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Château La Verrerie, naissance d’une icône

Photo : Mathieu Garçon.

Retrouvez cet article dans En Magnum #40. Vous pouvez l’acheter en kiosque, sur notre site ici, ou sur cafeyn.co.


« Exprimer le terroir », c’est l’expression utilisée par Valentine Tardieu-Vitali, la directrice générale et l’œnologue du château La Verrerie, pour expliquer la démarche recherchée avec la cuvée Grand Deffand, le grand vin de cette propriété du Luberon, cheffe de file de son appellation. Acquis par la famille Descours en 1981, par ailleurs aujourd’hui propriétaire de plusieurs maisons champenoises (Piper-Heidsieck, Charles Heidsieck, Rare), d’un domaine parmi les plus réputés de Toscane (Biondi Santi) et présent dans l’artisanat d’excellence (J.M. Weston), ce domaine est devenu l’un des plus passionnants à suivre pour les observateurs de la vallée du Rhône, notamment pour sa réflexion menée sur l’identification des terroirs du secteur mais aussi pour la mise en place d’une viticulture de précision exigeante et pragmatique, biologique pour une partie de la gamme (Hautes Collines) ou biodynamique (Grand Deffand).
Avec des vins reconnus des consommateurs, le château La Verrerie s’est imposé dans le paysage des meilleurs domaines de France en moins d’un demi-siècle. Un exploit au regard de la situation du Luberon dans les années 1980 et qui s’explique par une volonté de créer un vin issu d’une vision de terroir, peu répandue à l’époque dans le secteur. « Le grand-père de Christopher Descours (le propriétaire du domaine et l’actuel président de la holding EPI, ndlr) avait des idéaux en matière de vins rhodaniens et un goût prononcé pour la syrah du nord de la vallée », précise Valentine Tardieu-Vitali. Plantée massivement au début des années 2000 dans la partie méridionale, principalement pour améliorer des assemblages parfois fébriles en structure, la syrah inspire bien très tôt la famille Descours dans sa quête du vin de lieu.
Un an après la reconnaissance de l’appellation luberon par l’Inao (1988), La Verrerie lance le premier millésime de sa cuvée Grand Deffand, « nommée ainsi en raison du lieu-dit sur lequel se trouve cette vigne de syrah », précise Valentine Tardieu-Vitali. « Un terroir atypique pour le cépage puisqu’il s’agit de la parcelle la plus en altitude du domaine, un coteau plein sud avec un sol très caillouteux et drainant. Ce n’est pas une vigne très généreuse, mais elle donne des raisins avec beaucoup de personnalité. » Vinifiée séparément pour cette raison, elle est complétée par des raisins de vieux grenaches plantés dans les années 1950 (15 % de l’assemblage). En plus de cette cuvée majoritairement dominée par la syrah, le domaine propose un autre rouge dans cette collection Grand Deffand, dominé cette fois par le grenache et complété d’un peu de syrah. Deux expressions différentes du même lieu qui traduisent le potentiel de ce vignoble morcelé, fait de petites parcelles et de micro-terroirs spécifiques. À partir de ces mêmes parcelles, la propriété élabore depuis 2015 une version rosée de son Grand Deffand. Un rosé de saignée « élaboré quand le millésime le permet » et dont l’ambition a été réaffirmée avec l’arrivée de Valentine Tardieu-Vitali en 2017 : « Plus de temps de contact des pellicules avec le jus a renforcé le caractère aromatique de ce rosé. Mais l’idée est d’avoir en tête le profil gustatif que l’on souhaite au moment de la saignée, qui ne représente pas plus de 2 à 3 % du volume total. La difficulté, c’est de ne pas aller trop loin pour éviter d’avoir de l’astringence. Il faut trouver un équilibre ». Depuis 2020, la collection Grand Deffand compte aussi un vin blanc, assemblage de grenache blanc et de roussanne né à l’initiative de Valentine Tardieu-Vitali qui croit dans les prédispositions des terroirs du Luberon, « capables de donner des vins blancs avec beaucoup de fraîcheur et d’équilibre ». Réussites égales, ces quatre vins (deux rouges, un rosé de saignée et un blanc) sont délibérément destinés à la gastronomie, réservés ainsi au circuit traditionnel, avec une petite partie à l’export, principalement en Suisse et en Allemagne, ou vendus sur place, à la boutique du domaine.
Si le Luberon semble parfois chercher son chemin entre vins de plaisir et vins de terroirs, Valentine Tardieu-Vitali constate que « ce n’est pas incompatible, même si La Verrerie s’est toujours appuyé sur une approche parcellaire pour proposer des grands vins ». Mais pour la directrice, cette logique ne doit pas prendre le dessus sur les émotions. « Il faut que le vin soit singulier. » On se fera une idée de cette exigence en découvrant notre compte-rendu de dégustation de ces quatre vins identitaires.

 

La dégustation

Grand Deffand rosé 2023, luberon
« Lorsque l’on fait un rosé de saignée, la difficulté est de ne pas avoir d’astringence tout en obtenant un vin avec de la mâche », explique Valentine Tardieu-Vitali.
Dans cet assemblage à parts égales de syrah et grenache, on retrouve ce qui fait le charme et l’identité de ce vin unique dans le paysage des rosés. Notes de fraise écrasée et d’épices douces, touches végétales très nobles (menthe fraîche), bouche fraîche avec du gras et de l’ampleur, finale saline, intense et de grande longueur. Élégant, déjà délicieux et splendide après deux ou trois ans de garde.
4 000 bouteilles, 26 euros.
94/100

Grand Deffand blanc 2023, luberon
Assemblage de grenache blanc (majoritaire) issu d’une parcelle située au milieu des bois, plantée au début des années 1990, et de roussanne plantée sur des sols calcaires, un terroir original pour le cépage. Premier nez délicat entre notes florales (fleur d’acacia, chèvrefeuille) et de fruits blancs charnus, grande fraîcheur et intensité des saveurs, bouche texturée, grasse et ronde avec beaucoup d’équilibre et de naturel. Droit
et vif en finale, avec une persistance contenue qui lui donne de l’élégance.
8 000 bouteilles, 34 euros.
93/100

Grand Deffand – Syrah 2023, luberon
« Le choix des dates de vendanges est primordial pour atteindre la maturité optimale des cépages rouges », rappelle Valentine Tardieu-Vitali.
Cet assemblage de syrah (majoritaire) complété par un peu de grenache est un vin complet, singulier par ses notes de garrigues, de laurier, d’olive écrasée et de fruits noirs mûrs sans excès. Les 40 % de vendanges entières aide à structurer la bouche sans alourdir la structure tannique, ce qui donne un vin à la bouche puissante mais équilibrée, profonde et soyeuse, nuancée et savoureuse. Finale longue et sapide.
5 000 bouteilles, 38 euros.
95/100

Grand Deffand – Grenache 2021, luberon
Les grenaches, majoritaires dans cet assemblage qui compte aussi un peu de syrah, sont issus d’une parcelle de deux hectares dans le secteur de Lauris, plantés sur le plateau
le plus chaud du domaine, mais dont les sols restent frais. « Millésime pour les experts de la vigne tant les conditions météorologiques ont été exigeantes », indique Valentine Tardieu-Vitali, ce 2021 affiche un profil charmeur, avec des notes de fruits rouges frais, de rose fanée et d’orange sanguine. De la fraîcheur et de la buvabilité.
3 600 bouteilles, 38 euros.
93/100

