Michel E. Leclerc a répondu aux questions de Pierre Guigui sur le positionnement de ses magasins pendant les Foires aux vins. Où l’on apprend que Michel-Edouard Leclerc est fan de… Château Reignac !
Le Douro coule à Bordeaux
Chaque année, la fondation pour la culture et les civilisations du vin propose à un territoire viticole de présenter durant trois mois au public de La Cité du vin une exposition originale assortie de nombreux événements. Inaugurée en 2017 avec la Géorgie et une exposition archéologique co-organisée avec l’Etat géorgien et le musée national de Tbilissi, cette proposition culturelle (qui se poursuivra l’an prochain avec l’Argentine) a permis à plus de 50 000 visiteurs de se plonger dans la richesse historique du plus ancien pays viticole au monde. On souhaite le même succès à cette deuxième édition de “Vignoble invité” qui ouvre aujourd’hui à Bordeaux. Baptisée Porto : Douro, l’air de la terre au bord des eaux, elle a été conçue et financée par la ville de Porto, en collaboration avec la Fondation.
Porto, l’une des plus anciennes appellations d’origine contrôlé du monde – le décret-loi date de 1756 – prend ses quartiers d’automne au sein du musée bordelais en même temps que les terres où il est né, exploitées depuis l’Antiquité, où se déploient aujourd’hui 26 000 hectares de vignes et des paysages inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco. Au fil d’un parcours dont le commissariat a été confié à Nuno Faria et Eglantina Monteiro, respectivement directeur artistique du CIAJG (Centro Internacional das Artes José de Guimarães) et anthropologue, et la scénographie réalisée par l’architecte Bartira Ghoubar, se dévoilent « les scintillations contemporaines d’un patrimoine paysager qui met l’accent sur la relation ancestrale entre l’homme et la nature, à travers une approche sensible et pluridisciplinaire. »
En préambule, Eglantina Monteiro explique que « Douro est le nom d’un fleuve devenu également le nom d’une région. Une véritable rencontre entre l’eau, la roche, la nature, les animaux et les hommes où tout est démesuré : la vallée profonde et serrée, la température brûlante, la réverbération du schiste brillant et les terrasses en escalier que les hommes ont créées sur les pentes. Car ce sont les vignes qui ont été la motivation pour défricher ces pentes raides. » Plus qu’une approche didactique, l’exposition propose au visiteur « une expérience sensible et sonore axée sur la durée autant que sur l’espace. » Ses commissaires ont souhaité exprimer les tensions sociales et politiques qui se cristallisent sur un même territoire entre le Douro viticole et rural, qui produit aussi du vin tranquille, et Porto, ville de négoce où transite le « vin de Porto » également produit dans le Douro.
« Le projet d’exposition que nous avons préparé peut être compris comme une composition ; il (…) articule, fait cohabiter des sons anciens et contemporains, témoignages entendus, voix de l’au-delà et visions du passé projetés dans le présent.
C’est, dans sa version aérienne,
un paysage sonore »Nuno Faria, co-commissaire
de l’exposition

Porto : Douro, l’air de la terre au bord des eaux. 5 octobre 2018-6 janvier 2019
Les billets pour l’exposition temporaire “vignoble invité” de La Cité du vin et tous les événements qui y sont associés (dégustations, ateliers, conférences, films, rencontres, etc.) sont disponibles ici.
Un engagement durable et familial
C’est en septembre 2008 que Jacky et Françoise Lorenzetti « tombent sous le charme » d’un domaine du XVIe siècle situé sur les hauteurs de Saint-Estèphe. Depuis, ils n’ont cessé d’améliorer le potentiel de leur propriété – entre autres, un nombre de parcelles divisées par deux, un vignoble recentré sur les plus beaux terroirs et un nouveau cuvier semi-enterré – et cette quête d’excellence viticole les a également conduits à reprendre les rênes du château Pédesclaux (Pauillac), investir dans celui d’Issan (Margaux) et, plus récemment, dans la société de négoce LD Vins. A l’aube de cette seconde décennie, la famille prend « un nouvel élan symbolisé par l’arrivée de Manon Lorenzetti qui rejoint ses parents en tant que membre du directoire de leur holding Ovalto, en charge du pôle viticole. » Avec cette nouvelle génération, l’accélération du développement des pratiques culturales vertueuses est à l’ordre du jour.
