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C’est quoi la nouaison ?


Pour répondre à cette question et à toutes celles concernant les quatre saisons à la vigne, de la taille jusqu’aux vendanges, les vignerons des AOC cheverny et cour-cheverny ont conçu une vidéo en motion design destinées à expliquer les grandes étapes de la route qui va de la vigne au verre aux visiteurs de leur maison des vins. Créée il y a plus de sept ans, cet espace dédié à la dégustation et à la vente a reçu 87 000 amateurs cette saison.

Ce succès s’accompagne d’autant de questions qu’il y a de visiteurs. Célia Couderc, responsable de la Maison des vins de Cheverny confirme que « La question récurrente est  comment fait-on le vin ? » C’est la raison pour laquelle les vignerons ont décidé de créer cette vidéo dynamique de trois minutes. Diffusé à la Maison des vins via une borne interactive (adaptable aux handicapés), cet « outil permettant d’illustrer nos propos est un véritable atout. » 


Les moines vignerons à l'honneur

L’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) index vient de décerner son prix 2014, catégorie « Histoire et Littérature », à l’ouvrage Neuf Siècles au Coeur de la Bourgogne, le Cellier aux Moines et son Clos (éditions Assouline) dont nous vous avions parlé ici. Fruit de la rencontre entre Gilles Platret, historien et écrivain bourguignon, récemment élu maire de Chalon-sur-Saône, et Philippe Pascal, le propriétaire des lieux, ce livre qui a exigé deux ans d’une recherche rigoureuse rappelle la contribution de l’ordre monastique cistercien à la découverte des grands terroirs bourguignons et raconte la saga de ces moines vignerons et la résistance au temps d’un domaine établi vers 1130 sur un coteau de Givry devenu premier cru.

Lors de la réception de ce prix, remis aux auteurs par František Lipka, poète, écrivain et diplomate slovaque, Jean-Marie Aurand, directeur général de l’OIV et Yves Bénard, ancien président de l’OIV, Gilles Platret a rappelé que « la compréhension et le partage de notre histoire nous permettent de prendre conscience qu’en matière de viticulture, la maîtrise des terroirs est une affaire très ancienne.» Au douzième siècle, les disciples de Saint Robert recommandaient déjà de laisser faire la nature. Selon Philippe Pascal, « la viticulture bourguignonne est revenue à des pratiques très respectueuses de la nature qui subliment à nouveau l’expression de ses terroirs. »

La photo ci-dessus est signée Serge Chapuis.


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Le Cellier aux Moines et son Clos, éditions Assouline, 65 €

Une régisseuse aux Hospices de Beaune

Depuis 2004, elle était en charge de la vinification pour la maison Corton-André (Aloxe-Corton), rachetée il y a peu par la famille Frey (en lire plus ici à ce sujet). En janvier prochain, Ludivine Griveau prendra en charge les 60 hectares de vigne des Hospices de Beaune. On en lira plus ici et sur le parcours de cette jeune œnologue de 36 ans et sur la nouvelle mission qui l’attend.

Antoine Petrus choisit six vins chez Idealwine


 

Le maître des enchères

Depuis bientôt 15 ans, le site idealwine.com a révolutionné le monde de l’achat du vin sur Internet. Fondé par trois anciens de la Bourse de Paris dont la brillante Angélique De Lencquesaing. Plus de 40 000 bouteilles sont constamment sur le site.

Trois types de vente vous sont proposées : le premier, comme dans une salle de vente mais « on line » bien sur, un autre format avec des vins disponibles sans limites de temps et le dernier, connecté en direct avec les salles de vente aux enchères.

Voila 6 must à retrouver d’urgence entre vignerons stars, grands noms et vins de tous les jours.


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Bourgueil Domaine de la Chevalerie Bretêche 2011

Le cabernet franc magnifié par la famille Caslot dans un millésime dédié au plaisir : Tannin lisse et glissant au rendez vous.

16 euros

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Chinon Coteau de Noiré Philippe Alliet 2012

Le meilleur vigneron de Chinon sur le plus beau terroir de l’appellation. Que demander de mieux ?

