Vignerons et Terroirs d’Avenir, dans les coulisses du concours

Le métier de journaliste, accaparé par les dégustations et les déplacements dans le vignoble, laisse peu de temps pour les innombrables concours qui médaillent à peu près tout ce qui pousse dans le vignoble français. Cette année, toutefois, j’ai répondu favorablement à l’invitation d’AdVini et d’Agro Montpellier, qui organisaient la 6e édition du Concours Vignerons et Terroirs d’Avenir (CVTA). La grande finale avait lieu mi-mars, au Mas Neuf, dans le Languedoc.

Ce concours est né d’un constat alarmant : l’avenir de la filière vin en France est incertain. C’est aussi ce que pense Antoine Leccia, président d’AdVini, à l’initiative du projet : « Il y a sept à huit ans de cela, lors d’un échange avec un président de cave coopérative dans le Languedoc, celui-ci se désespérait de voir de jeunes vignerons, installés, qui jetaient l’éponge alors qu’ils avaient à leur disposition des terroirs formidables. Mais faute d’appuis financiers, de la famille ou de tiers, c’est parfois difficile pour ces jeunes de reprendre l’exploitation familiale, voire tout simplement de s’installer. L’idée m’est venue de lancer une initiative qui redonne à la filière ce qu’elle nous a apporté, en tant qu’opérateur majeur de la filière. » En trame de fond s’ajoute un enjeu crucial pour le monde viticole, à savoir la pérennité du métier quand on connaît la pyramide des âges, et que dans certains secteurs près de la moitié des viticulteurs prendront leur retraite d’ici une dizaine d’années.
Pour les lauréats du concours, celui-ci représente un apport financier indéniable, mais aussi un soutien, une écoute, des échanges humains avec des professionnels reconnus, bref, un coup de pouce bienvenu lorsqu’on n’en est qu’aux premiers pas. Aujourd’hui, le concours vient de boucler sa sixième saison. Bonne nouvelle pour la pérennité des éditions suivantes, le Crédit Agricole vient d’annoncer qu’il en serait désormais partenaire.

Le profil des lauréats
Devant le jury, vingt minutes de présentation, dix minutes d’échanges et de questions. Premier candidat : Konrad Pixner du domaine de l’Accent en Terrasses-du-Larzac. Un vigneron attachant, né dans le Tyrol italien d’om il tient son surprenant accent autrichien, pointu dans ses connaissances techniques, serein dans son projet d’entreprise, devant vinifier hélas dans des conditions très précaires. Ce que nous détecté malheureusement dans son vin, pas exempt de reproches. Justement, notre jury estime que le concours doit lui permettre de bâtir un chai à la hauteur de ses ambitions. Second Prix du Concours et dotation de 20.000 euros.
Le second candidat s’appelle David Michellis du domaine Reniteo en Côte-Roannaise. Rares sont les candidats à faire aussi bonne impression. À l’aise avec le micro, précis dans ses explications, tout semble évident quand il parle du sujet qui le passionne : le renouveau du vignoble des côtes roannaises et de ce vieux cépage oublié, le saint-pierre doré, qu’il veut replanter. Clair, cohérent, limpide. Délibérations du jury. À l’unanimité, nous lui accordons le premier prix du Concours, dotation de 50.000 euros.
Dernière candidate à passer. Justine Wittner du domaine de la Rouge Jouvence dans les côtes-du-rhône. Grand projet de polyculture (vigne, maraîchage, lavande, poules) et diversification de sources de revenus. Prix spécial du Concours, dotation de 10.000 euros.

Quels sont les critères retenus par les membres du jury ?
La délibération du jury est un moment-clef dans la journée de la grande finale, éprouvant pour les candidats. En conclave, les jurés notent chaque candidat selon une liste de critères préétablis : sa personnalité (charisme, conviction), ses produits (son terroir, la qualité des vins présentés), son projet commercial (structuration de sa gamme, échelle des prix, habillages), sa viabilité financière, mais aussi son rapport au concours (en quoi le concours l’aide, comment aide-t-il le concours). Tout cet ensemble de paramètres doit s’inscrire dans une démarche durable, aussi bien du point de vue écologique qu’économique. À ce stade de la compétition, il n’y a plus de mauvais projets, on se permet donc de retenir les plus complets, les mieux aboutis. Chaque année, le nombre de dossiers augmente : une trentaine pour la première édition, 70 cette année. Et sans doute plus l’an prochain.

Les lauréats de la 6e édition
David Michelis – Domaine Reniteo, côte-roannaise
Konrad Pixner – Domaine de l’Accent, terrasses-du-larzac
Justine Wittner – domaine de la Rouge Jouvence (Drome Provençale)

Photo : E. Perrin

Print Friendly, PDF & Email

À lire aussi