EPC, la liberté comme feuille de route

Née de l’imagination fertile de trois trentenaires au fort désir d’entreprendre, EPC est devenue, depuis sa création en 2019, l’une des maisons de Champagne les plus passionnantes à suivre. Ce n’est qu’un début

Pas de blason doré, ni de nom de château. Encore moins de tradition centenaire à exhiber sur l’étiquette. Juste un projet à raconter, celui de trois trentenaires épicuriens qui, en 2019, ont décidé de prendre à rebours l’univers parfois un peu figé du champagne. Avec une idée et trois lettres, EPC. Six ans plus tard, l’ovni champenois continue à donner du sens à sa raison d’être avec le succès qu’on lui connaît aujourd’hui. Une présence commerciale dans 55 pays, un projet parallèle en Provence avec Aurose et, plus récemment, l’acquisition de la maison familiale Charles Mignon. L’histoire a pourtant commencé modestement avec Édouard Roy, actuel co-fondateur d’EPC, et son père Alain. Père et fils s’associent pour créer une cuvée de champagne qui prend le nom d’Alain-Édouard, union de leurs deux prénoms. « J’avais envie de monter quelque chose de plus grand. Devenir entrepreneur me démangeait », raconte Édouard. L’idée germe. Pourquoi ne pas créer une marque libre, moderne, transparente sur son statut de négociant et sur sa traçabilité ? Il en parle autour de lui, cherche des relais, rédige un message sur Linkedin qui le conduit à un échange avec Jérôme Queige, ex-directeur commercial des champagnes Jacquart, qui habite à cent mètres de chez lui. Les planètes s’alignent. Il ne manque au duo que des compétences innovantes en marketing et construction de marque. Voilà l’expertise de Camille Gilardi, ancienne de Procter. Le trio nouvellement formé s’entend sur un principe : « construire une méthode à impact ». Partir d’une page blanche permet d’imaginer l’histoire.

Recréer du lien social
EPC signifie EPiCurien. C’est écrit et assumé. La maison n’a pas d’ancrage dynastique, mais des partenariats pour créer chaque cuvée avec un vigneron dont les vins sont sélectionnés par le chef de cave Richard Dailly, qui les assemble sans trahir l’identité des lieux. La gamme se déploie en mettant en avant de manière lisible des mono-terroirs, avec des vins peu sulfités dont les origines sont mentionnées sur la contre-étiquette. EPC n’achète pas des raisins sur catalogue. La maison construit des relations de long terme avec les vignerons, à qui elle garantit un prix juste et une mise en valeur transparente. Sur ce dernier point, Édouard Roy précise : « Il y a une responsabilité nouvelle à porter. Celle d’un consommateur qui veut comprendre ce qu’il boit, sans culpabiliser ». Pour lui, c’est le seul moyen de lutter contre le désintérêt des nouvelles générations pour le vin. Et cette ambition est perceptible partout : une marque non patronymique, une étiquette asymétrique, une pastille thermosensible qui permet de savoir quand le champagne est à température de dégustation, des phrases cachées sur la coiffe et le bouchon pour créer la surprise, etc. « Le champagne n’est pas un objet de statut. C’est un vin de lien social. Un moment que l’on partage, pas un prix ou une marque que l’on affiche. » Loin du luxe tapageur et du marketing vu et revu, EPC milite pour une narration réinventée, capable de raconter le plaisir conscient, le beau moment entre amis. « On a tous besoin de recréer du lien social autour du vin. Cela commence par des détails comme une contre-étiquette qui parle vrai, une pastille qui rassure, une bouteille que l’on choisit pour l’histoire que l’on va raconter en la dégustant. »

