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Inoubliable année 2013

Déjà largement commenté (voir ici et ), le millésime 2013 à Bordeaux va faire l’objet de toutes les attentions la semaine prochaine à l’occasion de sa présentation en primeur. En attendant l’avis de ceux qui vont le goûter, revenons à ceux qui l’ont fait et qui, de la vigne au chai, ont du composer avec une année extrêmement difficile. « Le millésime le plus compliqué depuis trente ans » dit même un propriétaire de Léognan, remontant à un « médiocre 1984 ».

Du côté de Château Castera (cru bourgeois, Haut-Médoc), on se dit agréablement surpris par le résultat. Pour Jean-Pierre Darmuzay, directeur commercial du domaine, si ce 2013 n’est pas fait pour la garde, c’est un vin « fruité et souple » avec beaucoup de fraîcheur. Un « millésime de transition », qu’il faudra boire avant ses aînés. Il note aussi une chose amusante dans l’appréciation qui est faite de cette année exceptionnelle en « calamités ». D’après ses discussions avec ses confrères, il estime que les jeunes n’ont pas vu un tel millésime « depuis 2002, voire 1997 ». Les moins jeunes évoquent 1993 et 1992, ceux qui ont un peu plus d’expérience « n’hésitent pas à dire que c’est un mélange de 1987 et 1984 » et les plus anciens se réfèrent à 1977, 1972, voire 1963. Ou l’art de savoir relativiser.

A Margaux, Frédéric de Luze, propriétaire du cru bourgeois Château Paveil de Luze, confirme après une discussion avec son père qu’il faut bien remonter aux années 70 pour retrouver des situations similaires à cette année viticole. Heureusement, la viticulture a beaucoup changé depuis, se dotant« de moyens de plus en plus précis, permettant de mettre en oeuvre des conditions optimales pour produire des vins de qualité. » Même en cas de très grosse pression des maladies. « Au Paveil, la vigne est soignée avec frénésie par le responsable Stéphane Fort et nous avons engagé tout ce qui était possible pour protéger le vignoble. C’est une visite quotidienne des parcelles qui a fait que nous étions prêts pour vendanger une dizaine de jours avant ce qui était prévu et avons pu anticiper la pression du botrytis. »

A propos de la virulence du champignon, Christian Hostein, le chef de culture de Château Talbot (Saint-Julien), grand cru classé en 1855, confie que certains ont parlé de « génération spontanée. » Quant à la « funeste » coulure, elle n’avait pas autant impacté le volume de récolte depuis 1984. « Le vigneron est souvent pessimiste et puis, à la fin des vendanges, quand toute sa récolte est rentrée, un grand sourire illumine sa face et d’un seul coup efface les affres de l’attente. Il est récompensé de ses efforts. Cette année, pas de sourire, nous avons péché par orgueil et nous avons cru jusqu’à fin septembre que la récolte, sans être grasse, serait correcte. »

Même constat à Château Sénéjac (cru bourgeois, Haut-Médoc) où le directeur technique, Damien Hostein, estime qu’après les travaux en vert, « on se rassurait à tort en contemplant ces grappes de cabernet sauvignon qui paraissaient deux fois plus généreuses que les merlots. Cet excès d’optimisme mal venu fut vite effacé dès les premières parcelles de cabernets vendangées. » Après un temps froid et des dizaines millimètres de pluie lors de la floraison, « les merlots étaient coulés et les cabernets sérieusement atteints » et seule restait sur pied l’équivalent d’une grosse demi-récolte. Tout récemment, quand le travail au vignoble a repris, souhait était fait d’« un 2014 plus généreux. »

Ce vœu est partagé par le propriétaire de Château Rouillac » (Pessac-Léognan), Laurent Cisnerot. Si les sourires sont revenu une fois les assemblages effectués, « considérant que la vie de vigneron est ainsi faite, de hauts et de bas, mais toujours de passion », la rareté de ce millésime est préoccupante. « Nous avons travaillé de façon acharnée toute l’année pour voir seulement quelques précieuses barriques se reposer dans notre chai d’élevage, ce qui nous donne un sentiment d’inachevé qu’il nous faudra toutefois assumer, travaillant sans relâche déjà le futur millésime qui nous redonnera, nous l’espérons, le souffle nécessaire. » 


