Bernard Magrez et Joël Robuchon vont ouvrir ensemble un hôtel de luxe à Bordeaux. Plus précisément,
l’accord qu’ils viennent de signer prévoit l’aménagement d’une maison commune L’Hôtel de Bernard Magrez – Joël Robuchon Restaurant. La nouvelle est assez réjouissante de voir s’unir tant de châteaux et domaines, Bernard Magrez en possède quarante à travers le monde, dont quatre grands crus classés du Bordelais,
et tant d’étoiles, vingt-huit au guide Michelin, un record.
Les deux hommes ont beau se croiser souvent à Macao, Tokyo, Hong Kong ou New York, c’est à Bordeaux au printemps dernier que leur projet est né, alors que Bernard Magrez recevait les négociants bordelais dans le grand salon de sa fondation au château Labottière. Juste en face, il n’y a que la rue à traverser, un ancien hôtel particulier 1900 leur a donné cette idée d’associer le verre et l’assiette et un accord de gré à gré a été conclu dans l’instant,
à la manière d’autrefois entre gens d’honneur et de parole, scellé par un amical «tope-là ».
L’ouverture de cet ermitage fait pour la gourmandise et la sérénité (six suites et un restaurant gastronomique d’une cinquantaine de couverts) est prévue pour juillet prochain. Le chef promet que « le restaurant sera luxueux mais sans chichi ni cérémonial imposant, on s’y sentira bien. Quant à la cuisine, animée par une brigade de trente personnes, nous allons privilégier les produits du terroir et en tirer le meilleur. L’important dans notre métier, est
de rendre la simplicité exceptionnelle. Un art difficile. La cuisine sera bien sûr au niveau trois étoiles mais c’est au Michelin seul qu’il appartient de décider. » A Bordeaux, on attend depuis longtemps que le vin retrouve enfin un égal, son commensal. Les derniers accords mets-vins trois-étoiles, au mythique Chapon Fin, datent de 1939.
Qu'est-ce qu'on fait l'été prochain ?
Héraclès et Arès au tribunal
Les noms ont beau changer, le Tribunal de commerce de Paris (qu’on pourrait surnommer Athena, histoire de rire un peu) ne tremble pas devant ces grandes figures de la mythologie grecque. Après 1855.com (rebaptisé Héraclès), c’est l’autre site de vente en ligne du groupe 1855, chateauonline.fr, qui a été placée en redressement judiciaire,
le 22 octobre dernier. Racheté en 2011 par 1855, la société a récemment changé de nom pour prendre celui d’Arès. On en apprendra plus ici grâce au beau travail de Jérôme Baudoin à la RVF.
Mise à jour du 31 octobre 2013 :
Prison en vue ? Les précédentes affaires de ce genre, toujours par Jérôme Baudouin (RVF).
La Chine et les marques : le procès Castel
Au début du mois d’octobre, Castel s’est vu remettre le Prix du public chinois des vins les plus populaires
par la Confédération des organes de presse du secteur œnologique chinois. Cette grande popularité est la partie positive des aventures chinoises de l’entreprise, qui a été condamnée en juillet dernier par la Cour populaire supérieure de la province du Zhejiang à verser une indemnité de 34 millions de yuans (5,6 millions de dollars)
à la société Panati Wine pour atteinte à sa marque « Ka Si Te ».
Pour défendre son nom et faire prévaloir ses droits, l’entreprise Castel a déposé une demande en réexamen
devant la Cour suprême chinoise. Son pourvoi, fondé sur des erreurs manifestes et un manque d’objectivité
dans le jugement, a été enregistré le 8 août 2013.
Il a par ailleurs été découvert que deux sociétés détenues par
Li Daozhi, le directeur général de Panati Wines, ont à ce jour enregistrées plus de 171 noms de marques de vin,
dont la plupart correspondent à des traductions en chinois de marques de vin célèbres ou de régions viticoles situées en France, en Espagne et en Australie. Il a également déposé en caractères chinois la marque « Kasite Changyu jiuzhuang » alors que Castel et Changyu sont les actionnaires du Château Changyu-Castel, qui se dit
« Changyu Kasite jiuzhuang » en chinois. Le conflit opposant Li Daozhi à Castel est donc toujours en cours.
Fondée en 1949 par neuf frères et sœurs (et non en 2008, comme le raconte cet article traduit du chinois), l’entreprise familiale Castel est aujourd’hui le premier producteur de vin français, et le troisième au monde
(en volume). L’entreprise a optimisé un développement à la fois vertical et horizontal dans tous les métiers
du vin, de sorte qu’elle est aujourd’hui propriétaire, récoltant, vinificateur, éleveur, négociant, embouteilleur
et distributeur (propriétaire du réseau de cavistes Nicolas). Elle exporte en moyenne chaque année en Chine
près de 20 millions de bouteilles de vins français.