Engagés dès 2009 par les équipes de Vincent Bache-Gabrielsen, directeur des vignobles de la famille Lorenzetti, les efforts réalisés afin de préserver l’écosystème du château Lilian Ladouys et valoriser son terroir sont désormais certifiés HVE (haute valeur environnementale de niveau 3), une mention officialisée avec le millésime 2018. « L’absence d’utilisation d’herbicides, le semis d’engrais vert et l’utilisation de compost provenant d’une exploitation médocaine partenaire favorisent la vie des sols et l’expression la plus aboutie du terroir de Saint-Estèphe. » En plus de ces exigences environnementales, la propriété s’est aussi enrichie de 34 hectares supplémentaires, « avec une proportion notable de très belles graves. » L’acquisition de ces parcelles contigües au vignoble du château a pour conséquence, sur 80 hectares désormais, un « équilibre d’encépagement parfait pour Saint-Estèphe » : 50 % de merlot, 45 % de cabernet-sauvignon, 4 % de petit verdot et 1 % de cabernet franc.
Le charme éternel du blason
Au retour de vacances sur le pourtour méditerranéen, après la dégustation de nombreux languedocs, langhes et autres barolos, je me suis étonné de retrouver intact le plaisir d’un beau bordeaux. Un plaisir presque coupable par les temps qui courent où il ne serait plus dans l’air du temps d’afficher un tel penchant. Certes le tannin de ce second vin est hautain quand que celui du grand vin est plus onctueux dans un millésime 2014 qui joue souvent sur le velours mais la finale est très bordeaux, goûteuse et puissante, emportée par le cèdre, les fruits noirs distingués. Un classicisme réjouissant à l’image de son superbe château qui remplace une construction médiévale et en a gardé l’inspiration. On perçoit qu’il provient d’un grand terroir, le genre de première classe capable de dégager la finesse aromatique dont sont capables les margaux de bord de Gironde. Un terroir connu depuis le XIIe siècle, classé troisième cru en 1855. Dans un monde idéal, il conviendrait d’attendre un peu ce blason 2014, deux ou trois ans. Sa légère dominante de merlot devrait l’assouplir assez vite mais les impatients ne seront pas déçus.
15/20, 23 euros.
Un nouveau vin à l’Elysée
Domaine de vingt-cinq hectares détenu par la même famille depuis le Moyen âge, le château des Annereaux est mené en bio depuis une décennie. Après avoir contacté la présidence de la République en début d’année, Benjamin Hessel, qui gère cette propriété située en appellation lalande-de-pomerol, a été convié au printemps dernier par la chef sommelière de l’Elysée, Virginie Routis.
A la suite de cette concluante dégustation, cette dernière a décidé de référencer deux millésimes des Annereaux dans la cave de l’Elysée, le 2012 et le 2015. Si ces deux étiquettes vont désormais avoir l’honneur de contribuer à valoriser l’image de la France viticole, « ce sont également le sérieux et la qualité des vins biologiques qui se voient récompensés » par cette présence à la table de la présidence.
Bien commencer la saison
En ce début d’automne, l’historique domaine chablisien William Fèvre et la maison familiale Les huîtres de Prat-Ar-Coum, installée dans le breton pays des Abers depuis 1898, s’associent pour proposer « un coffret iodé et gourmand, à déguster en amoureux ou entre amis. » Comme le montre l’étiquette ci-dessus, le domaine a choisi de mettre à l’honneur son Petit Chablis 2017 pour cette nouvelle “Sea Edition” (toujours limitée). Il est accordé à des huîtres cultivées et sélectionnées avec soin par Yvon Madec, fournisseur de grands chefs étoilés (Guy Savoy, Pierre Gagnaire, etc), au cœur d’un coffret complet (icebag, couteau sommelier) disponible depuis lundi et livrable partout en France.
Tarif : 61 euros (prix conseillé), plus de détails et commande ici.
