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Voyage autour de ma cave par Thierry Desseauve – Jour 7

Voyage autour de ma cave, ou la chronique quotidienne d’un amateur pas désespéré par temps de confinement. Chaque jour Thierry Desseauve déniche, ouvre et raconte une bouteille mémorable de sa cave.
Jour 7 : in vino veritas, Pierre Bert, Albin Michel

Voyage autour de la cave de Michel Bettane, #5

Les saveurs les plus originales des cépages languedociens
Pour faire la paire avec ma conscrite de Mélanie 2010, voici les Grands Carmes de Simone. Ce n’est pas que je souhaite à Mélanie de finir ses jours dans ce type de maison d’accueil, mais tout simplement parce que j’adore ce vin qu’on boit toujours trop jeune. On ne présente plus la gloire du vignoble aixois, Château Simone, ni la famille exemplaire qui l’a en charge depuis plusieurs générations, les Rougier. Sur une pente d’éboulis calcaires d’origine lacustre, exposée plein nord et abritée des violences climatiques (sauf, hélas, des sécheresses d’été des derniers millésimes), les meilleurs cépages languedociens, blancs en particulier, donnent leurs saveurs les plus originales, les plus fortes et les plus durables. Les Grands Carmes n’est pas un second vin mais un peu comme Alter Ego par rapport à Palmer, une autre expression du terroir, née de sols un peu différents, très voisins géographiquement des vignes qui jouxtent le château et d’un assemblage particulier qui privilégie la clairette (80 %) épaulée par 10 % de viognier pour le parfum et 10 % d’ugni blanc assez âgé, pour le mariage des deux autres.

Le cœur de la Provence, c’est ici
On le présente comme plus immédiat à boire qu’un château-simone, c’est bien dommage. Si son fruit est plus tentateur, il n’exprime qu’imparfaitement le génie de la clairette avant huit à dix ans d’âge. Ce cépage à l’amertume légère soulignant ses arômes fermentaires propres, hésitants entre le tilleul, la verveine et surtout le fenouil, est en fait une sorte de riesling languedocien qui a besoin de l’affirmation de son caractère terpénique pour s’accomplir. Ce caractère qui fait parfois penser à une odeur de pétrole renforce les notes de fenouil et a une résistance incroyable à l’oxydation. Après dix ans, la couleur et l’éclat de ce vin restent intacts, construits sur une matière noble, profonde, comme on n’en trouve plus que rarement dans nos chardonnays bourguignons modernes délavés ou vendangés verts. Grande viticulture, évidemment petits rendements et aussi art du pressurage et de l’élevage, considérablement aidés par la cave fraîche et enterrée dont bénéficie ce domaine. Rappelons que le cœur de la Provence est ici, pas plus au sud, et que les cépages blancs autochtones sont plus anciens que les cépages espagnols, aussi nobles et adaptés soient-ils, qui font le triomphe des rosés du Var.

Château Simone, Les Grands Carmes de Simone blanc, IGP bouches-du-rhône 2010
https://chateau-simone.fr/

Voyage autour de ma cave par Thierry Desseauve – Jour 6

Voyage autour de ma cave, ou la chronique quotidienne d’un amateur pas désespéré par temps de confinement. Chaque jour Thierry Desseauve déniche, ouvre et raconte une bouteille mémorable de sa cave.
Jour 6 : Jade Vineyard, Aria Reserve 2015

Michael Broadbent est mort à 92 ans

On ne verra plus sa longue silhouette tirée à quatre épingles, ni son look de lord anglais aux cheveux d’argent. Michael Broadbent MW nous a quitté le 17 mars.

A lui seul, il incarnait la communauté des Masters of Wine, un titre qu’il avait glané en 1960, après des études d’architecte et une nouvelle orientation de sa carrière.

Connu avant tout comme directeur du département vins de Christie’s à Londres, il était aussi un auteur prolixe : près de vingt ouvrages dont les fameux best-sellers « Wine Tasting », « The Great Vintage Wine Book » et « Michael Broadbent’s Pocket Guide to Wine Tasting ».

Critique écouté et respecté, notamment à Bordeaux, il fut un temps impliqué – du fait de sa supposée proximité avec Hardy Rodenstock – dans l’affaire des faux lafite à l’effigie de Thomas Jefferson, polémique dont il sortira avec les honneurs.

