec un saint-joseph blanc La Source ou un hermitage Les Miaux, 100 % marsanne.
Ferraton Père & Fils. 7, quai Arthur Rostaing, 26600 Tain-l’Hermitage

Grand du Nord

Le domaine a bien grandi depuis 1920 et sa création par Claude Cuilleron, le grand-père d’Yves. Des quelques trois hectares initiaux, il dépasse aujourd’hui les quatre-vingt-dix et couvre toutes les appellations septentrionales. Ce qui en fait le plus important producteur du vignoble. Des dimensions qui n’empêchent pas le sur-mesure, de la récolte manuelle à la vinification parcellaire jusqu’à l’élevage en barriques bourguignonnes provenant d’une sélection de six tonneliers. Dégustation sur rendez-vous.
Domaine Yves Cuilleron. Verlieu, 42410 Chavanay

Au sommet de Cornas et Saint-Péray

À hauteur de Valence, cornas est la dernière appellation rouge septentrionale, suivie de la blanche saint-péray. Leur incontournable ambassadeur, Alain Voge a développé des randonnées guidées par un historien ou un géologue à travers son vignoble de treize hectares débuté en 1905 par son grand-père, cultivé depuis 2006 en bio et biodynamie. Ses plus vieilles vignes, sur les hauts coteaux de Saint-Péray, font face au château de Crussol bâti, dit la légende, par un géant qui traversait le Rhône en une enjambée.
Domaine Alain Voge. 4, impasse de l’Équerre, 07130 Cornas

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