Epuisant 2013. Un surprenant numéro selon Jean-Francis Pécresse, propriétaire de Château Canon Pécresse à Fronsac. « Il est comme ces élèves qui ne devaient pas décrocher leur baccalauréat et qui l’obtiennent à la surprise générale. Certes pas avec les félicitations du jury mais avec tant de mérite que cela leur vaudrait bien une mention. Oui, il revient de loin ce millésime, mais cela nous rend d’autant plus fiers du résultat obtenu. Et, après tout, pourquoi ne marcherait il pas sur les traces de ces aînés injustement méprisés devant lesquels, dix ans, vingt ans plus tard, les contempteurs les plus sévères ont si souvent fait amende honorable ? »

Au Château Marquis de Terme (Margaux), on s’en souviendra aussi. Ludovic David, le directeur général de ce grand cru classé 1855, la caractéristique du millésime est d’être « inoubliable de complexité » dans son élaboration. « Avec bientôt 25 ans de vinifications en France, à Bordeaux, à Pomerol, à Saint-Emilion, à Margaux, en Afrique du Sud ou en Californie, je n’avais jamais connu une telle difficulté d’appréhension des vendanges. Une quadrature du cercle à résoudre, une équation à multiples inconnues où l’objectif reste cependant irrémédiablement le même, élaborer un grand vin. » La liste des difficultés rencontrées cette année est selon lui « bien longue et parfois pathétique », le très faible rendement, imputant l’équilibre économique, est « d’un autre siècle » et les mots “sélection” et “rigueur” ont «rarement eu autant de sens. »

Si la complexité à vinifier ressentie par tous ne préjuge en rien du résultat, la météo a bien fait des dégâts côté rendement. Pas moins d’un million d’hectolitres manquent à l’appel au total en Gironde. Si l’on y ajoute les sélections sévères pratiquées au chai, on peut imaginer les faibles quantités qui seront proposées par les grands crus. On se consolera en apprenant que les blancs, secs ou liquoreux, tirent superbement leur épingle du jeu. « Le millésime 2013 est, comme tous les millésimes tardifs, propice à l’élaboration de très grands vins blancs », rappellent Eric et Philibert Perrin, propriétaires du grand cru classé de Graves Château Carbonnieux. Que les amateurs ne l’oublient pas.

Les primeurs du Sud-Ouest


Acheter un vin en primeur, c’est acheter maintenant le millésime 2013 qui vous sera livré en 2015. Si le 1er avril, les projecteurs seront braqués sur la place de Bordeaux et les prix de sortie de ses grands crus, il existe des ventes en primeur ailleurs. Propriétaire des châteaux Montus et Bouscassé (Madiran), infatigable ambassadeur des vins du Sud-Ouest, producteur de vins de grande garde et leader des primeurs hors Bordeaux, Alain Brumont organise des ventes de vins par souscription depuis 1985 et réserve cette année encore 50 % de ses vins au marché français.

Jusqu’à présent, il n’offrait qu’à ses plus fidèles clients la possibilité « d’échanger » un vin contre un autre. Aujourd’hui, il a décidé de rendre accessible à tous ce concept de « millésime convertible », à condition bien sûr de se charger du vieillissement des vins. Cela signifie que les bouteilles de 2013 que vous pourrez commander dès mardi (et pendant trois mois) seront gardées en cave gratuitement pendant 10 ans et que vous pourrez à tout moment de cette période, pour un événement important et sous réserve de disponibilité, les échanger contre n’importe quel millésime. Vous pourrez également, après une dégustation dans trois ans (au minimum), échanger ce millésime contre un autre, cinq ans en amont ou en aval, pour la bonne raison qu’il ne vous plaît pas.