Charles Mignon, tremplin pour l’avenir
En juin 2025, dans une perspective de développement désormais affirmée, la maison EPC annonçait le rachat des champagnes Charles Mignon à Épernay. « Cela faisait des mois que l’on cherchait une maison qui nous ressemble. Celle-ci avait tout, un outil de production ultraperformant et récent, un ancrage local et surtout une âme. » Cette acquisition doit permettre à EPC de doubler ses volumes de production, d’ouvrir un nouveau front à l’export et d’optimiser la production de son brut multimillésime. Pas question néanmoins d’absorber une maison pour la dissoudre. Guillaume et Manon Mignon, les enfants des fondateurs, restent à la tête de leur marque, gérée de façon indépendante. Et EPC garde son cap. « On est une maison libre, c’est notre ADN. On ne va pas la diluer pour produire plus », explique Édouard Roy. Cette année, pour la première fois, les volumes vendus à l’export dépasseront ceux du marché français. États-Unis, pays du Golfe, Afrique du Sud, Inde, la marque ouvre déjà des routes autrefois réputées fermées. « Il y a une vraie appétence pour un champagne lisible, incarné et sincère. Les acheteurs et les hôteliers se passent le mot et le succès appelle le succès. » Et après ? L’équipe d’EPC a aussi des ambitions pour Aurose, son projet de vins tranquilles produits en Provence, sur le terroir de Brignoles. Deux couleurs, trois cuvées (un blanc, deux rosés), même philosophie et même exigence. Pas de pétillants désalcoolisés ni de “bulles bien-être” au programme. « On croit au bon vin, pas au vin qui s’excuse d’être ce qu’il est », revendique Édouard Roy. Libre par son modèle, moderne par sa communication, exigeante par ses vins, EPC ne cherche pas à devenir la nouvelle grande maison de Champagne. Juste à faire les choses autrement, à son rythme, avec cohérence, afin de redonner aux curieux, aux épicuriens et aux amateurs l’envie de boire un verre de champagne sans avoir à se justifier. Un luxe rare et très persuasif.

La dégustation

EPC, brut
Assemblage : 65 % meunier, 20 % pinot noir, 15 % chardonnay. Base 2020 et vins de réserve (40 %).
Origines : Montagne de Reims. Terroir de Sermiers (premier cru).
Porté par une fine minéralité, c’est un champagne essentiellement construit autour du meunier. La bouche est élégante, apéritive, légèrement citronnée, onctueuse.On le voit volontiers à l’apéritif ou pour accompagner toute une soirée.
92/100. 42,90 euros

EPC, blanc de noirs
Assemblage : 100 % pinot noir. Base 2021 et vins de réserve (35 %).
Origines : Terroir de la côte des Bar.
Les marnes qui caractérisent ce terroir signent l’expression aromatique de ce blanc de noirs où 35 % de vins de réserve sont venus compléter ceux de 2021. Puissant, sur les notes de fruits rouges, doté d’une profondeur adaptée à la gastronomie (viandes blanches).
92/100. 47,90 euros

EPC, blanc de blancs

Assemblage : 100 % chardonnay. Base 2021 et vins de réserve (15 %).
Origines : Coteaux du Sézannais.
Évidemment, il n’aura pas le même usage que le blanc de noirs, mais sa vivacité en fait un vin apéritif qui pourra aussi accompagner des plats à table, notamment une cuisine de poissons. La finale florale (notes de fleurs blanches) s’achève de manière énergique.
92/100. 52,90 euros

EPC, blanc de blancs nature
Assemblage : 100 % chardonnay. Base 2021 et vins de réserve 2019 et 2020 (30 %).
Origines : Montagne de Reims.
Dans le même style que le précédent, ce blanc de blanc s’appuie sur des raisins d’une autre origine. L’absence de dosage augmente sa tension et la forte proportion de vins de réserve le complexifie. Il aura un usage plutôt apéritif, mais sera aussi à l’aise dans d’autres occasions grâce à sa persistance étonnante.
93/100. 55,90 euros

EPC, bBrut premier cru
Assemblage : 66 % chardonnay et 34 % pinot noir. Base 2015 et vins de réserve (60 %).
Origines : Montagne de Reims et vallée de la Marne. Terroir de la côte des Blancs.
Les origines « premier cru » de ce champagne sont perceptibles. La finale est d’une délicatesse aboutie et c’est un vin qui illustre aussi bien
les ambitions que le style EPC.
94/100. 57,90 euros

EPC, blanc de blancs premier cru nature 2014
Assemblage : 100 % chardonnay.
Origines : Parcelle des Monts Ferrés à Vertus (premier cru).
On retrouve l’élégance du premier cru non millésimé, mais le style est différent car il vient d’une seule parcelle dont il exprime la fine minéralité crayeuse. L’âge lui donne une patine avec des arômes de sous-bois, de feuilles sèches, qui gomme la sensation d’acidité que pourrait apporter l’absence
de dosage.
93/100. 72,90 euros

EPC, blanc de blancs grand cru
Assemblage : 100 % chardonnay. Base 2019 et vins de réserve de 2015 à 2018 (30 %).
Origines : Terroirs d’Avize et Oger.
L’enveloppe apportée par les raisins issus d’Avize, mais aussi par Oger, donne une réelle élégance à ce vin qui se remarque par sa plénitude de constitution. La base 2019 avec un apport de 30 % de vins de réserve fait la différence. Il accompagnera bien une belle volaille rôtie.
95/100. 62,90 euros

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