La maison Ruinart s’installe à Paris du 18 au 22 octobre
Déambuler, découvrir, rêver
En marge de la Fiac (Foire internationale d’art contemporain), Ruinart ouvre les portes de sa Maison 1729 au cœur du septième arrondissement. Cette parisienne et éphémère demeure retracera ses diverses cartes blanches artistiques « au fil d’un grand livre ouvert laissant échapper quelques pages de son savoir-faire au gré de la visite », explique Nathalie Crinière, la scénographe qui en signe le décor. « Les artistes et leurs œuvres deviennent ainsi des personnages indissociables de l’histoire de la maison. » Le premier chapitre exprimera le dynamisme créatif de la maison rémoise avec les nombreux artistes qui ont donné leur vision de l’univers Ruinart et les œuvres de Liu Bolin, “artiste Ruinart” 2018. Au chapitre 2, le savoir-faire, les gestes et les étapes de l’élaboration du champagne prendront vie sous les traits minutieux et les animations oniriques d’Ugo Gattoni, talentueux illustrateur français.
Se laisser guider, expérimenter, déguster
Au chapitre des animations, de nombreuses réceptions et dégustations rythmeront ces cinq jours. Parmi elles, le premier Ruinart Sommelier Challenge jamais organisé en France – que le chef de cave de la maison, Frédéric Panaïotis, explique en détail ici – et des expériences inédites, notamment des dégustations en présence d’œnologues de la maison et des masterclass (payantes) accessibles au public sur réservation. Pour s’inscrire, c’est par là.
Maison 1729, l’agenda
Visites :
Vendredi 19 et dimanche 21 octobre, de 17 h à 18 h.
Tarif : 25 euros.
Masterclass :
Samedi 20 et dimanche 21 octobre, de 11 h à 13 h et de 14 h à 16 h.
Tarif : 90 euros.
29, boulevard de la Tour Maubourg, 75007 Paris
Lalique et Niepoort, une première
Première collaboration entre l’historique cristallerie française et la célèbre maison de vins de Porto fondée en 1842 par la famille Van der Niepoort (et toujours entre ses mains), la carafe ci-dessus sera mise aux enchères le 3 novembre prochain à Hong Kong par Acker Merrall & Condit, incontournable adresse de l’Upper West Side – à Manhattan depuis 1820 – qui organise chaque mois des ventes enchères (en salle et en ligne). Cette exceptionnelle édition contient l’un des plus anciens vins fins au monde : le tout premier porto créé en 1863 par Francisco Marius van der Niepoort. Elle sera présentée dans un meuble en ébène de Macassar créé par Lalique Maison (photo ci-dessous).
Avec une silhouette qui s’inspire de celle de la bonbonne originale de onze litres qui fut emplie, en 1905, de ce porto millésimé qui a aujourd’hui 155 ans d’âge, ce beau flacon inaugure une série constituée de cinq carafes de cristal, dont chacune sera gravée au nom de l’une des générations de la famille (jusqu’à Dirk van der Niepoort, qui dirige aujourd’hui l’entreprise). Hommage à l’héritage de Niepoort, cette carafe signée et numérotée célèbre aussi celui de Lalique. Elle a été créée grâce à l’un des plus anciens procédés de production du verre, la cire perdue, « une technique apprise et transmise par les générations d’artisans talentueux et toujours utilisée à ce jour dans la manufacture Lalique en Alsace. »
Ruinart et l’art contemporain, la légitimité commence à la cave
Né au siècle des Lumières, en pleine effervescence intellectuelle et artistique, Ruinart en conserve un tempérament résolument avant-gardiste. Et une complicité naturelle avec les artistes. Depuis toujours, la doyenne des maisons champenoises jette des passerelles entre son univers et celui de la création contemporaine. Accueillant régulièrement des artistes en résidence, elle les invite à réinterpréter son patrimoine en laissant aller leur imaginaire comme le champagne laisse s’envoler ses bulles, en toute liberté.
Mucha ouvre le bal en 1895
Tout commence en 1895, lorsque la maison confie à un jeune artiste tchèque encore méconnu, Alphonse Mucha, le soin de dessiner sa première affiche publicitaire. La réclame, une première dans l’histoire de la Champagne, fait sensation et Mucha ne tarde pas à s’affirmer comme le précurseur de l’Art nouveau. Aujourd’hui, Ruinart poursuit son engagement artistique à travers sa participation aux plus grands événements d’art autour du monde (Fiac, Paris Photo, Art Cologne, Dallas Art Fair, Art Basel, entre autres) et par des cartes blanches données chaque année à des talents internationaux, renommés ou émergents. Les œuvres nées de ces collaborations, peintures, sculptures, installations, photographies, pièces de design racontent et réenchantent continuellement son histoire débutée en 1729, son riche patrimoine, la magie de ses crayères gallo-romaines, aujourd’hui classées au patrimoine mondial de l’Unesco, l’excellence de son savoir-faire et de ses cuvées.