La Loire, mode d’emploi

Cépages uniques

Plutôt que par la géographie, on peut aborder les vins de Loire et le tourisme viticole dans la région par les cépages. En effet, c’est une particularité de ce vignoble que de produire des vins issus pour la plupart d’un cépage unique. Dans le pays nantais, c’est le melon de Bourgogne implanté au XVIIe siècle. En Anjou, Saumur et Touraine règnent chenin, cabernet franc, gamay et grolleau. La Touraine offre une palette plus variée encore, ajoutant aux précédents le sauvignon, le côt et le pinot noir.

Fines bulles

Première région productrice de vins blancs d’appellation, la Loire est aussi la première région hors Champagne à compter des appellations d’origine contrôlée de vins à fines bulles. Ils sont élaborés de façon traditionnelle dans les caves saumuroises et tourangelles depuis le XIXe siècle. A Saint-Hilaire-Saint-Florent, toutes les maisons productrices sont réunies dans la même rue. Chez Langlois-Château, le maître de chai se fait maître d’école pour expliquer aux visiteurs les étapes de la vinification, des pressoirs à la cuverie. Ses élèves d’un jour le suivent ensuite au long d’un parcours souterrain où vieillissent près de trois millions de bouteilles pour étudier ce que sont la prise de mousse, le remuage et le dégorgement. Une découverte de deux heures qui se termine par une dégustation comparative.

Pays troglodyte

Sous le Val de Loire, littéralement, se cache le plus grand ensemble de cavités existant en Europe. Avec le temps, ces anciennes carrières de tuffeau – pierre tendre dont on a fait des châteaux – sont devenues des maisons, des champignonnières ou des caves où les vins vieillissent idéalement, à température constante. Ces dernières années, des dizaines de ces sites ont fait l’objet d’un rendez-vous spécifique, le temps d’un week-end, organisé par l’association Carrefour des Troglodytes Anjou – Touraine – Poitou. Occasion unique de découvrir le monde souterrain de la région, cette manifestation se tient tous les deux ans. On peut aussi découvrir ces merveilles cachées en sous-sol au hasard d’une visite chez un vigneron ou encore profiter des ouvertures pendant les Journées du Patrimoine. D’autres sites sont ouverts toute l’année, comme celui de Doué-la-Fontaine près de Saumur, qui retrace l’histoire de l’architecture troglodytique du Moyen Âge à nos jours.

La label national de l’oenotourisme

Depuis sa création en 2009, vingt-quatre destinations viticoles ont été distinguées par le label « Vignobles & Découvertes ». Attribué pour une durée de trois ans par les ministres en charge du Tourisme et de l’Agriculture, ce label dédié à l’oenotourisme permet aux visiteurs de s’orienter vers des prestations qualifiées (hébergement, restauration, visite de cave et dégustation, musée, événement, etc.). Pour les professionnels de la viticulture comme du tourisme, c’est la garantie d’une meilleure lisibilité de leur région et de ses spécificités grâce à un outil de valorisation et de repérage qui permet d’accroître la fréquentation. C’est aussi une belle occasion d’enrichir encore son offre touristique par la mise en réseau des capacités et des attraits de chacun.

Points de départ

De nombreux sentiers jalonnés de panneaux d’explications sur le vignoble permettent aux marcheurs de comprendre le paysage qui s’offre à eux sans avoir à attendre le premier week-end de septembre. Certains d’entre eux font partie des parcours d’oeno-tourisme du Réseau des vignobles du patrimoine mondial. Dans l’AOP chinon, le circuit découverte de sites historiques part de Panzoult. Au cœur des Coteaux du Layon, la balade part de Saint-Aubin-de-Luigné et file à travers les AOP coteaux-du-layon villages, quarts-de-chaume, bonnezeaux. Au départ de la place de l’église de Saint-Jean-des-Mauvrets, c’est la vigne au fil du temps qui se dévoile dans les appellations anjou-village-brissac et coteaux-de-l’aubance. Pour aller de vignes en villes, dans l’AOP saumur-champigny, on partira de la place des Ardilliers à Saumur. Pour la vallée du Cher et l’AOP touraine, départ de Pouillé. Une promenade entre vignes et vergers part du stade de Vallière (AOP touraine-azay-le-rideau) et celle des bords du Loir (AOP jasnières) prend sa source à Lhomme.

