Rémy Martin montre la voie

La maison au centaure a fait de son engagement pour la planète une raison d’être de ses cognacs. Une chance pour le monde, un modèle pour la région


Cet article est paru dans le supplément Grand Art spécial vins et spiritueux du Journal du Dimanche en juin 2023 réalisé par Bettane+Desseauve.


Engagée dans des démarches environnementales certifiées depuis le début des années 2010, la maison Rémy Martin a décidé d’accélérer le mouvement en suivant la voie de l’agroécologie. Ces dernières années, la notion est apparue dans les vignobles français. Ses principes peuvent sembler complexes. Difficile de la résumer, comme certains peuvent le faire, à quelques arbres plantés dans les vignes. Sur son site, le ministère de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire la définit comme « une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes ». La pratique « vise à diminuer les pressions sur l’environnement et à préserver les ressources naturelles » en utilisant « au maximum la nature comme facteur de production » et « en maintenant ses capacités de renouvellement », grâce à un « ensemble de techniques qui considèrent l’exploitation agricole dans son ensemble. » Réintroduire de la diversité paysagère et favoriser le maintien durable d’une biodiversité forte étaient les premières mesures à prendre. « Pour Rémy Martin, l’approche est simple : par agroécologie, on entend des pratiques agricoles à impact positif sur les sols et la biodiversité, associées à une obligation de résultat, que l’on mesure. » Cela passait aussi par le fait d’inventorier la faune en comptabilisant, par exemple, les espèces d’oiseaux présentes dans ses vignobles et ceux de ses viticulteurs partenaires. En plus de planter des haies paysagères, de créer des zones enherbées et des espaces naturels, la maison souhaitait aussi protéger l’existant, en partenariat avec l’Office national des forêts, en rappelant au public la nécessité de préserver la diversité actuelle des paysages, ses bosquets ou encore ses arbres isolés.

Jean-Philippe Hecquet, directeur général.

Avec pour ambition de déployer ces pratiques sur les 270 hectares de ses domaines et sur 100 % des surfaces de ses partenaires, la maison mène aussi une réflexion durable quant au matériel végétal. Sensible aux maladies cryptogamiques, les cépages du vignoble cognaçais sont l’objet de toutes les attentions. Depuis juin 2022, la maison a lancé un vaste programme d’étude autour des variétés de vignes résistantes et leurs qualités d’adaptation face au changement climatique. Elle teste aussi les aptitudes gustatives du monbadon, un cépage ancien qu’elle aimerait réhabiliter. La démarche est simple : réduire l’utilisation de produits phytosanitaires tout en s’assurant de produire un raisin de qualité dans des volumes réguliers d’une année sur l’autre. Là-aussi, l’empirisme de la viticulture de terrain est complété par le recours à des technologies innovantes en matière de recherche et de développement. Outils d’aide à la décision pour évaluer le niveau de pression des maladies, utilisation d’une cartographie intraparcellaire élaborée avec l’aide du Centre national d’études spatiales pour mesurer la vigueur des pieds de vignes, etc.

Pas question pour Rémy Martin d’improviser et de faire cette course à la précision en oubliant de la jouer collectif. D’ici 2030, son objectif est d’engager les viticulteurs de la coopérative de l’Alliance Fine Champagne, son partenaire historique et essentiel, vers une viticulture vertueuse et régénératrice. Pionnière et en recherche constante d’amélioration de ses pratiques, la maison ne perd pas de vue qu’on jugera aussi du bien-fondé de ces démarches en fonction de la qualité de ses cognacs. Sur ce point, le créateur de Louis XIII a pris les devants en expliquant leur nécessité au public avec un discours de célébration à rebours des messages de sensibilisation anxiogène. Pour un cognac de qualité, le temps est un prérequis indispensable. Pour la maison tricentenaire, le combat durera plusieurs siècles. L’agroécologie mise en place n’est qu’un chapitre dans une histoire qui continue de s’écrire. Elle donnera aux idées neuves de la maison au centaure un terreau fertile et une situation saine pour continuer à briller.

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