« Tu le sens ce parfum de myrte, tu les entends tes sangliers ? C’est la Corse. » On n’arrive pas dans l’île sans le plaisir de ricaner un peu. Ces départements français à peine excentrés comptent parmi les plus beaux décors du pays et, chaque fois, c’est l’impression qui prévaut en débarquant à Figari. Nous avons des rendez-vous avec quatre vignerons qui comptent parmi l’élite insulaire. Non, nous n’avons pas été voir les grands pionniers, Arena, Imbert, Abbatucci.
Cap au sud pour rencontrer Gérard Courrèges (domaine Vaccelli), Gilles Seroin (domaine Sant’Armettu), Yves Canarelli (une légende) et son ami Patrick Fioramonti. Ensemble, ces deux-là ont décidé de rendre vie aux terroirs calcaires de Bonifacio avec un projet qui s’appelle Tarra di Sognu, un clos de cinq hectares, au bord de la Méditerranée. Après trente années comme chef-sommelier et directeur chez Toussaint Canarelli, l’oncle d’Yves, au grand hôtel de Cala Rossa (Porto-Vecchio), Patrick Fioramonti a décidé de réaliser un vieux rêve assez partagé, faire son vin. Et se rapprocher d’Yves Canarelli pour ce faire était la bonne idée, histoire de gagner un temps fou. Et de rendre à Bonifacio un peu de sa splendeur passée, du temps où la région comptait 450 hectares de vignes – c’était avant le phylloxéra – contre à peine 40 en ce moment. Yves Canarelli est installé à Figari. Comment le résumer ? Trente-trois hectares, quinze cépages, vingt-deux cuvées. Ces trois chiffres sont une bonne façon de comprendre l’homme. Infatigable découvreur, chercheur, inventeur même, jamais en retard d’une innovation, il essaie tout, veut tout comprendre et sort des cuvées à se damner, sans jamais cesser de se remettre en question. Il commence à trouver en la personne de son fils, Simon-Paul, un appui et un complice dans sa quête sans fin. Il est aujourd’hui un moteur majeur dans l’expansion des vins corses, leur succès. Il entraîne à sa suite, avec infiniment d’humilité, une théorie de vignerons qui veulent avec force imposer leur production au reste du monde.