La Ferme des Lices, une verticale allongée
Il y a quelques années, j’ai rencontré Laurence Berlemont. Elle venait de créer
la Ferme des Lices, le seul vignoble privé sur la commune de Saint-Tropez.
Une histoire épatante, une sorte de fédération de propriétaires de vignes,
elle avait repéré ce terroir de résidences secondaires, elle a su convaincre les vacanciers et elle fait de beaux vins bien connus sur le littoral, moins à Paris. Que font les cavistes ?
La Ferme des Lices produit du rouge, du blanc, du rosé.
Là, je me suis intéressé aux blancs dans six millésimes consécutifs. Une verticale, mais allongée dans le temps. Ces vins ont été bus à table sur une période de près de six mois, du début du printemps au début de l’automne 2013. Les voici dans l’ordre chronologique décroissant qui n’est pas celui dans lequel j’ai bu ces vins.
Ferme-des-lices 2011
Lui, il n’a pas eu de chance. Bu au restaurant dans des verres à dents. Un restaurant où tu dois apporter ton vin, le patron est musulman, il ne sert pas de vin, il n’a pas de verres, il ne sait pas, on ne peut même pas le lui reprocher. Pour le nez de ce 2011, on verra un autre jour, une autre bouteille. En bouche, on est dans le Sud, immédiatement. Un très jeune Sud, le vin n’est pas encore en place. « Il est fuyant » dira l’une des convives, « il n’a pas d’âme » dira l’autre. C’est le problème de dîner avec deux filles. Il y a surenchère dans le teigneux (ici, smiley pour dire que c’est pour rire, on n’est jamais trop prudent). Les verres à dent ne l’aident pas, mais on sent du potentiel au fur et à mesure que la température du vin s’élève. À revoir.
Ferme-des-lices 2010
Une attaque d’agrumes qui se transforme en quelque chose de plus chaud, de plus ample. Un vin du sud sans la…lire la suite
La très bonne santé du vin
Le département des statistiques et des études économiques de la Direction générale des douanes et droits indirects vient de publier une étude statistique * (dans Etudes et éclairages n°43) consacrée aux exportations françaises de vin (hors champagne). Pour aller à l’essentiel, leur montant (record) s’élève à 5,6 milliards d’euros
en 2012. Sachant que les importations de vin représentent 0,6 milliards d’euros cette même année, l’excédent commercial, en hausse d’environ 9 % par an – en valeur – entre 2009 et 2012, s’élève à 5 milliards d’euros. Conséquence de la hausse du prix moyen comme des quantités exportées, + 6 % en moyenne par an dans
les deux cas.
Très touchés lors de la crise de 2009, les vins « haut de gamme » (dont le prix au litre est supérieur
à 20 euros) sont le principal moteur de cette croissance des ventes à l’international et représentent en valeur plus de la moitié de la hausse des exportations entre 2009 et 2012. En 2012, ils représentent 2 % des quantités exportées (un chiffre qui augmente) et 31 % de la valeur de ces exportations. Les vins de « milieu de gamme »
(de 2 et 20 euros) expliquent le reste du redressement des exportations de vins depuis 2009 et leur croissance
vient surtout de la progression des quantités. S’il représente toujours près de la moitié des quantités vendues (chiffre en stagnation), le secteur des vins « bon marché », à moins de 2 euros, n’a que peu d’effet sur la hausse
en valeur de ces exportations.
Le premier client de la France, c’est l’Europe, pour la moitié des ventes. Cinq pays européens figurent parmi
les dix meilleurs acheteurs de vin français, et le Royaume-Uni (un tiers des ventes en Europe) a joué un grand rôle en 2012 sur la croissance des exportations de vins, notamment sur le segment « haut de gamme ». Sur ce même segment, les ventes vers la Suisse sont aussi orientées à la hausse. Vers l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas, les exportations se caractérisent par le poids plus important des vins de gammes de prix inférieur. Ensuite vient l’Asie, marché toujours aussi porteur avec +30 % par an en moyenne entre 2009 et 2012 (pour l’Europe, c’est +6 %). En 2012, ce sont 27 % des bouteilles exportées qui ont pris la direction de ces marchés, d’abord la Chine et
Hong Kong (15 %), puis le Japon (7 %). Le segment « haut de gamme » reste le plus dynamique et représente
41 % des ventes en valeur. Pendant la crise de 2009, le marché chinois a mieux résisté que les autres destinations. Il a également tiré la reprise en 2010 et 2011. Les exportations vers Hong Kong, constituées essentiellement de vins « haut de gamme », se distinguent de celles destinées à la Chine continentale, situées davantage dans la gamme de prix intermédiaire.