Famille Tarlant, dévotion maximale


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Je me souviens. Automne 2005. La famille Tarlant s’affaire. Treize générations au compteur. Micheline accueille les clients, sourire majeur. Qui court à la cuisine, répond au téléphone. Jean-Mary, en costume clair, s’apprête à filer, mallette à la main, à la consultative du comité interprofessionnel du vin de Champagne pour décider du sort régional du millésime 2004, pléthorique. Mélanie prépare les commandes, douzième génération. Son frère Benoît est aux manettes, du raisin à la bouteille. Le nez dans la vigne, en permanence, à surveiller la croissance, les signes de faiblesse éventuels, les dégâts laissés par la grêle, à préserver les nids des linottes. « C’est la vigne qui nous donne la richesse et la réflexion pour élaborer nos vins. On cherche l’équilibre sur les sept cépages pour retrouver l’expression d’une vigne. Si on ne le fait pas, personne ne le fera à notre place », explique-t-il. Il tient cette recherche d’expression en partie de ses tours du monde et ses voyages sous l’égide de l’OIV (Organisation internationale de la vigne et du vin), au sein de laquelle il a fait son Master, très formateur : « Un accélérateur de compréhension ». Dans la cave, une batterie de cuves et de fûts. On fait le choix des cuvées, avec l’ensemble des générations. Georges, 96 ans et son fils, 76 ans, participent aux dégustations.
Une génération s’est éteinte. L’église du charmant village d’Œuilly, surplombant la Marne, est toujours là, témoin solide du temps qui passe. Derrière la maison, deux énormes pressoirs ont poussé les murs. La cuverie s’est agrandie, méconnaissable. Benoît Tarlant pondère : « On s’est développés de manière vigneronne, on reste dans un modèle où l’on gère tout du début à la fin, du pied de vigne à l’expédition des bouteilles. On s’est un peu agrandis, mais on reste minuscules avec pas plus de 120 000 bouteilles produites par an. On a une existence, des valeurs qui sont défendues et plus reconnues qu’il y a trente ans. Le bio est un élément, le savoir-faire vigneron en est un autre. »

L’émotion et la vibration
Élaborer des vins bien faits, qui surtout savent donner une émotion et parler de la terre. Les sols se déclinent : sparnacien, sables mêlés de cailloux, veine de craie qui ondule en suivant la Marne. Ces variations impressionnantes se voient au vin clair. « La région se segmente de plus en plus », fait remarquer Benoît. D’un côté, les grosses maisons qui produisent du volume, servies par de plus en plus de viticulteurs qui préfèrent, au fond, vendre leur raisin plutôt que de faire un « champagne » basique qu’ils épuisent en s’épuisant de salon en salon. Et cette nouvelle génération, grandissante, de petits vignerons à l’identité forte, proches de leur terroir et de la plante. Hier, on célébrait au champagne, on faisait « péter les bouchons ». Aujourd’hui, les jeunes amateurs s’asseyent à table et dégustent dans des verres adéquats les parcellaires de chez Tarlant (il y en a huit), les comparant à ceux d’Egly, de Chartogne ou d’Anselme Selosse.
Les Tarlant en 2025, c’est dix-sept hectares pour dix-sept âmes travailleuses. Et vingt-quatre passages cette année pour protéger les vignes. Pas facile d’être en bio. La conversion date d’il y a dix ans. « Nous ne faisons pas partie des pionniers, mais nous y sommes venus par conviction, avec toutes les contraintes techniques et administratives que cela suppose. On assume, paperasserie comprise. Sans compter l’aspect économique. En 2021, on a perdu 70 % de notre récolte. On prend des risques plus forts. Mais on a toujours la chance d’avoir des vins de réserve. Sur dix ans, ça s’équilibre. Impossible de mettre des désherbants ou des engrais minéraux. Nous travaillons les sols et usons des couverts végétaux. Inévitablement, les rendements sont plus faibles. En 2024, c’était vraiment dur. Nous avons réalisé deux fois moins de rendements que l’année précédente. C’est un engagement, une connexion moins technologique, fortement liée à l’origine. Nous ne faisons pas du champagne, nous faisons de grands vins de Champagne, liés au terroir. Ce n’est pas la même chose. » Des vins effervescents non seulement « bien faits », mais qui font aussi vibrer, comme la cuvée Zéro, brut nature qui reflète la pureté du terroir, ou la cuvée Louis, témoin de la succession des générations.

Au nom de la loi (Évin)


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Souvenons-nous, dans les années 1980, de ces publicités pour le vin à la télévision. Celle des rivesaltes, avec Gérard Lenorman qui chante sur son piano planté au cœur des vignes, entouré de joyeux vendangeurs, verre de cantine dressé haut et fier : « De père en fils, dans ton terroir, vigneron tu aimes ta vigne, je viens te chanter la ballade, la ballade des gens heureux. » Et ces slogans : « Un Ricard, sinon rien », « Ma chemise pour une bière » ou encore « Faites mousser les bons moments ». À cette époque, la loi Évin n’existe pas. On peut alors, à la télévision, parler de vin un verre à la main ou fumer allègrement sur le plateau d’Apostrophes. Au nom de la santé publique, les législateurs prennent les choses en main. « C’est l’une des initiatives les plus spectaculaires du gouvernement dans sa volonté de soigner la France. Il y a, par an, cent mille personnes qui meurent à cause du tabac et de l’alcool », annonce d’un ton solennel le journal télévisé du 28 mars 1990. La loi n°91-32 du 10 janvier 1991, dite loi Évin, est promulguée. Près de trente-cinq ans après, dans un contexte inédit de déconsommation du vin, son objectif semble atteint.

Une démarche historique
Dans les faits, l’idée d’un encadrement de la consommation d’alcool est née bien avant 1991. Dans le magazine Cairn, qui relate son aventure, on lit que l’initiative remonte au XIXe siècle : « En 1872, sous la pression de quelques membres de l’Académie de médecine naît l’Association contre l’abus des boissons alcooliques. Une première loi est promulguée en 1873 sur la répression de l’ivresse ». Seul l’alcool est dans le collimateur, le tabac viendra plus tard. Il faut dire qu’on boit beaucoup en France à l’époque, 147 litres de vin par personne et par an. Un peu moins de 170 litres en 1934, le record. Suivent les Italiens, les Portugais, les Espagnols, les Autrichiens et les Suisses, loin derrière avec des consommations plus aléatoires. Dans les années 1950 et 1960, le bon vin de France est associé à la baguette de pain et joue pleinement son rôle alimentaire. Dans un documentaire de l’INA datant de 1965, un Français s’exprime avec joie et sincérité : « Le vin, c’est ce qui a gagné la guerre ! J’ai bu des citernes de vin, j’ai bu pendant les deux guerres et entre les guerres aussi, et j’aime le vin par excellence parce que le vin est un aliment très nourrissant ». Il avoue, pour conclure et sans faire le fanfaron, ne plus être autorisé à en boire. Ces mesures d’encadrement de la consommation se durcissent dès lors que tabac et alcool sont associés par les pouvoirs publics. La loi Veil (9 juillet 1976) se charge de la cigarette : arrêt des publicités et interdiction de fumer dans des lieux publics avec des enfants. Côté alcool, des médecins décrètent, en s’appuyant sur des études, que l’ordre public est mis à mal et que la santé des Français est en danger. En 1980, le professeur Jean Bernard préconise la prévention et l’éducation. Le 17 janvier 1986, une loi prévoit le retrait immédiat et pendant 72 heures du permis de conduire « en cas de présomption d’état d’ivresse ». La loi Barzach (30 juillet 1987) apporte une première restriction à la publicité sur l’alcool à la télévision. Appuyé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et des constats alarmants, notamment la consommation annuelle de douze litres d’alcool pur per capita, l’étau se resserre. En 1989, des médecins établissent un rapport commandité par Claude Évin, alors ministre des Affaires sociales et de la santé. La loi Évin de 1991 entre en vigueur le 1er janvier 1993. Pas de prohibition, mais une stratégie subtile de « dissuasion de l’incitation à la consommation ».