Loire 2.0

Outre le très complet site vinsdeloire.fr qui permet de découvrir les différentes AOP, les caves labellisées, les Maisons des vins, les territoires à visiter et les différentes façons de le faire (itinéraires, séjours, etc.), ses classiques déclinaisons pour smartphones et les nombreuses pages Facebook consacrées aux appellations comme aux événements oeno-touristiques, le vignoble du Val de Loire fait aussi parler de lui à des endroits plus inattendus. Autre approche, toujours via la vidéo, la chaine Vins de Loire sur Youtube permet de découvrir en image une quarantaine d’appellations, du muscadet au jasnières. Plus de détails sur le site.

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Invitation à la promenade

C’est à vélo que s’ouvrira la saison des randonnées dans la Loire, du 28 mai au 8 juin, un parcours VTT offrant 280 kilomètres de circuits balisés et classés de vert pour « très facile » à rouge pour les plus expérimentés. Ce parcours a été labellisé par la Fédération française de cyclisme (FFC).

Chaque année, sur inscription, la TransLayon rassemble des milliers de participants pour des circuits de découverte à vélo, mais aussi à pied et à cheval à travers le vignoble. Ces journées sportives et festives à travers les plus beaux terroirs de l’Anjou ne négligent évidemment pas le vin ou la gastronomie, des haltes étant prévues chez les vignerons membres du réseau « Bienvenue dans les vignes ».

La Loire et le vélo, c’est une histoire déjà ancienne. Dès 1995, les régions Centre et Pays de la Loire coopéraient pour mettre en place une vélo-route le long de la Loire. De tronçon en tronçon, cet itinéraire propose aujourd’hui 800 kilomètres d’un parcours unique en France, alternant routes à faible circulation, voies vertes, routes sans transit et pistes cyclables. Pour les 700 000 cyclistes qui l’empruntent chaque année, un label spécifique « accueil vélo » a été mis en place afin de signaler les caves touristiques et les centaines de prestataires concernés par ces cyclo-touristes, c’est-à-dire disposant des services et équipements nécessaires à cette pratique, du stationnement adéquat à la réparation en passant par le transfert de bagages.

D’innombrables parkings sont disposés le long du parcours et, cet été encore, on pourra interrompre la balade à tout instant pour la reprendre ailleurs grâce à un partenariat avec la Sncf. Du 15 juin au 15 septembre, sur la ligne TER qui longe le fleuve d’Orléans jusqu’au Croisic, des wagons aménagés accueilleront les cyclistes et leurs cycles sans plus de frais qu’un billet classique.

Organisé par l’interprofession des vignerons, qui regroupe plus de cinquante appellations du pays nantais, de l’Anjou, de Saumur et de Touraine, le rendez-vous qui fermera la saison estivale se tiendra les 6 et 7 septembre 2014. Événement phare de l’oenotourisme en Val de Loire, « Vignes, vins & randos » fête cette année son onzième anniversaire. Chaque année, des milliers de participants arpentent le vignoble, guidés par les vignerons, en groupe d’une quarantaine de personnes. Pour l’édition 2014, quinze randonnées différentes sont prévues, dans seize AOP. Equipés d’un kit du randonneur, sac à dos, carte et quizz, les marcheurs partent à la découverte des paysages du vignoble de Loire, mais aussi de ses différents cépages et des vins qui en sont issus.

La balade est ponctuée de pauses gourmandes qui mettent en valeur les traditions et savoir-faire locaux, rillons, fromages de chèvre et pommes. S’y ajoutent différents concerts dans les vignes dans des genres musicaux allant du jazz manouche au classique.