Une collection d’œuvres inspirées par l’univers Ruinart
Durant cette dernière décennie se sont ainsi succédé plus d’une dizaine d’artistes. Chacun a posé son regard singulier sur l’univers de la maison, inépuisable source d’inspiration. Parmi les plus récents, l’Ecossaise Georgia Russell a revisité le premier livre de comptes, qui date de 1729, avec une sculpture monumentale (Le Grand Livre, 2014). Pour nous conter le chardonnay, cépage emblématique de la marque, le designer français Hubert Le Gall conçoit en 2015 un calendrier en verre de Murano qui retrace l’évolution du cep de vigne au fil des mois. En 2016, sous l’objectif du photographe hollandais Erwin Olaf, les mille et une marques faites depuis la nuit des temps par l’homme et la nature sur les murs des crayères, encoches taillées par les mineurs, graffitis, aspérités naturelles, sont mises en lumière dans un ensemble de photos en noir et blanc. Après le plasticien catalan Jaume Plensa, invité 2017, Liu Bolin livre cette année une série d’images-performances réalisées lors de ses dix jours de résidence. Marqué « par l’expertise déployée et l’utilisation des ressources naturelles à disposition dans la fabrication du champagne », l’artiste chinois a joué sur l’idée du camouflage. Il s’agissait à la fois de mettre en avant le respect de Ruinart pour la nature et de mieux révéler, en faisant disparaître le corps, les gestes des femmes et des hommes qui créent le champagne : ces artistes de l’ombre qui s’effacent devant l’œuvre finale : une bouteille de Ruinart.
L’art au service du champagne
Pour développer des objets de service, Ruinart fait aussi appel à la patte des plus grands designers. India Mahdavi, Christian Biecher, Patricia Urquiola, Nendo et plus récemment Ron Arad ont laissé leur empreinte artistique, ici sur des bouchons (Cuillère, Fleur, Fil d’or) destinés à préserver l’effervescence de la bouteille de manière aussi somptueuse qu’originale ; là, sur un rafraîchissoir Miroir inspiré de la vasque du Déjeuner d’Huîtres peint en 1735 par Jean-François de Troy ou sur un coffret (réinventé par Nendo). Autant d’objets du quotidien du champagne conçus comme des prolongements artistiques des caves et d’un savoir-faire unique. Transcendé par tous ces imaginaires, plus que jamais ce grand champagne « vient nous dorer le cœur, vient fondre nos cerveaux », comme l’écrivait Edmond Char (dans son poème Champagne !) et nous donne des « frissons nouveaux. »
Par Pascale Cassagnes
Sommellerie, quatre nouveaux MOF
Parmi les neuf candidats arrivés en finale du concours faisant d’eux l’un des meilleurs ouvriers de France en sommellerie, épreuves qui se sont tenues le week-end dernier sous la présidence de Philippe Faure-Brac, quatre sommeliers émérites recevront en mars prochain le titre de MOF – diplôme d’Etat classé depuis 2001 au niveau III de la nomenclature des niveaux de formation – lors d’une cérémonie qui se déroulera à la Sorbonne : Eric Goettelmann (Relais Bernard Loiseau), Jean-Baptiste Klein (La table d’Olivier Nasti), Pascaline Lepeltier (Racines) et Nicolas Vialettes (qui officie au restaurant Le Taillevent auprès d’Antoine Pétrus).
Créé en 1924 et souvent associé aux métiers d’art et d’artisanat, alors qu’il concerne également les métiers du BTP, de l’industrie et de la métallurgie ou encore du multimédia et de l’audiovisuel, le concours distinguant tous les trois ans certains des meilleurs ouvriers de France récompense l’excellence du professionnel : « Tel une vigie, le lauréat (…) véhicule des valeurs sociétales, sociales et de solidarité. » C’est le seul diplôme délivré par l’Éducation nationale dont les critères sont établis par les professionnels eux-mêmes. Le 26e concours “Un des meilleurs ouvriers de France” a accueilli 2 950 candidats, toutes catégories confondues.