Inconscient collectif
Pour le tabac, l’effet de la loi Évin est évident. Entre 2001 et 2021, les ventes ont chuté de 60 %. Il faut dire que le message est clair : photos provocatrices imprimées sur le paquet, publicité interdite et prix rébarbatifs. Pour l’alcool, tout est plus flou. Certes, la loi a freiné les élans des publicitaires. Elle a participé aussi à la déconsommation des boissons alcoolisées en France, conformément à sa promesse initiale de santé publique. Mais sans en être le facteur principal. Samuel Montgermont, le président de Vin et Société, association qui représente 500 000 acteurs de la filière (production et négoce) pour faire rayonner le vin en France et au-delà en tant qu’emblème national, préfère parler de décrue sociétale : « Avec la loi Évin, la tendance de fond de la déconsommation s’est poursuivie. Celle-ci est régulière, de 5 % par an, et va atteindre un palier qui correspond en fait à un usage occasionnel. Pour l’instant, on est encore à un niveau élevé » (45 litres par an et par habitant, contre 2,7 pour la moyenne mondiale selon l’American Association of Wine Economists). La situation est différente pour la consommation de bière et de spiritueux. Les deux catégories voient leur consommation rester stable et deviennent des alternatives au vin, pour de nombreuses raisons. Vendu essentiellement en grandes et moyennes surfaces, le vin perd des parts de marché au profit de la bière « qui fait mieux le job que lui », explique le journaliste Olivier Dauvers, spécialiste de la grande distribution. Pourtant la bière est tout aussi concernée par la loi Évin. Pour le journaliste, celle-ci est « un faux prétexte à la déconsommation car la meilleure des publicités reste l’exposition du produit en magasin ». Pour Marie Mascré, fondatrice de Sowine, agence justement créée en réponse à la loi Évin pour soutenir les vignerons dans le méandre des flous juridiques, la réglementation n’a pas aidé à faire aimer le vin aux Français : « Quand on répète à longueur de journée les messages de santé publique, la loi pousse dans l’extrémisme de l’hygiénisme. Ça entre dans l’inconscient collectif ». À cela s’ajoute une image du vin souvent poussiéreuse (« le vin de papa ») et quelque peu élitiste en raison d’une communication excessive à propos des cuvées haut de gamme. Un problème pour Samuel Montgermont qui constate que la production a oublié de parler des bouteilles à moins de cinq euros, les plus accessibles.
« La génération née avec la loi Évin n’a pas appris à déguster ni à manger en famille. Le repas du dimanche s’est raréfié », fait remarquer Françoise Ollier, du domaine Ollier-Taillefer dans le Languedoc. Elle estime que la déconsommation du vin est l’une des conséquences de ces nouveaux modes de vie. Même si la loi a largement sa part de responsabilité. « J’étais directrice de l’appellation faugères de 1992 à 2003. J’ai vu naître et se développer la loi Évin. Les vignerons se sont adaptés. Mais je n’avais pas vu venir l’impact que cela pourrait avoir sur la nouvelle génération. Pour moi, elle a mis trente ans à faire son travail et elle a atteint aujourd’hui son objectif, de façon insidieuse. » Le vin a les défauts de ses qualités. Sa diversité peut transformer le choix en casse-tête. S’ajoute à cela le message que nous, journalistes, sommes les premiers à véhiculer avec nos guides et nos sélections : il existe les bons vins et les autres. Pour certains buveurs, tendre la main vers une bouteille de vodka ou de whisky largement diffusée est une garantie de ne pas se tromper. Si la loi Évin a contribué à la chute de la consommation, elle n’a pas freiné les ambitions ni la créativité des annonceurs et des agences de publicité. Marie Mascré est formelle : « On n’a jamais autant innové qu’aujourd’hui pour s’y adapter. J’ai créé Sowine en 2006 parce que, lorsque je travaillais chez Veuve Clicquot, j’ai réalisé qu’il fallait proposer des services dans le strict respect de la loi Évin ». D’une contrainte, la loi est devenue une sorte de cadre de travail, imposé certes, pas très clair, mais toujours présent. Pour être dans les clous, la fondatrice de Sowine s’appuie sur un cabinet d’avocat pour que tout soit validé en amont et pour, le cas échéant, soutenir les clients mis au tribunal par Addictions France, qui lance en moyenne trente actions en justice par an.

Epée de Damoclès
Les vignerons, moins concernés par ces procès que les producteurs de bière ou de spiritueux, font tout pour être dans les règles. Dom Brial, une coopérative du Roussillon, se « risque » tous les ans avec son rosé Rozy et sa bouteille sérigraphiée d’un bikini que l’on pourrait aisément qualifier de « sexy ». Émeline Picard, la directrice communication et marketing de la cave, précise : « C’est notre vêtement de plage, nous sommes en bord de mer, c’est un clin d’œil à notre mode de vie et c’est notre ADN méditerranéen. Nous n’évoquons pas le vin frais à boire entre copines, ce qui serait interdit, mais les caractéristiques de l’assemblage, pas forcément habituel des rosés, syrah et muscat à petits grains ». Avant de conclure à propos de la loi Évin : « Parfois, on se sent bridé, mais le défi est intéressant ». Pour ces créateurs, la loi est une épée de Damoclès. Certains clients leur demandent de l’ignorer, quand ils tiennent, par exemple, à garder coûte que coûte leur identité. D’autres, principalement dans le secteur des spiritueux, demandent de distinguer ce qui est destiné au public français de l’international. En France, interdiction de mêler le liquide aux émotions, au sport, aux enfants, etc. Plus les entreprises sont importantes, plus la loi devient la seule base de travail. Une communication à deux vitesses entre ceux qui respectent au pied de la lettre et ceux qui foncent. Les interprofessions, elles, ne peuvent en aucun cas se permettre d’enfreindre la loi. Grégory Guyot, de l’agence japonaise Dentsu, rappelle que l’alcool n’est pas le seul à être scruté à la loupe dans la publicité. Jouets, nourriture, boissons sucrées sont soumis eux aussi à des règles précises. Rien n’est fait sans l’avis favorable de l’organisme de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) qui s’assure que la campagne soit « loyale, véridique et saine. » Comme Marie Mascré, il reconnaît que « la création n’est bonne que s’il y a des contraintes ».