Crédit photo : Stevens Fremont

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La Conseillante s'agrandit

Propriétaire depuis plus de 140 ans du château La Conseillante, propriété parmi les plus emblématiques de Pomerol, la famille Nicolas vient d’adjoindre à son vignoble de 12 hectares, composé de 18 micro-parcelles, une parcelle de merlot âgée de 25 ans appelée La Gravette.
Plantés à une densité de 6 060 pieds par hectare, ces 31,5 ares de sol graveleux situés sur l’un des grands terroirs du plateau de Pomerol se rapprochent de l’une des meilleures parcelles de La Conseillante. Après avoir doté son domaine d’un cuvier parcellaire de vingt-deux cuves et de nouvelles installations, la famille innove encore avec cette acquisition qui fait figure de petite révolution dans la vie d’un vignoble resté inchangé depuis le XVIIIe siècle.


BlasonLaConseillante

Primeurs : Pontet-Canet annonce la couleur

C’est Terre de Vins qui l’annonce, le grand cru classé de Pauillac a dévoilé ce matin le prix de sortie de son 2013, avant le début officiel de la campagne des primeurs. Il sera rigoureusement identique à celui du millésime 2012, soit 67, 40 euros. L’article complet est à lire .

La reine des chefs

Elle est brésilienne et avait déjà remporté l’année dernière le prix Veuve Clicquot de la « Meilleure Femme Chef d’Amerique Latine ». Helena Rizzo est désormais la « Meilleure Femme Chef au Monde ». Ce prix lui sera remis à Londres le 28 avril lors de la cérémonie des 50 Meilleurs Restaurants du Monde (The World’s 50 Best Restaurants 2014).

Arrivée à Sao Paulo à l’âge de 18 ans afin de poursuivre une carrière de mannequin, Helena Rizzo travaille à temps partiel dans les cuisines. Elle tourne très vite le dos à la mode pour se consacrer à la gastronomie. Après avoir travaillé avec les personnalités brésiliennes les plus influentes dans ce domaine (Emmanuel Bassoleil, Luciano Boseggia, Neka Barreto), Helena Rizzo passe deux ans à diriger la cuisine du Na Mata Café à Sao Paulo avant de partir pour l’Europe.

En Italie puis en Espagne, notamment dans le restaurant le mieux classé de la liste des 50 meilleurs au monde (El Celler de Can Roca), elle perfectionne ses compétences, recherche de nouvelles techniques et rencontre son futur mari et partenaire en cuisine, le chef Daniel Redondo. C’est ensemble qu’ils envisageront la suite de leur aventure gastronomique et ouvriront en 2006 leur restaurant Mani (qui figurait en 2013 à la 46e place du même classement des 50).

Leur cuisine intelligente, respectueuse des ingrédients et des pratiques gastronomiques traditionnelles du brésil, est parsemée d’influences espagnoles. Le plat qui incarne la cuisine de Rizzo, qui publiera cette année son premier livre de recettes, est l’interprétation qu’elle fait du classique brésilien manioca, cuit au four et servi avec une mousse de tucupi, lait de coco et huile à la truffe blanche.



C’est en toute humilité qu’Helena Rizzo a accueilli l’annonce de ce prix qu’elle considère comme une reconnaissance de son travail et de celui de toute l’équipe du Mani. « Chacun de nous peut être le meilleur dans une situation particulière, à un moment donné, pour une certaine personne. (…) Au Mani, nous essayons de faire de notre mieux tous les jours, parfois nous nous trompons, mais parfois nous faisons bien les choses. J’espère que ce prix ouvrira les yeux du monde gastronomique sur le travail des chefs féminins et les plats merveilleux que nous avons au Brésil. »

Le triomphe du cabernet-franc

L’appellation Saumur-Champigny forme un triangle géographique délimité au nord par la rive gauche de la Loire, à l’ouest par son affluent le Thouet et à l’est par la forêt de Fontevraud. Ces frontières claires et précises renferment les localités de Chacé, Dampierre, Montsoreau, Parnay, Saint-Cyr-en-Bourg, Souzay-Champigny, Turquant, Varrains et Saumur, formant ainsi les 1 500 hectares de l’appellation.