Troisième zone d’export, très dynamique depuis la reprise de 2010, le marché américain (essentiellement les Etats-Unis et le Canada) représente 18 % des ventes de vins en valeur, essentiellement
sur le milieu et le haut de gamme, dont le prix moyen a augmenté. Ailleurs, les ventes restent marginales. L’Afrique représente 1 %, le Proche et Moyen-Orient aussi. Ils n’importent cependant pas les mêmes vins, le haut de gamme représentant 44 % des exportations vers le Proche et le Moyen Orient, contre 16% vers l’Afrique.
*Cette étude s’appuie sur les données douanières, dont le champ est constitué par les produits de la nomenclature SH4 = 2204, à l’exclusion du champagne (NC8=22041011). Les quatre gammes de « prix » au litre du vin ont été définies à partir de la distribution des valeurs unitaires (valeurs divisées par quantitées) observées au niveau des lignes de déclarations douanières et statistiques (DAU et DEB). Les valeurs unitaires du commerce extérieur peuvent différer fortement des prix du marché. Une première étude, utilisant la même méthodologie, a été publiée dans Etudes et éclairages n°6 (juin 2009). Une analyse des produits de luxe (dont les vins) figure également dans Etudes et éclairages n°38 (mars 2013), avec une méthodologie légèrement différente.
La coupe (des taxes) est pleine
Les vignerons indépendants en ont assez. Les volumes de l’année 2012 ont été faibles, les aléas climatiques de 2013 ont été particulièrement difficile, et leur fragilité économique ne leur permet pas de supporter une nouvelle charge. Celle qui est censé entrer en vigueur le 1er janvier prochain, écotaxe qui devra être acquittée par l’ensemble des entreprises de transport qui font circuler des camions de plus de 3,5 t sur les autoroutes et routes nationales non payantes et certaines départementales, va les concerner tout particulièrement du fait de leur implantation géographique souvent éloignée des autoroutes à péages et voies ferrées.
Devant cette hausse importante du coût du transport dans un contexte de ralentissement économique, Michel Issaly, président de la Confédération des vignerons indépendants de France est intervenu. « Nos entreprises sont extrêmement fragiles et l’augmentation de charges sur nos exploitations, outre le fait que cela ne fait que renforcer la perte de compétitivité que nous subissons déjà, nous obligera à réduire encore nos marges déjà très faibles. » Parce qu’il n’est pas non plus envisageable de répercuter ces coûts supplémentaires sur les prix de vente, il a demandé instamment au gouvernement d’ouvrir le champ de l’exonération à la viticulture qui fait face, comme tous les secteurs agricoles, à une forte volatilité des prix et à une concurrence internationale accrue.
Le triathlon de 2013
Pendant que certains ont vu au long de cette difficile année 2013 advenir deux printemps, deux étés et deux vendanges, d’autres filent la métaphore sportive. Ci-dessous, les équipes de Château Haut Bailly comparent les épreuves du millésime 2013 à un triathlon.
« Le millésime 2013 a débuté par une épreuve de natation. La pluviométrie exceptionnelle de mai et juin a noyé
les vignes, retardé le débourrement, le développement végétatif et la floraison. La plupart des vieux merlots ont coulé (et millerandé). Les premiers bourgeons sont apparus autour du premier avril, soit quinze jours après la normale. Ce débourrement tardif fut suivi par un printemps froid et pluvieux qui a encore retardé la floraison d’un mois, et gêné la nouaison. Une séquence de cyclisme a suivi au mois de juillet, sous une météo de Côte d’Azur
qui a permis à la vigne de rattraper deux semaines sur son cycle. Cette forte chaleur a été entrecoupée d’orages.
La véraison a eu lieu entre le 20 et le 30 août. La fin d’été a été douce, en roue libre avant le long faux-plat de septembre, dans l’attente des vendanges. Un important travail est réalisé à la vigne. Les équipes effeuillent les rangs, coupent les raisins non vérés et les verjus. Outre les moyens techniques, les qualités professionnelles
de nos équipes assurent une réactivité et une gestion optimale dans les conditions données.