Un lobbying permanent
La loi Évin n’a pas non plus freiné la créativité et la communication sur internet, univers sans frontière. Pris en compte par le texte de loi en 2009, le web donne du fil à retordre aux législateurs qui y constate de nombreux excès. Toute communication est censée y être réalisée « dans le respect de la loi Évin ». L’association Addictions France, toujours à l’affût, a recensé 11 300 contenus valorisant l’alcool sur Instagram et TikTok entre juin 2021 et janvier 2024. « Contenus principalement destinés à la jeunesse, visant à en faire des consommateurs pour la vie », annonçait (ou dénonçait) la radio France Culture en septembre 2024. « La plupart des contenus sont incitatifs. On ne peut pas être derrière chaque influenceur », reconnaît Franck Lecas, responsable de la loi Évin chez Addictions France. « Comme en 1991 pour la télévision, ils devraient être purement et simplement interdits. On a fait condamner Meta le 5 janvier 2023, et cela a été confirmé en appel, à retirer des contenus. C’étaient de vieux contenus, tout cela n’était que symbolique. C’est un puits sans fond », finit-t-il par admettre. Pour autant, la liberté d’expression existe. Margot Ducancel, fondatrice du club œnologique Rouge aux Lèvres et créatrice de contenus sur Instagram (43 000 followers) où elle s’adresse aux jeunes, spécifiquement les femmes, en les sensibilisant aux bons vins, en sait quelque chose. Elle connaît les règles imposées par la loi Évin et s’y tient. Ne pas boire devant la caméra, ne pas ouvrir de bouteille, s’habiller chic sans être sexy. « Il existe une zone de tolérance sur des profils comme le mien. On est toujours un peu borderline, mais si on fait un travail de qualité avec du contenu pédagogique, il n’y a aucune raison que ça ne passe pas. » Comme le rappelle Marie Mascré, « les consommateurs s’intéressent au vin avant tout par le tourisme, la gastronomie, moins par le sujet vin pur et dur. » Sans surprise, la loi Évin n’a pas freiné la velléité des puissants groupes alcooliers, plus remontés que jamais à Bruxelles, grâce à un lobbying permanent, ou sur internet via des actions occultes largement dénoncées par nos confrères de France 2 (Cash Investigation, 2021) et de la RTBF (#Investigation, 2023). Les géants des spiritueux et des bières ont désormais recours à Instagram ou Tiktok pour faire passer leurs messages.

Des contraintes et des libertés
Au final, faut-il assouplir la loi ? Franck Lecas prévient : « Le souci, quand on veut protéger le vin, par exemple, c’est que ce sont les alcools comme le whisky qui en profitent ». En février dernier, les députés Loïc Prud’homme et Karine Lebon ont présenté une proposition de loi visant à protéger la jeunesse des dérives du marketing des industriels de l’alcool. Les élus proposent, entre autres, l’interdiction de la publicité pour de l’alcool par des influenceurs sur les réseaux sociaux, à l’exception de ceux spécialisés sur le vin. « Si on revoit la loi Évin, ce sera pour la durcir. Attention à l’effet boomerang ! », réagit à son tour Samuel Montgermont. Addictions France aimerait que le logo de la femme enceinte soit plus gros. Et qu’il y ait plus d’infos sur l’étiquette sur la composition du produit, en plus des sulfites. L’association, dont le rôle très louable est d’aider les Français à se sortir de leurs addictions, a du pain sur la planche. Tabac, cannabis, cocaïne, crack, héroïne et addictions sans substances (jeux de hasard et d’argent, jeux vidéo, écrans, internet ou encore addictions alimentaires ou au sexe), l’alcool est loin d’être le seul danger à combattre. Curieusement, les boissons sucrées et ultra caféinées qui inondent nos écrans sans limite ne sont pas mentionnées. Red Bull et Coca Cola semblent avoir la vie devant eux.

Ce que dit la loi Évin
Elle mentionne ce qui est autorisé. Tout le reste étant, par définition, interdit. Sont autorisés la pub dans la presse écrite (sauf dans les revues destinées aux enfants), à la radio à des horaires précis, les affiches dans les zones de production, les catalogues et brochures des professionnels et certains sites internet non destinés aux mineurs.
Les pubs au cinéma et à la télévision ne sont pas mentionnées, donc interdites. La mention « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération » doit être parfaitement lisible, à l’horizontale, sur les objets publicitaires, les affiches et affichettes. Seuls des professionnels peuvent apparaître dans les films, vidéos et images publicitaires. Impossible aussi d’évoquer la fête, le glamour, le sexe, la joie, la sensualité, l’extase et compagnie. Le message publicitaire ne doit en aucun cas inciter à la consommation. Le parrainage est banni et alcool et sport ne peuvent être associés d’aucune façon. Depuis son adoption, retenons deux dates : 2009 avec l’avènement d’internet, support autorisé avec un contrôle sur l’âge (la vente d’alcool étant interdite aux moins de 18 ans) et 2015
et son « assouplissement » visant les contenus liés à l’œnotourisme. Les producteurs peuvent parler de terroirs, de patrimoine culturel, de gastronomie ou encore des « caractéristiques œnologiques » de leurs vins. Les contrevenants risquent 75 000 euros d’amende ou 50 % du montant des dépenses consacrées à l’opération en cas d’illégalité.

Jean-Sébastien et Henry Marionnet, la noblesse des marges


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Fils aîné de celui à qui l’on doit l’un des tout premiers vins sans soufre de la vallée de la Loire, bien avant que le mot même de « nature » n’érige ses redoutables murailles, Jean-Sébastien Marionnet apparaît comme le dépositaire secret d’un héritage qui n’aura jamais été sanctionné d’aucune médaille. « Mon grand-père a créé le domaine sur les terres de ma grand-mère. À la suite de la crise du phylloxéra, il a choisi l’une des deux voies qui s’offraient alors aux viticulteurs de l’époque, celle des vignes américaines améliorées, afin de produire des rosés sucrés, et la culture des asperges », raconte-t-il d’un air amusé. Un pragmatisme paysan qui permettra à ce petit domaine du Loir-et-Cher, perdu dans cet orient tourangeau, de traverser la première moitié du siècle, jusqu’à l’essoufflement de l’après-guerre. C’est à ce moment-là qu’un tournant s’impose. Henry Marionnet est sommé de quitter les bancs de l’école sur injonction paternelle afin de reprendre les rênes de l’exploitation, tandis que ses deux frères auront quant à eux la chance de poursuivre de brillantes études. Le jeune homme n’est manifestement pas du genre à se satisfaire de demi-mesures : dès les années 1960, il arrache, replante, redessine entièrement le vignoble. « Mon père a mis plus de dix ans à reconstituer le domaine, en replantant du sauvignon et du gamay noir, jusqu’à atteindre 50 hectares de plantation. Et ce, à rebours de ce qui se pratiquait alors dans la région, qui restait sur des hybrides et dans une logique de rendement. » Ce gamay, Henry choisira de l’interpréter autrement. Sans formation académique, il va se forger un savoir empirique, visitant la Bourgogne, le Beaujolais, échangeant avec Marcel Lapierre et Jules Chauvet, « dont il m’a toujours dit que les vins n’étaient pas bons », précise Jean-Sébastien. Dès 1973, il adopte la vinification en grappes entières pour les rouges. Une approche précoce et instinctive, bien avant que le mouvement nature ne fasse école. « Mon père n’a jamais cherché à suivre une mode. Il croyait en son goût. » Preuve en est, en 1990, Henry Marionnet signe Première Vendange, l’un des tout premiers rouges sans soufre ajouté du Val de Loire. À l’époque, il s’agissait simplement de prolonger la pureté du fruit, sans dogme ni étendard. Côté distribution, il a pu compter sur le réseau de restaurateurs et cavistes parisiens patiemment développé par la génération précédente. « Mon grand-père avait réussi à trouver son public, auprès de personnes sensibles à des vins qui apparaissaient déjà comme différents. »