24 euros

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Montlouis Le Volagre Stephane Cossais 2008

Trop tôt disparu, Stéphane Cossais vinifiait les Montlouis comme nous les aimons : ample, consistant et salin.

22 euros

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) Sancerre François Cotat 2013

Au cœur du Chavignol, Francois Cotat fait naître des sauvignons de longue garde, riches et complexes. A oublier pendant une bonne décennie.

19 euros

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Vouvray Clos Naudin Philippe Foreau Moelleux 2009

Aussi à l’aise pour les accords mets et vins qu’en vinification, Philippe Foreau a brillé sur ce millésime 2009, un moelleux de garde aux allures de demi-sec : brillant !

26 euros

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Chinon La Croix Boissée Bernard Baudry 2012

Chinon existe également en blanc et ce pur chenin saura vous surprendre ! Bernard Baudry excelle avec un 2012 aux accents de verveine sur un fond cristallin.

20 euros

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Moi qui vous parle, j’ai vécu la fin du gros rouge


Brève –et personnelle– histoire contemporaine du vin de France


 

Chapitre un, où il est démontré que la nouvelle ère du vin a commencé dans les années 80.

 

Cette révolution qualitative qui débuta au début des années quatre-vingt – on peut même en fixer les débuts officiels aux vendanges 1982 à Bordeaux – n’est pas née par hasard. Elle puisait en fait ses racines dans la longue histoire du vin en France et dans le monde, d’une part et dans celle de l’évolution de la société occidentale, d’autre part. Commençons par ce dernier point, il nous renvoie à mes fameuses années soixante et à ce que les historiens d’aujourd’hui appellent la « contre-révolution du rock ». Après s’être reconstruit à marche forcée dans les décennies qui ont suivies la seconde guerre mondiale, les États-Unis et les pays d’Europe occidentale redécouvrirent le bonheur de vivre. La jeune génération de cette époque-là n’avait pas connu les horreurs de la guerre, elle trouvait du travail sans problème et rêvait de découvrir d’autres horizons culturels, touristiques ou gastronomiques. Le vin, qui était depuis toujours la boisson de base des français, commença à changer ainsi de statut. Au lieu d’être un produit de consommation courante sans autre qualité que celle d’avoir un degré d’alcool compris entre 10 et 12,5°, il devenait un objet différencié dont on se souciait enfin de l’origine et de celui qui l’avait créé. Cela tombait bien, car dans le vignoble ce même changement de génération allait avoir d’immenses conséquences.
On faisait bien sûr déjà de grands vins en France avant cette époque et il existait une hiérarchie entre les crus et les vignobles peut-être encore plus forte qu’aujourd’hui. Mais celle-ci s’exerçait de manière mécanique, routinière, sans que la plupart des vignerons s’interrogent beaucoup sur la qualité des vins qu’ils produisaient. Dans les grandes régions traditionnelles françaises –Bordeaux, Bourgogne, Champagne- les générations travaillant entre les années soixante et soixante-dix furent les premières depuis longtemps à bien vivre du métier de vigneron. Mais pour la plupart, ce n’était pas à cause de la qualité de leurs vins, mais surtout grâce aux « bienfaits » de la nouvelle agriculture productiviste qu’ils découvraient. Les engrais, les pesticides, les tracteurs, les nouveaux porte-greffes et les clones plus productifs et résistants à de nombreuses maladies qui autrefois ravageaient le vignoble, la chaptalisation, les progrès de l’œnologie, tout cela contribua à faire progresser incroyablement les rendements de raisins sur les vignes et donc le volume de vin produit. L’économie globale du pays progressant aussi, les prix restaient stables, si bien que le vignoble connût enfin une certaine richesse.