D’un point de vue géologique, Saumur-Champigny appartient au Bassin Parisien (contrairement à l’Anjou situé dans le Massif Armoricain). La richesse argilo-calcaire du sol est marquée par la présence bénéfique en sous-sol d’une craie particulière appelée tuffeau qui joue un rôle de régulateur. En effet, cette roche de type calcaire du crétacé supérieur (ère géologique située entre -100 et -65 millions d’années) permet d’absorber les précipitations hivernales et de les restituer durant les périodes de sécheresse estivale, la vigne obtenant ainsi son quota d’eau régulier pour un développement harmonieux. Les débris variés qui recouvrent ce tuffeau transmettent aux vins des caractères différents. Les sables et les graviers donnent des vins plus fins tandis que les argiles favorisent une structure plus imposante qui permet une bonne garde.

Les cépages

Des grappes de cabernet-franc
Des grappes de cabernet franc

Si le cabernet-sauvignon, le pineau d’Aunis et le cabernet franc sont les cépages autorisés, le cabernet franc s’impose comme le roi absolu du vignoble, tant au niveau cultural qu’organoleptique. Il règne ici sans partage.
La vigne est présente sur le Saumurois depuis le Moyen-Âge, avec la plantation de cabernet franc autour de l’abbaye de Fontevraud. Ce cépage convient le mieux aux terroirs de tuffeau, il apporte à la fois distinction et structure. On en apprécie les flaveurs de fruits rouges, de petites baies noires et de violette lorsqu’il arrive à bonne maturité. Lorsqu’il n’est pas suffisamment mûr, il prend des accents de poivron vert qui rappelle bon nombre de vins des années 1980-1990. Deux autres cépages sont autorisés dans le décret d’appellation de 1957, le cabernet-sauvignon recherché pour ses accents de cassis et de tabac dans les millésimes chauds et le pineau d’Aunis pour ses touches poivrées. Ils sont aujourd’hui pratiquement abandonnés, car excepté sur des millésimes comme 1976 ou 2003, le cabernet sauvignon a du mal à mûrir. Trop léger, le pineau d’Aunis a presque totalement disparu.

L’originalité du climat

Vue du Vignoble Langlois-Chateau avec en fond le Château de Saumur

L’originalité de Saumur-Champigny repose sur son climat. En effet, cette AOC est située à la limite est de l’influence océanique. S’étageant en lignes de coteaux parallèles à la Loire, le vignoble bénéficie d’une situation propice à une bonne maturation.

La protection du relief des Mauges, de la forêt de Fontevraud et des cours d’eau comme le Thouet et la Loire protègent contre les excès d’humidité avec une moyenne pluviométrique de 500 mm/an alors que les grandes villes voisines comme Angers ou Cholet dépassent respectivement les 630 et les 740 mm/an. Il faut rappeler que la moyenne nationale se situe autour des 900 mm/an. En ce qui concerne les températures, Saumur-Champigny avec une moyenne à l’année de 15,7° est la zone la plus chaude de la région. Le nom Champigny a d’ailleurs des origines latines : « Campus Ignis » qui signifie « champs de feu ». Ainsi, l’un des avantages de cette situation est de bien emmagasiner le jour la chaleur solaire pour mieux la restituer la nuit.