Protéger une identité forte
Lorsque Jean-Sébastien Marionnet revient au domaine en 2000, après un parcours chaotique dans l’Éducation nationale et un passage salvateur à Beaune, l’évidence s’impose. « J’ai goûté mes premiers grands bourgognes alors que j’avais 15 ou 16 ans », se souvient le vigneron. « J’ai compris très vite si un vin était bon ou mauvais. Beaune a été une révélation. » Titulaire d’un BTS viti-oeno, il multiplie les stages – Alphonse Mellot à Sancerre, Vincent Girardin et Génot-Boulanger à Meursault, puis l’Afrique du Sud et l’Australie – avant de revenir dans le Loir-et-Cher, convaincu d’avoir fait le bon choix. « J’ai découvert l’ambiance vigneronne, et surtout l’éclosion d’une véritable passion. » En matière de transmission, le passage de relais coule de source. « Cela s’est fait sans aucun conflit. J’ai la chance d’avoir des parents très intelligents. Mon père et moi goûtons de la même façon, ce qui nous a permis de toujours aller dans le même sens. » Ensemble, ils défendent une viticulture d’instinct, sensible et peu interventionniste. À la vigne, les rendements sont limités et les vendanges manuelles restent la règle. En cave, la philosophie est claire : égrappage, pressurage doux, débourbage à froid, puis élevage en cuves souterraines carrelées de faïence, creusées par Henry dans les années 1970. « À l’époque, c’était pour gagner de la place. Mais on a découvert que cela offrait un véritable éclat et préservait la délicatesse des vins. » Un millésime après l’autre, Jean-Sébastien entend conserver pour chacun des cépages cultivés sur le domaine une identité commune. « Je veux réaliser des vins purs, remplis de fruits, digestes, avec de la rondeur. Qui sentent véritablement le raisin, en somme, dans la mesure où il n’y a aucun corps étranger. » Aucun passage en barriques, donc, et pas de maquillage œnologique. Ses sauvignons conservent cette tension crayeuse, sans caricature variétale ni relents d’exotisme. « Je n’aime pas les sauvignons thiolés, aromatiques, caricaturaux. C’est un cépage très clivant, qui a toujours eu une presse mitigée. À Sancerre, personne ne parle jamais de terroir ou du cépage, on dirait qu’ils en ont honte. À l’inverse, quand vous goûtez les vins des stars, ils sont complètement décharnés, comme s’ils voulaient casser le cépage afin d’en faire ressortir le terroir. C’est encore une autre caricature. Moi, je suis entre les deux. »
En marge de ses sauvignons, Jean-Sébastien Marionnet ne cache pas son faible pour le romorantin, cépage historique de la vallée de la Loire, dont le domaine détient encore de précieux spécimens préphylloxériques, longuement élevés en cuve puis en bouteille. Un choix coûteux, mais hautement stratégique, pour un vin souvent abordé trop tôt, bien avant qu’il ne puisse révéler son plein potentiel. « Nous sommes en train de commercialiser les 2020. Jeunes, il est indispensable de les carafer, et l’on oublie souvent qu’il s’agit de grands vins de garde. J’ai ouvert tout récemment un millésime 2000 fabuleux, mais qui le sera encore davantage dans vingt ans. » Aux côtés des six hectares de francs de pieds sur cinq autres cépages, dont de rares gamays de bouze qu’ils auront longtemps été les seuls à vinifier au sein de la région, Jean-Sébastien produira bientôt pour la première fois une cuvée de pinot noir en grappes entières. « Un cépage passionnant », s’enthousiasme le vigneron, dont le visage s’assombrit lorsque nous l’interrogeons sur la crise qui secoue actuellement le monde du vin. « Le contexte économique n’épargne personne. Depuis le Covid, rien n’est revenu à la normale. La consommation baisse, surtout en restauration. Dans quelques années, je pense qu’un quart du vignoble français va disparaître », prédit-il avec une certaine mélancolie. « Aujourd’hui, ma seule ambition est de faire de bons vins et de transmettre. » Si ses deux enfants sont encore trop jeunes pour garantir une relève, ils auront été à bonne école en développant leur nez sur les cuvées paternelles. « Ma fille est championne d’équitation et n’envisage pas de suivre ma voie. Mon fils est plus jeune, mais il goûte déjà, s’intéresse, se questionne. Nous venons de célébrer les 84 ans de mon père et encore aujourd’hui, je me réjouis d’être ici, et pas à La Défense derrière un bureau. Vigneron, c’est un métier physique. Mais c’est surtout une grande fête. » 

Décès d’Éric Hénaux, directeur général de Tutiac

C’est avec tristesse que les vignerons de Tutiac ont annoncé le décès d’Éric Hénaux, leur directeur général de 2008 à 2013 puis 2016 à 2025, survenu le 21 juin 2025 à l’âge de 56 ans. Diplômé de l’École d’agronomie de Purpan, Éric Hénaux a marqué de son empreinte le vignoble bordelais durant plus de quinze ans à la tête de la coopérative. « Nous avons formé un duo essentiel au pilotage et au développement de notre coopérative. Son dynamisme contagieux, sa créativité quotidienne ainsi que son engagement sans faille resteront durablement inscrits dans l’histoire de notre entreprise et dans nos mémoires », déclare Stéphane Héraud, le président des Vignerons de Tutiac

Sous son impulsion, Tutiac a connu plusieurs transformations majeures, comme la création d’un site moderne de mise en bouteille à Marcillac, les fusions stratégiques avec les caves de Sauternes, Lugon et Gauriac, et une ouverture commerciale vers la grande distribution et les marchés internationaux. Il laisse un héritage fort et durable.

A sa famille, à Stéphane Héraud, le président de Tutiac et à l’ensemble des équipes de Tutiac, Bettane+Desseauve présente ses plus sincères condoléances.

Hakkaisan, des sakés façonnés par la neige

La localisation de la brasserie au pied du mont Hakkai n’a rien d’anodin. La région est célèbre pour ses hivers rigoureux et ses abondantes chutes de neige. Ce climat extrême, loin d’être un obstacle, est en réalité un atout majeur dans la production de saké. La neige fondue génère une eau d’une pureté rare, à la douceur inégalée. Acheminée directement par pipeline depuis le pied de la montagne jusqu’au cœur du kura (la brasserie), cette eau cristalline devient l’élément fondateur des sakés Hakkaisan. Elle incarne la minéralité, la fraîcheur et l’authenticité de ce terroir si particulier.