Plus aisés, les vignerons envoyèrent leurs enfants faire des études d’agronomie ou d’œnologie. Mieux éduquée, cette nouvelle génération comprit vite où était le problème en matière de vin. Ceux qu’ils produisaient dans leur domaine en si grande quantité n’arrivaient pas à la cheville des meilleurs millésimes d’avant-guerre ou des années cinquante, certes rares (parfois, comme dans les années trente, un seul bon millésime, 1937, pour toute la décennie) et produits en petit volume. Leur bon sens paysan et leur idéalisme de jeunes vignerons bien éduqués et passionnés par leur métier leur faisaient comprendre qu’il fallait réagir et s’occuper enfin de la qualité des vins.
D’autant que plusieurs avertissements avaient été donnés au cours des années soixante-dix. Le plus douloureux avait été traité au cours d’un procès retentissant à Bordeaux en 1974 : le scandale des grands crus coupés, c’est-à-dire mélangés avec du vin de table venu du Languedoc. Le principal accusé de cette affaire, le courtier Pierre Bert, écrivit un livre savoureux en prison, « In Vino Veritas », dans lequel il assène dès la première page une vérité que tous les professionnels semblaient connaitre : « l’Affaire des Vins de Bordeaux a révélée au grand public des pratiques courantes [ndlr : la fraude, le coupage des vins et les étiquettes trompeuses] dans le négoce depuis que le monde est monde. » Le second coup de semonce fut plus symbolique et eu sûrement plus de répercussions immédiates en Californie qu’en France. Il n’en était pas moins inquiétant. Ce fut ce qu’on appela le Jugement de Paris, une dégustation à l’aveugle de premiers et seconds crus classés bordelais et de grands crus blancs de Bourgogne face à des vins de la Napa Valley dans des millésimes similaires. Le jury franco-anglais rassemblé par Stephen Spurrier avait conclu à la victoire sans appel des vins californiens sur les vins français (1).

(1)Nous avons refait, en 2001 puis en 2010, une dégustation similaire avec des grands bordeaux et des stars californiennes, australiennes et chiliennes. En 2000, deux vins du Nouveau Monde s’étaient classés dans les cinq premiers, mais le vainqueur, Pavie 1998, était un vin bordelais. En 2010, dans une dégustation portant sur le millésime 2005, le meilleur vin du Nouveau Monde se classait après le moins bon des bordeaux. Ces deux expériences illustrent parfaitement cette « révolution qualitative » dont nous parlons ici.
suivre

Crédits photo d’ouverture : deja-hier.com

Domaine du Banneret, Châteauneuf-du-Pape 2011


 

Domaine du Banneret

Le grand type du vin à l’ancienne, tannin de rafle évident et toute petite note d’acétate au nez mais quelle complexité et quelle fraîcheur, avec une complexité en devenir vraiment étonnante.

18/20

Disponible à 30 euros la bouteille pour le millésime 2011
ACHETER


[row][col width= »six »]Ce tout petit domaine nous épate à chaque fois par le naturel et la complexité de sa saveurqu’il doit au respect de la vinification en raisins entiers et surtout de celle en commun de nombreux cépages rouges ou blancs, récoltés ensemble. Ici même le très rare blanc de Picardan joue son rôle ! Ce 2011 éblouit par sa finesse aromatique avec des notes fraîches mais non agressives de roncier née des rafles mais aussi d’herbes aromatiques, de mûre, de cuir, de tabac blond, et une somptueuse suite en bouche sans la moindre sensation de richesse en alcool pourtant si fréquente et si appuyée dans ce millésime. On est loin du monolithisme des purs grenaches, même des plus fins, et même si dans certains cas on ne pourrait s’en passer, comme pour Rayas ou Pure ou Grenaches de Pierre ! Apogée vers 2019.

Michel Bettane

 

95547346

Condrieu, les villages et les lieux-dits


Le vin de Condrieu, malgré sa rareté, est devenu l’un des vins de la vallée du Rhône les plus populaires au monde, le seul vin blanc même à l’être et son exemple est à l’origine de nombreuses plantations du cépage viognier à travers le monde, alors que, trente ans plus tôt, il avait failli disparaître.


