La disparition de Frédéric Panaïotis, chef de cave de Ruinart

La disparition accidentelle de Frédéric Panaïotis, emblématique chef de cave de Ruinart, me bouleverse. Trop brutale, trop tôt, trop de grands vins et de belles idées encore à partager. Frédéric, dont Guillaume Puzo évoque ci-dessous la fulgurante carrière, était un personnage hors norme comme seule la civilisation contemporaine du vin est capable de produire. Cet esthète aimait transmettre au plus grand nombre les secrets d’une maison historique dont il avait particulièrement rajeuni et précisé le style des vins au cours de ce premier quart de siècle. Il parlait plusieurs langues, et toutes lui permettaient de dispenser cette passion œnophile. Tous les visiteurs du Grand Tasting Paris, qu’il ne manquait jamais, se souviennent de la simplicité et de l’humanité sans pareil dont il faisait preuve pour expliquer le génie des champagnes de sa maison. Tous ceux qui, comme moi, ont eu la chance de partager avec lui des moments de complicité, des bonheurs de conversation et des émotions de grandes bouteilles ouvertes ensemble n’oublieront jamais le lumineux charisme de Frédéric.

A sa famille, à Frédéric Dufour, le président de Ruinart et à l’ensemble de ses équipes, Bettane+Desseauve présente ses plus sincères condoléances.

Par Thierry Desseauve


La nouvelle est brutale, comme l’accident de plongée qui nous a enlevé Fred. On s’était rencontrés voici plus de 30 ans, en septembre 1994 plus précisément. Lui venait d’être embauché dans l’équipe œnologique de Veuve Clicquot, après une première expérience au CIVC (aujourd’hui le Comité Champagne), moi j’y débutais un stage dans le cadre de mes études. Sa simplicité relationnelle et son aisance pédagogique nous ont fait immédiatement nous rapprocher. C’est à ses côtés que j’ai commencé à me former au champagne, son univers et sa dégustation. C’était une époque charnière dans la région, où l’on demandait aux œnologues de bien parler de leurs vins et de leur travail, en plus de leurs compétences strictement techniques. L’époque où le faire savoir venait compléter le savoir-faire. Et Fred, qui parlait déjà couramment l’anglais, l’allemand et l’espagnol, s’était par la suite mis au japonais puis au chinois, sans oublier l’italien. L’accomplissement de sa carrière fut sa nomination comme chef de cave de Ruinart en 2007. Il savait partager à un large public des sujets parfois techniques mais qui expliquaient de façon pointue tout l’art de son métier, élaborer de grands champagnes en anticipant leur évolution en cave et dans le temps. Tant de bons souvenirs de nos masterclasses au Grand Tasting, où derrière un sérieux et un professionnalisme qui ne le quittaient jamais, l’humour et la joie de vivre faisaient pétiller la conversation. Toujours svelte malgré les inévitables sollicitations gourmandes de son métier, débordant d’énergie en toutes circonstances, cet athlète aura croqué toute sa vie à pleines dents.

Tu vas nous manquer, Fred.

Par Guillaume Puzo

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