Le mont Hakkai.

Mais l’eau seule ne suffit pas à faire un grand saké. Le choix des variétés de riz est tout aussi crucial. Hakkaisan sélectionne avec exigence les meilleurs grains, dont les prestigieux Yamadanishiki et Gohyakumangoku. Ces riz, aux propriétés idéales pour la fermentation, sont soigneusement polis avant d’être travaillés avec rigueur et précision par le maître toji de la maison, Masatoshi Murayama. Véritable artisan du goût, il veille à chaque étape de la production, tel un chef d’orchestre soucieux de la moindre nuance.

La brasserie Hakkaisan sous un épais manteau de neige.

Héritage familial
Depuis sa création, Hakkaisan défend une vision exigeante du saké, où chaque bouteille est le fruit d’un dialogue permanent entre passé et présent. Si la maison est réputée pour la constance et la qualité de ses cuvées, elle n’hésite pas à innover, en adoptant de nouvelles techniques de brassage ou en adaptant ses produits aux goûts des consommateurs actuels. Cette capacité à évoluer tout en respectant les fondements fait d’Hakkaisan une brasserie résolument contemporaine.

Aujourd’hui dirigée par Masato Nagumo, représentant de la troisième génération, la brasserie continue de faire rayonner la philosophie de ses fondateurs à travers le monde. Héritier de son père Jiro et de son grand-père Masahito, Masato incarne un subtil équilibre entre attachement aux traditions et ouverture à l’innovation. Sous son impulsion, Hakkaisan s’ouvre de plus en plus à l’international, tout en conservant une production artisanale profondément enracinée dans les valeurs du pays du Soleil-Levant.

Masato Nagumo.

Style unique
Les sakés de cette brasserie japonaise, élégants, fins et accessibles, séduisent aussi bien les amateurs avertis que les néophytes. Hakkaisan est avant tout un style « haute couture », tant le souci du détail, la précision et la recherche de l’équilibre sont omniprésents. Sous la direction du maître toji Masatoshi Murayama, chaque étape, du polissage du riz à la fermentation, en passant par la préparation du kôji, est exécutée avec une attention extrême. La maîtrise des conditions de température et d’humidité, la dégustation permanente des cuves et les ajustements constants permettent de garantir une qualité et une constance exemplaires.

Hakkaisan propose une gamme de sakés d’exception, véritables bijoux d’équilibre et de subtilité. Parmi eux :

  • Awa Hakkaisan : un saké pétillant raffiné, frais et crémeux. (Disponible à la Maison du saké)
    Junmai Daiginjo Kongoshin : fleuron de la maison, plus poli ; il se distingue par ses arômes floraux et printaniers.
    Tokubetsu Honjozo : alliant finesse et accessibilité, c’est le saké le plus consommé au Japon. Il peut être servi frais ou tiède (env. 45 °C) pour accompagner une dorade ou des crustacés. Chauffé, le saké révèle des arômes racinaires et une belle puissance en bouche.
    Junmai Daiginjo Yukimuro : vieilli trois ans en chambre froide naturelle (snow-aged). Yukimuro est une glaciaire traditionnelle japonaise, modernisée par la maison Hakkaisan pour faire vieillir le saké à 3,7 °C grâce à 1 000 tonnes de neige.
    Daiginjo : incarnation de la précision et de l’élégance.
    Kasutori Shochu Yoroshiku Senman Arubeshi : spiritueux distillé issu du marc de saké.

La Méditerranée de A à Z


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A comme Assemblage
Même si elle souffre d’exceptions, la tradition originelle des vins du Sud est de se construire à partir de cépages complémentaires. Cette pratique de l’assemblage – marketée dans d’autres continents sous l’acronyme en rouge de « GSM », pour grenache-syrah-mourvèdre – correspond d’abord à une adaptation intelligente et pragmatique aux conditions climatiques de la région, les caractéristiques stylistiques et agronomiques de chaque cépage se complétant souvent. Mais les vignerons les plus talentueux ont su affiner leurs assemblages, associer à des cépages qu’on qualifiait autrefois « d’améliorateurs » (la syrah, le vermentino ou rolle, etc.), parfois aussi des variétés qualifiées d’internationales (les cabernets, le chardonnay, le sauvignon) des cépages autochtones comme évidemment le grenache et le mourvèdre, mais aussi le cinsault, la clairette et bien d’autres pour éviter l’écueil habituel d’une standardisation des vins.

B comme Bandol
Quelques sites méditerranéens, rares, ont su émerger plus tôt que les autres, en des temps où l’image de marque des vins produits dans ces régions n’était pas flatteuse. C’est le cas de Bandol, merveilleux terroir provençal et berceau d’un cépage capricieux mais brillant, le mourvèdre. L’époque a aujourd’hui changé et de nombreux autres terroirs intéressants ont émergé. Mais cette prééminence historique engage l’appellation à maintenir fièrement sa personnalité unique.

C comme Cépages
Dans notre pays d’impénitente administration, on a souvent voulu opposer les cépages dits internationaux – entendez, selon vos convictions, sans authenticité ou gage autoproclamé de succès commercial – aux variétés « méditerranéennes », quitte à avoir une vision large de la Méditerranée en plaçant par exemple la syrah du nord de la vallée du Rhône dans la catégorie : IGP et « vins de France » pour les cabernets, pinots et chardonnay ; AOC pour les grenaches, syrah ou mourvèdre. Cette catégorisation, vaguement compréhensible quand il fallu restructurer le vignoble dans les années 1970 et 1980, n’a plus de sens aujourd’hui.

C comme Coopérative
La coopération fait partie du paysage languedocien, mais aussi rhodanien, provençal et corse. C’est un acteur majeur, autant par son poids économique que par sa dimension sociologique. Quel que soit le niveau qualitatif des caves (qui navigue aujourd’hui selon l’opérateur et le secteur viticole entre l’excellent et le banal, mais de plus en plus rarement le médiocre), les volumes produits et traités par la coopération influent sur les tarifs des appellations et des vins et, partant, sur l’image et la réputation de ceux-ci. L’aménagement du territoire, et la survie de nombreux villages méditerranéens, est l’autre aspect fondamental de la question, trop rarement mis en avant. Certaines caves, ou groupements de caves, ont réussi à faire leur mue stylistique et commerciale. Beaucoup d’autres tentent de se construire un avenir entre recherche d’autonomie, de plus en plus vaine, et partenariats avec de grands opérateurs installés ou émergents.

C comme Corse
La Corse n’est pas seulement une île paradisiaque habité par un peuple fier de son insularité, c’est aussi une terre de grands vins. Dans un monde du vin en transformation, la Corse possède une actualité brillante et un avenir plus prometteur encore, avec une grande diversité de terroirs, une richesse ampélographique qui ne demande qu’à être explorée et une variété de production qui pourrait se renouveler au-delà de la suprématie commerciale actuelle du rosé.

