L’Académie internationale du vin appelle l’ONU à « ne pas oublier la dimension culturelle, sociale et humaine du vin »

Le 25 septembre, 150 chefs d’État et de gouvernement seront réunis en Assemblée générale dans le cadre du 80ᵉ anniversaire de l’Organisation des Nations unies. À cette occasion, l’Académie internationale du vin, qui regroupe l’ensemble des acteurs du secteur, vient de publier un appel visant à protéger l’image du vin

« Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement,
Comment prévenir et maîtriser les maladies non transmissibles sans pour autant renier le fondement de nos cultures, sans effacer ce qui fait vivre nos civilisations ? Voilà l’équilibre que vous devrez trouver le 25 septembre prochain, lors de la 4ᵉ réunion de haut niveau des Nations Unies sur la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles et la promotion de la santé mentale et du bien-être.
Le vin est au cœur de cette interrogation. Trop souvent, on le réduit à une molécule d’alcool. Trop sommairement, on l’accuse d’être une drogue. Mais trop rarement, on pense à ce qu’il incarne. Issus de vingt pays différents, les membres de l’Académie Internationale du Vin souhaitent vous mettre en garde contre le danger de réduire le vin à un risque sanitaire, et d’oublier ainsi sa dimension culturelle, sociale et humaine. Voici ce qui est en jeu.

DENORMALISER LE VIN, C’EST ANNIHILER UN HERITAGE, PATRIMOINE DE L’HUMANITE
Le vin incarne huit millénaires d’histoire humaine, un ferment de convivialité, de joie et de partage, une connexion à la terre et aux paysages naturels et ruraux, un langage universel qui relie les peuples : la Géorgie à la Grèce antique, l’Oregon à la Toscane, la France à la Nouvelle-Zélande… A la fois singulier et mondial, partout il exprime la même chose : la patience de l’homme face au temps, son humilité face à la terre, son désir de célébrer ensemble. Offrir un verre de vin, c’est inviter l’autre à sa table, manifester par le geste la paix, l’amitié, la fraternité, le bonheur d’être ensemble.
Consommer modérément du vin, c’est défendre la culture du goût, de la mesure, et perpétuer ce lien qui unit les continents, les peuples et les générations. C’est apprécier plutôt qu’abuser. C’est déguster plutôt que boire. C’est aussi appréhender la santé par le prisme des relations sociales et familiales, du bien-être mental et du bonheur, car le lien entre joie de vivre et santé est indéniable.
DENORMALISER LE VIN, C’EST NIER SES BIENFAITS ET CLORE LE DEBAT SCIENTIFIQUE PREMATUREMENT
Un récent rapport NASEM (Académies Nationales des Sciences, d’Ingénierie et de Médecine des États-Unis) conclut que « par rapport à une consommation nulle d’alcool, une consommation modérée est associée à une mortalité plus faible, toutes causes confondues ». Nous ne prenons pas position scientifiquement, mais, comme de nombreux experts, nous regrettons l’absence d’un véritable essai randomisé à grande échelle qui, seul, permettrait de fonder un jugement sur des chiffres certifiés et non sur de simples données observationnelles, insuffisantes face à l’exigence de rigueur scientifique.

DENORMALISER LE VIN, C’EST CHOISIR LA PROHIBITION CONTRE L’EDUCATION ET LA LIBERTE
Nous ne méconnaissons pas les dangers de l’excès. Nous savons la nécessité de prévenir l’addiction, de protéger les plus vulnérables, de combattre les dérives. Nous faisons nôtre cette responsabilité de prévention et d’éducation, sans ambiguïté, car c’est par l’instruction que le consommateur apprend à déguster, à comparer et à apprécier le vin avec modération et qu’il devient lui-même ambassadeur de la modération.
Par la pédagogie, on peut à la fois préserver la liberté individuelle de consommer du vin sans abus et prôner responsabilité et contrôle. Le vin exprime ainsi sa vérité, dans la transmission des savoirs et des gestes, et dans l’apprentissage de la mesure.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement, nous vous appelons à prendre vos décisions dans une approche équilibrée et nuancée : lutter contre les excès, mais reconnaître la valeur de la modération ; prévenir les risques, mais préserver un lien fort de l’homme à la terre ; protéger la santé publique, mais respecter la richesse des cultures et la force des traditions. Car préserver le vin, c’est défendre une civilisation, un art de vivre, un patrimoine universel vivant, une part d’humanité que les générations se transmettent depuis des millénaires. »