Alors que la ligne d’arrivée était en vue, le dernier weekend de septembre a subi les assauts d’une dépression atlantique, provoquant le départ de la course, dernière étape de ce triathlon. Dès les premières foulées, des menaces de botrytis mettent les merlots en difficulté, alors que les cabernets, restés en embuscade, gardent leur fraîcheur pour les derniers instants. Les plus résistants arrivent en bon état pour le sprint final à l’issue de ces épreuves. Les vendanges 2013 ont lieu entre le 1er et le 10 octobre. Les conditions du millésime, associées
à une sélection stricte lors des ramassages et des différentes étapes de tri, aboutissent à un rendement exceptionnellement faible, aux alentours de 20 hectolitres par hectare. Une fois rentrés au vestiaire, nos
sportifs sont manipulés avec la plus grande douceur. Ils détendent leurs muscles dans des bains à 26-28°C.
Les fermentations alcooliques en mini-cuves béton permettent une vinification minutieuse afin de tirer le meilleur
de chaque lot. Loin d’être essoufflées par l’épreuve de 2013, les Vieilles Vignes donnent de beaux vins, aux équilibres harmonieux. »
Crédit photo : © Château Haut Bailly
Qu’est-ce qu’on fait ce week-end ?
C’est avec la promesse d’un « festival qui se déguste » que démarrent ce week-end Les grands chemins
en Minervois. L’occasion de découvrir, au long d’une quinzaine de jours, les vins, les produits et le patrimoine
du vignoble le plus étendu du Languedoc-Roussillon, qui fêtera prochainement ses trente ans d’AOC. En toute logique, c’est au départ de Minerve que se fera la première des différentes balades prévues au programme.
Elle sera consacrée à la (re)découverte du métier de cueilleur. Départ 9 h. Plus d’info ici.
Premier événement œnotouristique et gastronomique en Dracénie, le salon Autour du vin qui se tiendra samedi
et dimanche à Draguignan proposera au public de découvrir, de 10 h à 19 h, toutes les richesses issues du terroir, de l’agriculture et de l’artisanat locaux. Les étiquettes des grands vignobles et domaines de propriétaire côtoieront celles des moulins à huile, des fromagers, des apiculteurs et les signatures des artisans en céramique, faïence, poterie, bois et cuir, etc. Des ateliers d’initiation à la dégustation sont prévus, en partenariat avec la Maison des vins Côtes de Provence. Plus de renseignements là. Entrée + verre de dégustation : 5 €.
Les vendanges sont terminées au château de Fieuzal (pour un compte-rendu complet, voir ici, là et encore là), comme un peu partout ailleurs. Il va falloir attendre le début du printemps pour entendre reparler du millésime 2013. En attendant, on peut regarder ce joli film.
Hommage à Bernard Thomassin
Nous apprenons avec regret le décès de Bernard Thomassin à l’âge de 79 ans, survenu le 21 octobre.
Propriétaire de Château de France (Pessac-Léognan), cet homme de passions était un travailleur acharné doublé d’un visionnaire. Après une première vie de distillateur en Ile-de-France, il s’était découvert en 1971 une nouvelle passion, le vin et la viticulture. Il s’est alors consacré à la restauration du château de France, où rien n’avait changé depuis le XIXe siècle, avec pour ambition de donner à ce grand vin une qualité et une réputation à sa mesure. Précurseur, il avait anticipé la reconnaissance de son terroir, car à l’époque, seule l’appellation Graves existait. Ce n’est que plus tard que l’appellation Pessac-Léognan attirera les investisseurs. Tous ceux qui l’ont rencontré ont été frappés par l’intelligence et la ténacité qui l’animaient en toute entreprise. Homme de la terre, Bernard Thomassin n’acceptait aucune concession. Il avait aussi une qualité rare, l’intelligence du cœur. Rien ne l’arrêtait quand il s’agissait de défendre ses valeurs ou de lutter contre toutes les injustices. Nous transmettons ici toutes nos pensées à sa famille et à son fils, Arnaud Thomassin.
Le grand voyage de Château Guiraud
A partir du jeudi 24 octobre et jusqu’à fin décembre, le sauternes de Château Guiraud sera servi en impériale
et en exclusivité dans cinq restaurants d’Alain Ducasse. Ce format exceptionnel de six litres (soit l’équivalent
de huit bouteilles) sera proposé à Paris, Londres, New-York et Tokyo. Propriétaires et membres de la « famille Guiraud » s’envoleront aux quatre coins du monde pour inaugurer cet événement et goûter aux accords proposés, avec différents millésimes allant de 1988 à 2009, dans chacun de ces restaurants. Laure Planty sera au Jules Verne (Paris), Xavier Planty et Stephan von Neipperg au Benoît (New-York), Olivier Bernard au Dorchester (Londres)
et Adrien Bernard au Beige (Tokyo). Comme le montre la photo ci-dessus, ce très grand flacon est équipé d’une pompe (procédé Wikeeps) qui permet de tirer le vin pour le servir au verre à température idéale, mais aussi
de le conserver de manière optimale par injection d’un gaz neutre.