 

À LIRE >Condrieu, la renaissance du viognier…

 

À suivre >Vinification et caractère du vin… >Le guide des producteurs et leurs vins…

 

Les premiers condrieus portaient rarement sur leurs étiquettes le nom d’un lieu-dit. Quand, dans les années 1970, il n’y avait qu’une petite dizaine de producteurs et guère plus de trente mille bouteilles mises sur le marché, on ne trouvait que Georges Vernay avec son coteau de Vernon et Pierre Perret avec son coteau de Chéry pour faire connaître un lieu-dit particulier. Les autres assemblaient en un seul vin leurs différentes petites parcelles. Aujourd’hui, les condrieus sans aucune indication plus précise forment l’entrée de gamme de la plupart des vignerons, souvent issus de jeunes vignes. Dès que les vignes sont plus vieilles et que les parcelles atteignent une taille suffisante, le vigneron indique le lieu-dit ou invente comme ses confrères des appellations voisines un nom de marque, ce qui ne va pas sans une certaine ambiguïté quand ce nom ressemble trop à un nom de lieu-dit. La multiplication des cuvées de lieux-dits est par ailleurs une excellente chose puisqu’elle permet une meilleure connaissance des subtilités du terroir et justifie la petite étude qui suit.

L’appellation commence, sur la commune même de Condrieu, avec la seconde moitié du coteau de Bassenon (sans doute une corruption de Bas de Semons), séparé de la première par un petit ruisseau du même nom. La partie nord, sur des terres de migmatique (granit fondu par des températures de plus de 650° en raison d’une activité volcanique) est en appellation Côte-Rôtie, la partie sud convient un peu mieux au viognier, surtout dans le bas du coteau où le granit, dit à muscovite, est de couleur assez claire.

A l’arrière de Bassenon et toujours sur de la migmatique, on trouve les vignobles du Rozay (désormais vinifié par Chapoutier), Côte Bonnette, La Roncharde et la célèbre Côte Chatillon, berceau d’origine de la fameuse cuvée la Doriane de la famille Guigal. Un rien plus au sud commencent les coteaux de pur granit à biotite qui ont été le berceau de l’appellation qui, rappelons-le, à l’origine se limitait à ce village et à ceux voisins de Vérin et Saint-Michel-sur-Rhône. Il est difficile en dégustation pure de marquer d’importantes différences d’un cru à l’autre et une marque bien précise du granit par rapport aux terres plus métamorphiques et porphyriques, mais il semble que les vins vinifiés sur le premier type de sol soient plus cristallins dans leur forme et leur saveur, avec un rien de salinité en plus, des notes de violette plus apparentes au nez et, peut-être, moins de nuances de fruits exotiques et moins d’exubérance dans le comportement.

Les lieux dits

Les lieux dits Sainte-Agathe, Mirebaudy et la Caille sont un peu plus élevés et plus froids que l’impressionnant coteau de Vernon, idéalement solaire. Le ruisseau Vernon sépare le coteau du même nom du suivant qui porte aussi en partie le nom de Vernon et se prolonge vers l’ouest par la célèbre côte Chery. La côte se poursuit directement, cette fois sur la commune de Vérin, dans le département de la Loire, toujours sur granit à biotite avec le Clos Bouché et le Tinal.


Un nouveau ruisseau marque une séparation avec la commune de Saint-Michel-sur-Rhône où les premières et superbes terrasses sont celles de Château Grillet, qui possède sa propre appellation. Les coteaux de Poncins, plus au sud, voient une légère altération de la roche mère, avec des sables moins fins et il arrive qu’on retrouve dans le vin des notes de lard fumé originales mais qui se fondent bien avec le fruité d’abricot et d’agrumes du viognier.