Pour l’Académie Internationale du Vin
Guillaume d’Angerville, Président & Véronique Sanders, Chancelier

 

Les signataires de l’appel :
Juan José Abó de Juan – Abadia Retuerta (Espagne), Guillaume d’Angerville – Domaine Marquis d’Angerville (France), Angel Anocibar – Abadia Retuerta (Espagne), Jane Anson – Écrivain (Royaume-Uni), Juancho Asenjo – Écrivain (Espagne), Hans Astrom – Klein Constantia Estate (Suède), Franky Baert – Collectionneur (Belgique), Jesus Barquin – Equipos Navazos (Espagne), Alexander van Beek – Château Giscours (Pays-Bas), Joshua Bergström – Bergstrom Wines (États-Unis), Michel Bettane – Journaliste (France), Etienne Bizot – Bollinger (France), Hubert Boidron – Maison Boidron (France), Wojciech Bonkowski – Critique (Pologne), Bruno Eugène Borie – Château Ducru Beaucaillou (France), Claude Bourguignon – LAMS (France), Philippe Bourguignon – Écrivain (France), Willi Bründlmayer – Weingut Brundlmayer (Autriche), Christopher Cannan – Clos Figueras (États-Unis), Robert Gyula Cey-Bert – Écrivain (Hongrie), Jean-André Charial – Oustau de Baumanière (France), Gérard Chave – Domaine Jean-Louis Chave (France), Jean Louis Chave – Domaine Jean-Louis Chave (France), Jean-Pierre Chevallier –Château de Villeneuve (France), Donatella Cinelli Colombini – Fattoria del Colle (Italie), Corinne Clavien Desfayes
– Œnologue (Suisse), Raoul Cruchon – Domaine Henri Cruchon (Suisse), Frans de Cock – Collectionneur (Belgique), Jean-Philippe Delmas – Château Haut Brion (France), Paul Draper – Ridge Vineyards (États-Unis), Thomas Duroux – Château Palmer (France), Kurt Feiler – Weingut Feiler-Artinger (Autriche), Mariano Fernandez Ammunategui – Producteur (Chili), Pierre-Henry Gagey – Louis Jadot (France), Angelo Gaja – Vino Gaja (Italie), Alberto Graci – Graci (Italie), Claude Geoffray – Château Thivin (France), Theodore Georgopoulos – Professeur (Grèce), Salvatore Geraci – Azienda Agricola Palari (Italie), Evangelos Gerovassiliou – Ktima Gerovassiliou (Grèce), Anthony Hanson – Conférencier (Royaume-Uni), Gaston Hochar – Château Musar (Liban), Emilienne Hutin –Domaine Les Hutins (Suisse), Joyce Kékkö-Van Rennes – Winjkasteel Genoels-Elderen (Belgique), Andreas Keller – Rédacteur (Suisse), Anthony Lacey – Mistral Wine (Royaume-Uni), Dominique Lafon – Domaine des Comtes Lafon (France), Alois Clemens Lageder – Vignobles Alois Lageder (Italie), Jean Baptiste Lecaillon – Louis Roederer (France), Jeannie Cho Lee MW – Journaliste (Corée), Pierre-Marie Lledo – Neurobiologiste (France), Maria José Lopez de Heredia – Bodega Lopez de Heredia (Espagne), Juan Carlos Lopez de Lacalle – Bodega Artadi (Espagne), Reinhard Löwenstein – Domaine Heymann-Lowenstein (Allemagne), Jorge Lucki – Journaliste (Brésil), Philippe de Lur Saluces – Château de Fargues (France), Elie Maamari – Château Ksara (Liban), Axel Marchal – Professeur à l’Université de Bordeaux (France), Franco Martinetti – F. Martinetti Viniculture (Italie), Ton Mata – Recaredo (Espagne), Laszlo Meszaros – Domaine de Disznoko (Hongrie), Etienne de Montille – Domaine de Montille (France), Eva Moosbrugger – Domaine Schloss