Veuf en premières noces et remarié l’an passé à l’âge de 91 ans, il laisse un fils, Bartolomew qui évolue lui aussi dans le commerce du vin et une fille, Emma.

Nous nous associons à leur peine, tout comme les amateurs de château-lafite et d’une manière générale de grands « clarets ».

Raoul Salama

Photo : Christies Wine Auctions. Carol Sachs

Voyage autour de la cave de Michel Bettane, #4

Un véritable artisan des crus du beaujolais
J’ai décidé de faire le point sur un millésime « conscrit », conscrit en beaujolais désignant les filles et les garçons nés dans une année se terminant par le même nombre. Début mars, ils font une sympathique fête dans les villages où jeunes et vieux se retrouvent. Un exemple dans notre pays qui aime tant les fractures. Donc 2010 est conscrit avec notre terrible 2020. Mon choix s’est porté volontairement sur le vin d’un des vrais artisans nobles des crus du beaujolais, travailleur, respectueux du terroir et du style le plus capable de mettre en valeur dans la durée le cru. Daniel Bouland règne sur ses vignes de Corcelette sur Morgon mais a acquis et exploite une jolie parcelle sur les terres si spéciales de côte-de-brouilly, voisine du célèbre château Thivin. Il aime pour l’avoir appris de son père les vins colorés et charnus, vendangés mûrs, vinifiés pour extraire le maximum de matière possible, plutôt à chaud en fin de fermentation, donc aux antipodes d’autres remarquables et plus célèbres producteurs de son village.

Ce n’est pas un vin de soif…
Les sols métamorphiques du mont Brouilly tendent à donner des tannins fermes au gamay, ce qui ne lui fait pas peur. Dans son type de vinification il faut savoir ouvrir le vin au moins une heure à l’avance et surtout ne pas le déguster trop frais, ce qui ne convient qu’aux vins de soif et de fruit. 17/18° mettent parfaitement en valeur la richesse du nez, dans un grand verre, sur la prune, avec une petite amertume minérale qui est la marque même du terroir, la bouche ample, chaleureuse, généreuse même est loin d’avoir dit son dernier mot, le tannin est parfaitement intégré avec le toucher de bouche souple qui est propre au cépage. Je ne répéterai jamais assez que dans un vrai vin de terroir et de lieu les sensations tactiles sont aussi capitales que la saveur, et que le confort de la dernière se fait parfois aux dépens de l’expression du sol. À chacun, producteur ou buveur de faire ses choix, en matière de beaujolais, les miens sont faits depuis longtemps.
Daniel Bouland, cuvée Mélanie, côte-de-brouilly 2010

Voyage autour de ma cave par Thierry Desseauve – Jour 5

Voyage autour de ma cave, ou la chronique quotidienne d’un amateur pas désespéré par temps de confinement. Chaque jour Thierry Desseauve déniche, ouvre et raconte une bouteille mémorable de sa cave.
Jour 5 : Domaine Cazes, cuvée Aimé Cazes, rivesaltes 1978

Voyage autour de la cave de Michel Bettane, #3

Un bon blanc pas trop loin
Pour trouver un bon blanc pas trop loin de chez moi, il faut quand même faire dix kilomètres. L’excellente petite coopérative de Loché-Vinzelles, un peu pompeusement nommée Cave des Grands Crus blancs, est trop discrète et très heureuse de sa situation à quelques centaines de mètres de la gare TGV Mâcon-Loché. On peut y déjeuner et déguster des vins au rapport qualité-prix difficile à battre. Les vinifications ont beaucoup progressé en dix ans avec les progrès de l’équipement et des sélections parcellaires bienvenues. Pouilly-Fuissé aurait dû dès sa naissance englober les petits vignobles de coteau de Loché et Vinzelles, c’était d’ailleurs le vœu du législateur. Les querelles de clocher qu’on imagine en plein fief lyonnais et gaulois ne l’ont pas permis, obligeant d’ailleurs pendant quelques années à tout étiqueter sous l’appellation pouilly. Jouxtant le cœur de coteau, sur des sols un peu plus argileux et productifs, mais pas toujours, on trouve de délicieuses cuvées de mâcon-villages.