Le dernier coteau de la commune Colombier retrouve le classicisme de sol et de saveur de Vernon, avec des vignes elles aussi superbes. Si l’on continue vers le sud, on entre dans le territoire de Chavanay qui est l’extension naturelle de ce que je viens de décrire mais qui n’a été rajouté à l’appellation que dans un second temps. De nombreuses vignes ont été plantées sur le hameau de Verlieux, où François Villard par exemple élabore sa cuvée Terrasses du Palat. Les sols ici alternent le granit à biotite et celui à muscovite, plus clair, avec des traces de calcaire et des cailloux plus ronds, moins anguleux. Au cœur de Chavanay, d’autres vignes superbes se déploient sur le lieu-dit Chanson dont une petite partie est recouverte de loess et j’avoue avoir été fortement impressionné par la noblesse de saveur des vins issus de ce coteau, dont celui d’André Perret. Les Eyguets, la Côte, Izéras ont le même sol mais les vins jusqu’ici sont moins fins, plus gras, parfois même un peu lourds lorsqu’on les récolte en surmaturité.

Un autre ruisseau se jetant dans le Rhône, le Valeneize, marque un changement de nature de sol avec l’apparition du métamorphisme et de la migmatique liée à la fusion à haute température des roches issues de ce métamorphisme, et qui sont le pendant sud de la côte Bonnette. On y trouve les lieux-dits Boissey, Blanchard, la Ribaudy, rarement mis en bouteilles individuellement. Philippe Faury y possède un joli vignoble.
L’appellation Saint-Joseph reprend ses droits plus au sud, en raison d’un léger changement d’exposition du à un mouvement du fleuve jusqu’à la sauvage et pittoresque vallée de Malleval où beaucoup de vignes viennent d’être plantées ou replantées. Il faut distinguer les formations de migmatique (Volan, son magnifique château et des vignes qui sont la copropriété de Gérard Depardieu, Marcel Guigal et Alain Paret) et le retour du granit classique à biotite avec Palouse, Rochecourbe, Chanson et Gonon. Une toute petite vigne sur le gneiss au lieu dit « les Patasses » n’est malheureusement pas à ma connaissance vinifiée à part, pour comprendre le caractère donné par le porphyre.
Plus bas, on change de département à nouveau et on entre dans l’Ardèche, avec des vignes plus dispersées, enchâssées dans l’appellation Saint-Joseph, comme la Comme, La Coste, Merlan, Rouelle, (migmatique), Maillet et Fontaillaux (granit), et surtout, car plus anciennes, celles qui terminent l’appellation au sud de Limony, Braise, Montrond, Font Silvet, sur du migmatique beige clair, puis côte Fournet, à nouveau sur le granit. Il est sûr que lorsque les vignes seront plus vieilles, les viticulteurs mettront à part un grand nombre des lieux-dits que je viens d’énumérer et que l’on aura une vision plus exacte des nuances apportées par le terroir mais aussi l’exposition et, naturellement, la hauteur des vignes et les influences du vent. suivre

Le Tour de France de Michel Bettane : Bourgogne et Beaujolais

Vendanges 2014 : le tour de France de Michel Bettane


Les pluies et les grêles (heureusement très localisées, mais tragiquement une fois encore dans le secteur de Volnay/Pommard/Meursault) rendaient le vigneron pessimiste fin août mais trois semaines de temps idéal plus tard ils ont le sourire. Il y aura de très beaux, voire de grands vins de chardonnay car comme en champagne les raisins blancs se sont mieux accommodés des caprices du climat, mais aussi des rouges de fort caractère. Les nuits fraîches et une forte évaporation de toute l’eau accumulée pendant l’été ont permis aux raisins d’avoir des peaux épaisses, et un surprenant potentiel aromatique. Le volume des baies, un peu plus gros que la moyenne a favorisé des rendements confortables entre 35 et 50 hl/ha, qui affecteront peut-être la longévité des produits mais bien utiles après trois petites récoltes consécutives. Les gamays du beaujolais, plus précoces d’une petite semaine que les pinots noirs de Côte-d’Or ont dans les vignobles les moins bien tenus donné des raisins de qualité moyenne, avec une proportion non négligeable de raisins pourris-acides. Mais dans les belles expositions et dans les crus les meilleurs vignerons ont récolté des raisins magnifiques, très parfumés et équilibrés, qui mériteront l’attention de tous les amateurs. Chablis comme la champagne bénit une récolte de chardonnays mûrs et délicatement parfumés, qui devrait produire en volume appréciable des vins parfaitement typés.