Gobelsburg (Autriche), Jasper Morris MW – Écrivain (Royaume-Uni), Fiona Morrison MW – Journaliste (Royaume-Uni), Roberto de la Mota – Revancha & Mendel Wines (Argentine), Dorli Muhr – Weingut Dorli Muhr (Autriche), John Olney – Ridge Vineyards (États-Unis), Raymond Paccot – Domaine La Colombe (Suisse), Alvaro Palacios – Alvaro Palacios (Espagne), Filipa Pato – Filipa Pato & William Wouters (Portugal), Jean-Pierre Perrin – Château de Beaucastel (France), Dominique Piron – Domaine du Vieux Bourg (France), Bruno Prats – Ingénieur agronome (France), Pietro Ratti – Cantina Renato Ratti (Italie), Josep Roca i Fontané – Celler de Can Roca (Espagne), Pierre-André Roduit – Domaine du Grand-Brûlé (Suisse), Raoul Salama – Château de Balleure (France), John Salvi – Écrivain (Royaume-Uni), Véronique Sanders – Château Haut Bailly (France), Erik Sauter – Écrivain (Pays-Bas), Carl von Schubert – Weingut Maximin Grunhaus (Allemagne), Michael Schuster – Consultant en vin (Royaume-Uni), Marc-André Selosse – Professeur (France), Jacques Seysses – Domaine Dujac (France), Michael Silacci – Opus One (États-Unis), Peter Sisseck – Dominio de Pingus (Danemark), Diana Snowden Seysses – Domaine Dujac & Snowden Vineyards (États-Unis), Felipe de Solminihac – Vina Terra Noble (Chili), Oliver Spanier – Battenfeld Spanier (Allemagne), Serena Sutcliffe MW –Sotheby’s (Royaume-Uni), Pierre Tari – Collectionneur (Suisse), Ivo Varbanov – Ivo Varbanov Wines (Bulgarie), Christine Vernay – Domaine Georges Vernay (France), Quim Vila Betriu – Vila Viniteca (Espagne), José Vouillamoz
– Généticien (Suisse), Yannis Voyatzis – Boutari Wineries (Grèce), Maurizio Zanella – Ca’ del Bosco (Italie).


Académie Internationale du Vin
Fondée en 1971, l’Académie Internationale du Vin est un lieu de réflexion collégial et responsable, regroupant une centaine de membres issus d’une vingtaine de nationalités différentes. Par ses travaux, l’Académie Internationale du Vin souhaite contribuer à l’amélioration des méthodes de viticulture et de production de vin, dans une approche respectueuse de la nature, vers des standards de qualité toujours plus élevés.
L’Académie Internationale du Vin mène ses réflexions et dirige ses débats dans la plus stricte indépendance vis-à-vis des institutions gouvernementales, des autorités de régulation et des influences privées. Elle rassemble essentiellement des producteurs, des scientifiques, des sommeliers et des journalistes. Ses membres sont admis par cooptation et partagent une éthique commune de la production de vin de lieu, spécifique à son terroir et produit dans le respect des usages locaux, dans un objectif de qualité et de pérennité, fruit d’une histoire longue et de traditions anciennes.
Le changement climatique, la biodiversité, la viticulture régénérative, le captage du carbone, l’évolution des méthodes et dosages des traitements phytosanitaires, les habitudes de consommation, l’enrichissement et la préservation des sols sont quelques-uns des sujets régulièrement discutés au sein de l’Académie Internationale du Vin.

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