Un 2017 à point
La cave a sélectionné le secteur des Morandes qui produit un vin très net, franc, pur, simple, fin, parfait pour la truite, la soif ou les petites charcuteries. Ce 2017 est à point, transparent, sans la moindre note de pomme tant aimée de nos jeunes sommeliers dans les vins nature imparfaitement vinifiés, ou les lourdeurs de fin de fermentation difficiles qui passent pour des expressions supérieures de terroir. Dans mon verre, j’ai apprécié la propreté et la netteté du dessin même si pour plus de complexité, il faut passer au pouilly. Le prix de ce vin est en dessous de 10 euros. Qui dit mieux ?

Cave des Grands Crus blancs, les Morandes, mâcon-vinzelles 2017
Où ça ?
Cave des Grands Crus Blancs

2 367, Route des Allemands
71680 Vinzelles
http://www.lesgrandscrusblancs.com/

Voyage autour de ma cave par Thierry Desseauve – Jour 4

Voyage autour de ma cave, ou la chronique quotidienne d’un amateur pas désespéré par temps de confinement. Chaque jour Thierry Desseauve déniche, ouvre et raconte une bouteille mémorable de sa cave.
Jour 4 : Ca’ del Bosco, franciacorta 2015

Voyage autour de la cave de Michel Bettane, #2

L’expression la plus minérale du gamay
Bon, faute de Rochegrès, j’ai quand même trouvé un Rochelle, récolté à cent mètres de chez moi. Rochelle, c’est un terroir qui, pour moi, fait partie d’un triangle d’or avec Rochegrès et les Caves, pointe sud des moulin-à-vent de chénas, côté fleurie. Pas d’argile, du granit et du soleil compensé par une altitude de trente à quarante mètres au-dessus du Moulin. Et, sans doute, l’expression la plus minérale du gamay de tout le Beaujolais avec une longévité comparable à celle d’un beau chambertin, trente ans ou plus n’épuisant pas les vins les mieux faits des bons millésimes et, même, les mettant encore plus en valeur.

Merveilleux 2018
Ma chère voisine Anita Kuhnel, la reine du lieu-dit les Caves, cent mètres plus au sud, juste sous ma fenêtre, vendait la production de sa petite parcelle à un autre ami et remarquable producteur. Elle préfère désormais, on la comprend, la vinifier elle- même avec la simplicité, l’honnêteté et le talent qu’on commence à lui reconnaître et une viticulture pas encore idéale, mais en constant progrès. Il est en effet très difficile de retravailler des sols trop longtemps désherbés ; par petites touches on y arrive tout en respectant les vieilles souches si fragiles sous les griffes du tracteur.
Le climat merveilleux de 2018 lui a permis de surpasser encore ses remarquables 2016 et 2017 : magnifique couleur, fruit idéal, équilibre chaleureux mais sans lourdeur, et surtout magnifique expression du sol, avec disparition de tous les clichés aromatiques habituels (fruits rouges, vernis à ongle, bonbon anglais, etc.) qui ont abâtardi tant de vins de la région. Bref, un vrai beau vin qui vivra longtemps et qui se différencie de celui des Caves par une tension minérale plus vive, un peu moins de chair, peut-être plus de finesse. Si l’on survit à ce maudit virus, ce qui ne semble statistiquement pas trop ambitieux, on le suivra patiemment dans son évolution.
Domaine Anita, Rochelle, moulin-à-vent 2018
https://www.domaine-anita.com/

Le quotidien du vignoble raconté par les vignerons

Initiative commune de la structure Vin & Société, qui représente les 500 000 acteurs de la vigne et du vin en France, et de l’agence de communication La Bicyclette de Paul, spécialisée en vins, champagne et spiritueux, une invitation a été lancée aux vignerons afin qu’ils partagent leur quotidien sur les réseaux sociaux à travers des photos et des vidéos, autant d’occasions « d’ouvrir une fenêtre sur un monde et ses paysages, de faire découvrir aux Français la richesse d’un métier pas comme les autres. »

Sous le poétique hashtag #LaVigneContinue, l’amateur pourra ainsi suivre au fil de leurs partages le travail effectué dans les caves autour du millésime 2019 ou celui mené dans les vignes en vue du millésime 2020. Véritable bol d’air pour les confinés, cette initiative « résolument positive, solidaire et résiliente » se veut également être une opportunité de relayer les initiatives d’entraide que les vignerons mettent en place afin de surmonter les difficultés économiques.

« Le monde agricole, acteur indispensable à la vie économique et alimentaire du pays, poursuit son activité en cette période inédite de crise sanitaire, à chaque fois que cela est possible, dans le respect de la sécurité de chacun »