Critique du journalisme de promenade

Dans le blog du Grand jury européen, Jérôme Perez un des co-fondateurs de la Passion du vin, parti dans des présupposés idéologiques qu’il partage d’ailleurs avec le cinéaste Nossiter pour qui toute opinion non seulement se vaut, mais par addition donne à celles de la majorité brevet de vertu et de savoir, Jérôme Perez, donc, revient à la charge et attaque à l’artillerie lourde la remarque d’un internaute. Celui-ci regrettait que peu de journalistes viennent voir les vendanges avant de commencer à juger de la valeur d’un millésime.

Le credo de Perez – qui facilite d’ailleurs sa tendance à croire que la presse est incompétente et corrompue – peut se résumer ainsi : pas besoin d’en savoir plus qu’il ne faut pour un critique de vin (amateur ou même professionnel), sauf à devenir « suffisant », encore moins de se promener (sic) dans les vignes ou dans les caves et, surtout, savoir se mettre au niveau de compréhension du premier venu (appelé – sic – un quidam) pour qui la vérité est la scène, pas la coulisse. Voilà le vigneron promu compositeur, peintre ou écrivain et l’opinion sur son œuvre plus adaptée quand elle se contente du spectacle sans ses règles. Comme on peut donc dire librement – je défendrai de toute mes forces cette liberté dont on croit que je me moque – que Mozart est un musicien surestimé (Roger Hanin dans le texte, peu inspiré, mais en général plutôt sympathique, un jour d’Ardissonnerie), que Proust écrit moins bien qu’Amélie Nothomb, on peut tout autant affirmer les médocs sont des vins sans terroir, au goût de frime ou de terroir ou qu’un gaillac liquoreux peut égaler ou dépasser yquem. Je voudrais ici rappeler respectueusement et humblement qu’une bouteille n’est que le résultat de la fermentation sous surveillance humaine d’un gros kilo de raisin d’une provenance particulière. C’est donc un produit agricole né de l’artisanat et du savoir-faire qu’il faut juger avec des critères relevant de ce même artisanat et de la connaissance de cette provenance, du moins si l’on veut informer honnêtement le public. La multiplication des réactions d’humeur, puisqu’elles naissent de l’émotion immédiate, mais aussi des préjugés et de la culture de chacun (et ces réactions sont le vrai plaisir social de la dégustation-partage) n’a pas valeur de jugement si ce n’est celui d’un tribunal populaire. On sait ce qu’il vaut lorsqu’il n’y a pas de Code civil pour l’encadrer.

De la critique en général et de celle du vin en particulier

L’idiotie de propositions comme celle que je viens d’évoquer et la déculturation qu’elles entretiennent dans le public me conduit ici à rappeler quelques principes. Quand d’heureux (a posteriori) hasards m’ont porté à reconstruire une Revue du Vin de France digne de son passé dans les années 1980, je n’étais qu’un simple amateur pas très différent de milliers d’autres à la seule différence que j’assurais depuis trois ans l’animation de dégustations publiques dans le cadre de l’École de dégustation créée par Steven Spurrier à côté de sa boutique de vins à Paris. Ces dégustations présentaient au public en présence du producteur les meilleurs vins de ce pays et l’échange convivial entre les amateurs présents et le vigneron était des plus instructifs. J’en ai conservé le réflexe de ne jamais oublier la destination finale de tout vin, le plaisir de celui qui le boit.

