2019 sera-t-il un bon millésime ?

Météo extrême, production en baisse mais les raisins sont prometteurs

Chaque millésime est unique. Le dire n’est pas tomber dans la facilité des discours préconçus, surtout quand le savoir-faire vigneron, toujours plus précis, permet de réduire les disparités d’une récolte à l’autre. 2019 n’est pas comparable avec ces dernières années. D’où qu’il vienne, le vin est le combat d’une vigne, depuis la fin de l’hiver jusqu’à la fin de l’été, contre une météo tantôt clémente, tantôt brutale, toujours inédite. Celle de cette année a coupé la France viticole en deux. Dans la Loire et le centre du pays, les vignerons ont eu à lutter avec une sécheresse extrême par sa durée et aberrante pour ses climats. À l’est, dans la partie continentale, les températures caniculaires et les pluies d’orages (40 à 50 mm en deux ou trois jours) ont malmené la vigne jusqu’à conduire, début septembre, à un état des feuilles anormalement vert. Une succession de violences climatiques, puis un changement soudain début septembre, et le retour de la fraîcheur et de l’humidité. Du jamais vu.

Un millésime digne des grandes années

2019 est un millésime de contrastes, comme en témoigne le raccourcissement du cycle végétatif des cépages les plus précoces quand celui des cépages les plus tardifs semble ne plus bouger. Le spectre des maturités s’avance toujours un peu plus tôt dans l’année. La maturité du raisin a subi les accidents de floraison du printemps, où coulure et millerandage ont donné des baies inégalement formées, incapables de mûrir en même temps. Comment estimer une date de vendange quand sur une même grappe une baie atteint sa teneur idéale en sucres tandis que l’autre garde une acidité naturelle encore trop élevée ? Au vu de l’importante épaisseur des pellicules et du peu de jus que cette épaisseur sous-entend, la production totale du vignoble sera en baisse d’au moins 10 ou 15 % par rapport à 2018.

2019 devrait être un beau millésime. Soyons patients et attendons la fin du mois de septembre. Les raisins, de manière générale dans le vignoble, présentent une richesse en sucres digne des grandes années et une belle acidité naturelle. En Bourgogne, le gel de l’hiver dernier a finalement fait moins de dégâts que prévu. Les vendanges des blancs ont commencé avec 15 jours d’avance sur le Bordelais et les pinots noirs devraient être supérieurs au chardonnay. À Bordeaux comme dans le Rhône, on attend les cépages rouges pour la seconde moitié de septembre, avec un potentiel de qualité élevé. La Champagne a déjà débuté ses vendanges. Cépages blancs et cépages noirs y ont atteint à peu près en même temps leur maturité, dans un état sanitaire exemplaire. Le Sud-Ouest, la Loire et le Beaujolais ont davantage souffert des gelées de printemps et des averses de grêles, les amputant ici et là – à Cahors ou à Montlouis-sur-Loire par exemple – d’une partie de la récolte. Un nouveau bon millésime où s’est invité une météo extrême. L’heure pourtant n’est plus à la compréhension mais bien à la protection contre ces extrêmes. Plus que jamais, la filière, par ses interprofessions et ses représentants, avec le concours actif des pouvoirs publics, doit s’organiser face à ces conditions climatiques qui seront peut-être récurrentes.

 

Cet article est paru dans le Journal du Dimanche, daté du 15 septembre 2019.

À lire aussi