Estoublon, la lumière dans les veines

Estoublon a longtemps regardé d’un œil attentif la Provence faire la fête. Quatre nouveaux propriétaires plus tard, la voilà décidée à entrer dans la danse avec Roseblood par julia molkhou


Cet article est paru dans En Magnum #32. Vous pouvez l’acheter sur notre site ici, ou sur cafeyn.co.


Il faut quitter la route et s’engouffrer sur une allée bordée de pins parasols, rouler au pas comme demandé. Un croisement. À droite, le restaurant La Table d’Estoublon, ouvert six jours par semaine, propose une agréable cuisine méditerranéenne. À gauche, le château. Construit au XVIIIe par la famille de Grille sur les fondations d’un vieux mas provençal, il prend le nom d’Estoublon en souvenir d’un petit village de Haute-Provence où la famille avait des propriétés.
On peut s’offrir ici une vie de château pour un week-end ou quelques jours de vacances. Dix chambres magnifiques, toutes décorées avec luxe, ayant chacune une signature olfactive propre. Plusieurs salons et salles à manger enrichis régulièrement de nouvelles pièces, des centaines d’hectares de jardin, le potager, la piscine et le court de tennis vert gazon. Accès complet à la cave. Et disponibilité aux petits soins de tous ceux sans qui l’expérience ne peut se faire, cuisinier, maîtres d’hôtel, gouvernantes. Le grand art de vivre à la française. Le château d’Estoublon est réputé pour ses huiles d’olive. L’historique oliveraie de 120 hectares permet de travailler une grande variété d’olives. Ardente, poivrée, élégante ou encore équilibrée, le choix d’une huile se fait entre les cinq variétés endémiques et une sixième, venue de Grèce, née de l’assemblage de ces différentes variétés. Elles sont vendues dans plus de trente pays et leurs bouteilles, récemment revues, rappellent les plus beaux flacons des grands parfumeurs. Enfin, Estoublon est depuis toujours un vignoble. Ses vingt hectares depuis longtemps menés en bio produisent des vins blancs, rouges et rosés, une aventure qui a pris une nouvelle direction sous l’impulsion des propriétaires des lieux depuis 2020, Stéphane Courbit, Jean-Guillaume Prats et le couple Bruni-Sarkozy.

À la française
L’idée était de créer un rosé délicat et élégant, avec « des touches féminines que les hommes adorent », confie Carla Bruni-Sarkozy, très investie dans le projet. Le résultat est un assemblage de grenache, cinsault et tibouren auquel tient beaucoup l’équipe d’Estoublon, très au fait de la montée des vins rosé à l’export, notamment aux états-Unis et en Angleterre. Pour faire de Roseblood un challenger des grandes marques de rosé dans le monde, elle a d’ailleurs mis les moyens, humains et marketing. Ce rosé à l’étiquette rose pâle, dont l’illustration évoque le serpent du jardin d’éden, s’est rapidement retrouvé à la carte des établissements select et branchés du groupe Paris Society. Et bien sûr de ceux, tout aussi chics, du groupe Airelles, propriété de Stéphane Courbit. Une façon pour Roseblood d’être consommé à la fois de façon festive, de Saint-Tropez à Val d’Isère, mais aussi d’être bu à table à Versailles. Nouveauté cette année, le blanc Roseblood est un assemblage de rolle et de grenache blanc. Frais, léger, sur les notes d’agrumes, le millésime 2022 est un vin que l’on boira facilement de Courchevel à Gordes.
Tout est aujourd’hui réuni pour faire de Roseblood une marque internationale puissante, alliant un côté lifestyle assumé – entre modernité et tradition française – et un savoir-faire viticole qui compte bien s’affirmer et progresser encore, notamment sous l’impulsion de l’expérimenté Jean-Guillaume Prats. Premier changement, les rouges de la propriété sont désormais issus de vendanges manuelles. Depuis son arrière-pays provençal, la propriété est bien ancrée sur le chemin de la qualité et la voie exigeante de l’authenticité et du luxe durable à la française, laissant finalement assez loin d’elle celui plus éphémère des strass et des paillettes de la Riviera. C’est là tout le défi de cette nouvelle Provence.

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