D comme Douceur
Ce fut autrefois la grande fierté d’une bonne partie des vignobles méditerranéens, Roussillon en premier lieu, mais aussi Languedoc, sud de la vallée du Rhône et Corse : les vins doux, souvent de muscat en blanc et de grenache en rouge, ont connu une longue gloire puis un lent déclin. À l’heure de la mixologie triomphante, les banyuls, rivesaltes et autres muscats peuvent peut-être aujourd’hui s’inventer un nouvel avenir, pour peu que l’innovation soit en marche…

G comme garrigue
Le paysage méditerranéen par excellence trouve à l’heure de l’agroforesterie une actualité renouvelée : la plupart des vignobles de Provence, de Corse ou du Languedoc s’intègrent, depuis toujours, dans un écosystème naturellement diversifié. Les océans de vigne, en Méditerranée, on ne connaît pas.

G comme Gastronomie
Puisant racines et recettes dans la diversité de la production agricole locale, la ou plutôt les gastronomies de l’ensemble du bassin méditerranéen sont extrêmement savoureuses et variées. Toutes ont cependant un point commun, quels qu’en soient l’origine géographique et le mode de consommation, de la « street food » jusqu’au repas de fête : celui de toujours s’accorder aux vins, rouges autant que rosés ou blancs. En cette époque de déconsommation alarmante, c’est un aspect que l’on aurait tort de négliger.

G comme Grenache
Longtemps, le grenache fut considéré comme un cépage secondaire. Qu’importe que le provençal Châteauneuf lui accorde, certes avec douze autres comparses, une part majeure de son impressionnante authenticité, que les grands vins doux du Roussillon en soient composés, ses rendements trop facilement généreux, sa supposée faiblesse tannique, ses couleurs peu foncées, sa propension à l’oxydation, tout cela construisait un profil généreux mais sans race. Depuis le début de ce siècle, c’est peu de dire que son image a été prodigieusement transformée. Pour peu que l’on maîtrise sa proverbiale générosité, ce qui n’est pas chose facile en ces temps de réchauffement climatique, le cépage allie comme personne nuances aromatiques, finesse de texture et gourmandise suave. Il ne réussit pas partout, mais s’il existe un cépage méditerranéen identitaire, c’est bien lui.

H comme Histoire
Les archéologues penchent pour des régions plus lointaines – la Géorgie, l’Arménie – pour situer les origines de la vigne, mais à coup sûr, la Méditerranée fut le berceau de la civilisation du vin. Elle en reste aujourd’hui un centre essentiel, malgré le développement au Moyen Âge de la viticulture des ordres religieux, rhénane et bourguignonne, malgré le développement spectaculaire des vignobles boostés par l’activisme commercial anglais, Bordeaux ou Porto par exemple, malgré enfin l’émergence spectaculaire des vignobles du Nouveau Monde au cours du siècle dernier.

I comme Identité
Il n’existe pas une identité des vins méditerranéens, mais d’innombrables, et il serait vain de vouloir les caricaturer d’un seul mot ou de quelques-uns. Qu’y a-t-il de commun entre la rigueur structurale des cabernets de Bolgheri, la rondeur enveloppante d’un grenache du Roussillon ou les épices poivrés d’un bandol ? Pas grand-chose, sinon l’affirmation d’un caractère. La région fut longtemps la terre de production de vins anonymes, elle s’affirme aujourd’hui comme le garant de la personnalité et de la diversité.

J comme Jardin
Le littoral méditerranéen est un vaste jardin, sauvage par endroits, méticuleusement organisé à d’autres. La vigne fait partie du paysage, mais elle est très rarement seule. Elle compose avec une nature touffue et multiple, où règnes végétal et minéral sont harmonieusement partagés, où d’autres plantes vivrières donnent depuis des millénaires leurs fruits. Ne négligeons pas ce jardin enchanté, ne le détruisons pas : il est notre histoire, nos racines, notre âme.

L comme Languedoc
Dans sa très longue et riche histoire, le Languedoc a tout connu, la richesse comme la misère, le rêve comme le désespoir, la créativité comme la routine. Région presque entièrement vouée à la seule viticulture lorsque l’invention du train amena nos provinces à spécialiser leurs productions, le Languedoc fut le pays qui eut le plus gros effort à faire pour restructurer une industrie fondée sur une production de gros volume destinée à une consommation de masse. En cinquante ans, ce gigantesque challenge a été réalisé sur de multiples plans, tant sur ceux des structures que sur ceux des marchés. Tout n’est pas encore parfait ni achevé, mais le Languedoc est aujourd’hui un vignoble moderne, conçu pour produire des vins de qualité et capable de s’adapter rapidement aux évolutions de marché.

L comme Liberté
Même quand ils n’offrent pas la version la plus originale de leur personnalité, presque tous les cépages peuvent s’implanter dans le bassin méditerranéen. Pourquoi faut-il donc les classer administrativement dans diverses catégories d’AOC, d’IGP ou désormais de « vins de France », quitte à tordre les usages historiques, à placer la syrah rhodanienne dans le camp de l’authenticité des appellations et le cabernet-sauvignon pourtant présent en Provence depuis le XIXe siècle dans celui des IGP ou des cépages « de complément » forcément minoritaires dans un assemblage ? Dans le bouleversement de l’époque, ne pourrait-on pas laisser tomber une bonne fois pour toutes des réglementations plus politiques que naturelles, plus temporelles qu’historiques, et apporter aux créateurs et aux entrepreneurs le grand souffle de la liberté ?

M comme Mistral
Ensoleillé, chaud et sec, tel est le climat méditerranéen. Mais aussi venteux. Mistral dans la vallée rhodanienne et sur le littoral, tramontane en Roussillon, le vent qui souffle ici est fort et froid. Depuis toujours, il joue un rôle essentiel pour la viticulture. Assainisseur des raisins, garant des amplitudes thermiques entre nuit et jour, limitant drastiquement les risques de pourriture par temps humide, le mistral est depuis toujours l’allié fidèle de la vigne.

M comme Muscat
Le viognier est à la mode, pourquoi le muscat ne la retrouverait-il pas ?

N comme Nouveaux Vignerons
Tous les vignobles réputés ont une caractéristique commune, ils attirent de nouveaux vignerons qui, souvent, développent de nouvelles idées et de nouvelles structures de production. La plupart des secteurs de la Méditerranée viticole n’échappent pas à cette règle régénératrice, mais avec des profils très différents. Les « tickets d’entrée » ne sont pas les mêmes qu’il s’agisse d’une Provence (en particulier littorale) idéalisée dans le monde entier, une Corse bien plus protectrice de ses acteurs locaux et un Languedoc-Roussillon toujours en reconstruction structurelle. Ce sont des acteurs puissants – grandes fortunes et grands groupes – qui donnent aujourd’hui le la de la viticulture provençale alors que l’évolution du Languedoc et du Roussillon s’est faite avec des francs-tireurs passionnés et farouchement indépendants tout autant qu’avec des entrepreneurs du cru ayant spectaculairement bouleversé un modèle familial d’un autre temps. Au final, l’innovation des uns, la puissance d’autres et les racines de ceux qui sont là depuis toujours construisent un mélange plutôt rare dans le monde du vin et assurément très positif.

O comme Oliviers
La polyculture est une tradition séculaire de la Méditerranée et les Toscans l’ont parfaitement symbolisée en associant quasi systématiquement une production d’huile d’olive à celle de vin. Sauf dans certains secteurs, la France méditerranéenne n’a pas la même tradition de l’olivier, mais elle peut s’inspirer de cet exemple pour réassocier à son activité viticole d’autres facettes donnant une dimension holistique à l’entreprise. Certains le font avec une activité œnotouristique, d’autres, plus rares, avec des projets de polyculture, mais la quête de sens est un aspect fondamental de la civilisation du vin.

