Diamants bruts, astres roses, la suite

Avec ces chefs magnifiques, la grande gastronomie s’ouvre le chemin d’une grand exploration, celui des rosés de terroir. Il est sûr. Tant mieux, les accords sont une jungle


Cet article est à retrouver en intégralité dans le numéro 32 de En Magnum, actuellement en kiosque


Bruxelles (Belgique)
Menssa
Moins d’un an après avoir fermé son restaurant doublement étoilé, Bon-Bon, et après avoir pris le poste de chef exécutif de La Mère Germaine à Châteauneuf-du-Pape, Christophe Hardiquest ouvre Menssa à Bruxelles, avec un concept nouveau. La salle met en scène un comptoir qui serpente, comme un chemin de traverse ouvert sur la cuisine, au service d’une balade gustative, entre jardin, forêt, terre et mer. La carte des vins, internationale et sans complexe, sublime le voyage

Se souvenir
« Le vin, c’est ma deuxième passion », commente le chef après le service, dans le jardin jouxtant le restaurant où poussent quelques aromates. « Je déguste comme un passionné. J’aime ou je n’aime pas. Je ne bois que du vin ou du champagne. Je réfléchis toujours aux accords. C’est une passion liée à la mémoire sensorielle. Il y a des moments et des vins que je n’oublierai jamais comme un grange-des-pères blanc 2003 ou 2005 – je ne sais plus – au Fat Duck à Londres avec un de mes meilleurs amis, il y a une dizaine d’années. Exceptionnel. Ou avec mon ex-femme un côte-rôtie de chez Jamet au Georges V, il y a vingt ans. Un nez de cuir, de fumé, une syrah de dingue. J’étais à la renverse. Il y a des moments magiques. Pour moi, c’est important d’avoir une carte des vins éclectique. On est en Belgique. Je laisse carte blanche à mes sommeliers, mais j’ai mes goûts et il y a des références que je veux avoir à la carte ; des vins ou des vignerons que j’aime, comme le chenin de Bertrand Jousset, sa cuvée Premier rendez-vous, Gramenon, Madame Laurent, Jamet, Gangloff pour les côte-rôtie, Chave en Hermitage. Des grand noms du vin, c’est comme les grands restaurants. J’ai aussi mes coups de cœurs comme le domaine de la Dourbie en languedoc rouge, un pur carignan sur le fruit. J’aime les vieux millésimes où le bois est fondu, s’il y en a, des vins de garde que je ne bois pas en-dessous de dix ans. J’aime aussi les vins sur le fruit où je sens le terroir et l’encépagement. J’adore les mono-cépages. C’est pour ça que j’adore les vins d’Odile Couvert au domaine de l’Odylée. Un mono-cépage donne un caractère particulier. Le cuisinier n’a pas une vision comme un professionnel, il a besoin de comprendre ce que goûte un carignan, une syrah, un grenache en rouge, un vermentino, un chenin en blanc. J’apprends beaucoup. »

Christophe Hardiquest.

La dégustation
« Je trouve que l’on boit les vins trop jeunes donc je garde des bordeaux, des vins du Rhône, de la Loire. Je pense que ce serait intéressant de le faire sur les rosés qui ont du corps, pour avoir ce développement d’arômes que l’on n’a pas avec les millésimes jeunes ». La dégustation des rosés de terroirs montre qu’un un premier pallier aromatique est franchi à partir de trois ans en bouteille puis un autre à partir de cinq ans. Sur le ceviche de moules de Zélande et mayonnaise de coriandre avec sorbet de « leche de trigre », le chef a voulu associer deux vins du domaine de la Suffrène : le bandol 2022 et la cuvée Sainte-Catherine 2017. Si le premier s’efface devant la puissance du plat, le second lui parle d’égal à égal. « Un vin avec de la charpente, de la tenue et de la longueur. En Bandol, on connaît les blancs et les rouges, mais en rosé, c’était la première fois que j’en goûte » conclut Christophe Hardiquest.

Menssa
Avenue de Tervueren 453
1150 Bruxelles, Belgique

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