Mais l’activité de journaliste du vin, dans une revue qui plus est spécialisée et, d’une certaine façon, institutionnelle, c’était une autre paire de manches. C’était d’abord un pouvoir, le pouvoir en quelque lignes et sur l’effet de l’instant de juger le travail de toute une année pour un vigneron, sans tenir compte dans le cadre de dégustations à l’aveugle de son passé de producteur, celui de ses ancêtres ou de ses prédécesseurs et sans possibilité pour lui d’appel, en cas d’imprécision ou même d’erreur dans la formulation du jugement. Ce pouvoir, l’amateur d’aujourd’hui, quand il participe à un forum public sur internet, le partage désormais avec nous autres, journalistes professionnels, ce qui devrait le rendre attentif à ce qui suit. Dans mon cas, ce pouvoir se doublait d’une fonction et, comme pour toute fonction, on ne peut faire l’impasse sur son éthique. Juger, c’est évidemment être impartial, indépendant, responsable. Les deux premières obligations sont reconnues de tous. La troisième l’est moins et est tout aussi contraignante. Elle me plonge souvent douloureusement dans un va-et-vient permanent d’interface entre l’univers de la production et le respect des personnes, même dans le cas d’une critique sévère de leur travail, ce qui implique une argumentation constructive et, dans toute la mesure du possible, empathique, celui du public qu’on informe et celui de la société, pouvoirs publics et ensemble des citoyens, parce que le vin est un produit contenant de l’alcool et relevant d’une politique de la santé.

Dès le début de mon activité, j’ai heureusement été guidé par la magnifique formule de Raymond Baudoin, fondateur de la revue du Vin de France en 1928 qui, dix ans plus tard, donnait comme devise « défense de la qualité, défense du consommateur ». Devise étonnamment prophétique, mais dont certains ne comprennent rien (ou ne veulent rien comprendre) à la profonde logique : c’est en défendant la qualité qu’on défend le consommateur. Donc la première, fondamentale et incontournable question : « qu’est -ce que la qualité en matière de vin ? » exige une réponse longuement réfléchie. L’idiot pensera immédiatement : « c’est moi qui en décide ». Subjectivité narcissique, variabilité irresponsable, désastre garanti. L’honnête homme cherchera des critères plus solides et plus stables. Pour ma part, voilà comment j’ai procédé à l’aide de ma formation universitaire et humaniste. Définir des critères de qualité sans chercher à définir la nature du produit dont on doit juger de la qualité n’a pas de sens. Quelle est donc cette nature ? Mon intuition (je ne l’ai jamais regrettée) fut de comprendre immédiatement que le vin est un produit vraiment spécial, car situé au croisement exact entre le don de la nature et le savoir-faire humain. Don d’un terroir, d’un climat, et du ferment, mais aussi contrôle permanent par l’homme de toute la conduite de la vigne, de la maturation du raisin, de la vie fermentaire et de l’affinage du produit avant sa mise en marché. Reconnaître cet enchaînement implique de connaître, puis de juger chacun de ses maillons. Donc, d’abord apprendre. Apprendre beaucoup. Apprendre dans les livres les bases théoriques, mais aussi dans la pratique les gestes qui créent.

Je voudrais ici remercier tous les producteurs qui ont compris ma démarche et m’ont aidé à l’affiner et l’approfondir en me faisant part de toute leur expérience, sans jamais épargner leur patience et leur temps. Vérifier ensuite de façon permanente le suivi de chaque millésime dans le vignoble et donc d’y passer de nombreuses journées d’observation minutieuse, d’interrogation des producteurs et des techniciens, bref tout sauf une « promenade » comme j’ai lu récemment qu’on qualifiait ce travail. Last but not least, il reste la question du goût, épineuse à souhait. Elle demande de compenser l’infirmité regrettable de la nature humaine, à savoir un organe du goût relevant du patrimoine génétique de chacun, et donc une part non négligeable d’incommunicabilité. Trouver donc pour communiquer les mots simples, clairs, qui définissent des caractères généraux, ne dépendant pas des particularismes individuels, accessibles à la plupart, laisser transparaître l’émotion, mais ne pas cacher qu’elle repose sur des critères esthétiques qui structurent le jugement. Le goût ne naît pas dans un pays de longue tradition viticole de l’imprévisibilité ou du caprice du vigneron, mais de l’inscription de son travail dans l’époque où il vit avec ses modes, ses humeurs, tout comme dans le prolongement d’une tradition qu’il faut connaître et faire connaître. C’est évidemment dans cet état d’esprit que toute l’équipe de dégustateurs de Bettane+Desseauve déguste et je travaille tous les jours à le transmettre aux plus jeunes d’entre nous.