P comme Provence
Une Provence viticole à la croisée des chemins, c’est pour le moins le constat que l’on peut faire aujourd’hui. Depuis le début des années 2000, la production de rosé est devenue un moteur essentiel de son développement, initiant d’ailleurs une évolution que l’on comprend mieux aujourd’hui : moins de vins rouges accompagnant les repas traditionnels, plus de rosé, de blanc et de bulles pour des moments de convivialité. Cette transformation glamour a attiré de nouveaux investisseurs, à commencer par l’omniscient LVMH. Maître du jeu contemporain, le groupe ne saurait pour autant reproduire la stratégie et les méthodes qui ont fait son succès à Cognac et en Champagne. L’époque a changé et les marchés aussi. En attendant, reste une myriade de vignerons qui réinventent, chacun à leur façon, une région beaucoup moins uniforme qu’on ne l’imagine souvent.

Q comme Qualité
Aucune autre région de France n’a autant progressé en qualité moyenne que l’ensemble du bassin méditerranéen. C’est même, quand on y réfléchit rétrospectivement, une évolution qui était incroyable à envisager à la fin du siècle précédent. Cela n’empêche pourtant pas une partie du public et une majorité, hélas, de professionnels, surtout dans l’Hexagone, de placer toujours ces vins dans un second rideau de hiérarchie : voilà bien le vrai défi de ces prochaines années.

R comme Rosé
Il domine aujourd’hui la production provençale, y compris dans des appellations réputées historiquement pour leur rouge comme Bandol, mais aussi languedocienne ou corse. Le rosé s’est taillé une part de lion, avec d’autres codes que ceux qui ont régi les vins de qualité depuis des décennies. Plutôt que vouloir analyser les multiples causes de ce raz-de-marée et sa capacité à durer, contentons-nous de relever deux aspects significatifs. En premier lieu, grâce au rosé, les vignobles de la Méditerranée sont entrés dans un autre univers de consommation, et même un autre imaginaire que ceux où on les enfermait. Le rosé, avec vingt ans d’avance, annonce également le grand bouleversement de consommation des vins, moins axé sur les rouges voués à l’accompagnement exclusif des repas, plus ouvert sur d’autres moments et sur d’autres modes, où rosé, mais aussi rouges légers, vins orange, blancs, bulles et sans alcool auront leur place.

S comme Salinité
Curieusement, la fraîcheur, la tension, la minéralité, la salinité ont longtemps été des mots absents du vocabulaire organoleptique des vins de la Méditerranée. Cela a été le combat personnel de certains producteurs de faire entrer ces mots dans le profil de leurs vins ; cela reste un enjeu majeur à l’heure du dérèglement climatique.

S comme Syrah
Et si ce cépage bien installé sur les contreforts granitiques ou schisteux du Massif central, à flanc de coteaux dominant un fleuve alpestre, le Rhône, à 250 kilomètres du littoral, n’était pas tout à fait chez lui en Méditerranée ? On l’a pourtant planté (presque partout), le considérant toujours comme un cépage « améliorateur », oubliant presque toujours qu’il offre souvent, au sud du 45e parallèle, une version convenue de ses qualités, ses notes de confiture de mûre et de chocolat, ses tannins enrobés, mais souvent asséchants en finale et sa prise de bois flatteuse et finalement caricaturale. La syrah joue certainement un rôle d’appoint intéressant dans la construction multi-cépages des vins de Méditerranée, mais elle n’est assurément pas une recette miracle du succès.

T comme Terroir
Le terroir méditerranéen demeure encore largement méconnu parce que l’on fait fi de son immense diversité. C’est le présupposé climatique – ensoleillement maximal, faibles pluies, souvent sécheresse, chaleur des étés – qui domine la compréhension des vignobles et unifie, faussement, un territoire vaste et complexe. De fait, la variété est partout : géologie, géographie (de la mer à la montagne, le plus souvent à quelques kilomètres de distance), expositions, microclimats, pratiques historiques, encépagements et même vision de l’activité, aucun autre bassin viticole n’est aussi riche de terroirs différents.

U comme Universalité
La vie en Provence fait rêver le monde entier. Le vin de Provence, pas encore.

V comme Vermentino
Comme la syrah pour les rouges, le vermentino – qu’on appelle aussi rolle en Provence et vermentinu en Corse – a été vu il y a une trentaine d’années comme une recette miracle pour relever le paysage alors désastreux des blancs du sud-est de la France. Contrairement à la syrah, ce cépage a pour lui d’être natif et adapté au terroir méditerranéen. S’il n’échappe pas à quelques caricatures pataudes, il a produit nombre de réussites convaincantes et surtout redonné une nouvelle ambition en matière de vins blancs aux vignerons locaux.

W comme Winemaker
Plus que partout ailleurs, les catégorisations traditionnelles de production ont pollué l’évolution des vignobles méditerranéens. En marquant souvent une opposition systémique entre vignerons, coopératives et négociants, les acteurs du monde viticole (en Languedoc-Roussillon en particulier) rappelaient certainement une vérité historique émancipatrice, mais perdaient du temps quant aux véritables enjeux de l’époque. Pis encore, de nombreux prescripteurs professionnels, cavistes, sommeliers, journalistes, persistent à mépriser le travail d’un négoce pourtant moteur du renouveau de ces régions, à sous-estimer la coopération et à célébrer uniformément le small is beautiful  censé être la règle des vignerons. Pour le coup, la notion anglo-saxonne de winemaking, quel que soit le pedigree du producteur, se révèle bien plus pertinente pour jauger l’évolution actuelle du secteur.

X comme Xérès et autres vins étonnants
Élargissons un instant notre dictionnaire à l’ensemble du bassin méditerranéen : des notes de noix des xérès à celles de safran des muscats du Cap Corse, des merveilleux épices des soleras de Banyuls aux fruits mûrs des vins de la Bekaa, quelle autre région du monde peut se targuer d’une telle variété de saveurs, mais aussi de styles et de savoir-faire viticoles ?

Y comme Yacht
Même si les ports de plaisance du littoral sont encombrés de yachts aussi spectaculaires que m’as-tu-vu, la Méditerranée n’est pas un paradis pour riches. Elle est aussi la mer des grandes migrations et de ses drames. Elle est, depuis l’Antiquité, le cœur battant de la civilisation. Et, depuis cette même Antiquité, le vin en est un symbole, un commerce, un art de vivre, un bonheur.

Z comme Zeste
Comme la minéralité, les agrumes et à fortiori leur zeste ne faisaient pas partie de l’imaginaire méditerranéen il y a quelques années. Ils sont d’abord arrivés dans celui-ci par le biais pour le moins caricatural des arômes de pamplemousse (que les œnologues appellent thiols) qui se sont imposés dans nombre de rosés, remplaçant les non moins grossières notes de bonbon à la fraise ou de vernis à ongle. Mais ils composent aujourd’hui les bouquets de plus en plus complexes et diversifiés des blancs et rosés méditerranéens, s’intégrant à une palette de saveurs et d’arômes brillamment complexe.