Les différentes expressions des vins

Entre Varrains, Chacé et la fosse de Chaintres, sans oublier Dampierre, Souzay et Saumur, les meilleurs terroirs turoniens donnent une expression et une structure aux vins qui permettent un bon mûrissement après la mise en bouteille.
Turquant, Parnay, Montsoreau et Saint-Cyr sont des terroirs plus froids où pour obtenir une juste concentration il faut vendanger plus tard. Ces villages réussissent bien les années un peu chaudes comme 2003 ou 2009.
Notons toutefois que les parcelles déterminent en grande partie les styles des vins. Avant l’obtention de l’AOC, on buvait avant tout un lieu-dit selon un modèle très bourguignon. Du vin de Pâques gourmand et fruité au cru de garde charpenté et tannique qui défie le temps, chacun peut trouver son bonheur. Plus qu’ailleurs sur la Loire, il faut louer le caractère coulant des saumur-champigny, contrairement à leurs voisins de Saumur ou d’Anjou aux tanins plus rigides.
Ces rouges s’apprécient sur le fruit de la jeunesse avec leurs accents de framboise, groseille, cerise noire, cassis ou mûre. Ce qui fait la différence au niveau de la subtilité d’un cru, ce sont les arômes d’iris et de violette. Ceux-ci se retrouvent dans tous les grands vins rouges lorsqu’ils sont juvéniles. Par la suite, ils évoluent très souvent vers la truffe, un arôme qui anoblit le vin.

Saumur-Champigny s’est engagé dans un programme de biodiversité sur l’ensemble de l’appellation. Un réseau de haies d’arbustes aux essences diverses a été planté pour abriter les oiseaux et les insectes. Cela aidera au rééquilibrage naturel de la plante pour lutter contre les attaques de maladies. Cette initiative permettra à chaque vigneron de mieux connaître les prédateurs de la vigne, notamment les insectes. Cette expérience unique en Val de Loire est suivie de près par tous les autres vignobles.

La longue marche de Saumur-Champigny

Le catalogue 1930 de Nicolas est édifiant sur la cotation des meilleurs champigny : le clos-cristal 1924 est vendu 15 francs, le château-de-villeneuve 1921, 20 francs. Un prix identique pour le même millésime de Cos d’Estournel et de Brane-Cantenac, Lynch-Bages ne valant que 10 francs. On comprend mieux la notoriété de ces vins qui en outre bénéficiaient du travail qualitatif et du dynamisme commercial d’Antoine Cristal, figure emblématique du champigny. A cette époque, l’arrière-grand- père de Charly et Nadi Foucault vendait ses rouges aussi chers que les seconds grands crus classés du Médoc. Et les ambassades européennes se les arrachaient. Pour avoir dégusté le château-de-villeneuve 1921 et le clos-rougeard 1923, on reste confondu par l’équilibre et le fruité de ce type de cru. La Seconde guerre mondiale perturbe cette hiérarchie. En 1945, les rosés moelleux et les saumurs se taillent la part du lion. L’obtention de l’AOC en 1957 constitue une étape décisive pour le renouveau de ces crus, même si la majorité des vignerons oublient le style raffiné des 1921 ou des 1923. Ceux-ci possèdent en effet une matière plus noble que la grosse cavalerie produite au milieu des années 1980. Rappelez-vous, à Paris et dans toutes les grandes villes françaises, la mode était alors au saumur-champigny servi très frais, arborant des notes de fruits rouges, mais dotés de peu de matière. Économiquement, le saumur-champigny devient plus rentable, beaucoup de vignerons du Saumurois arrachent alors leurs parcelles de blanc pour replanter des rouges. Les rendements sont confortables, certains n’hésitant pas à produire 100 hl/ha. Néanmoins, des domaines comme Filliatreau, Daheullier, Pisani ou Duveau offrent à côté de leurs vins de soif des cuvées plus concentrées, provenant généralement de leurs vieilles vignes. Pourtant, il n’y a pas encore de véritable démarche de terroir, sauf chez les frères Foucault qui font figure à l’époque d’extra- terrestres. Dès 1969, ils travaillent de la façon la plus naturelle possible, ne dépassent pas 40 hl/ha et élevant leurs vins dans des barriques ayant contenu des premiers crus bordelais. Ils obtiennent des vins profonds capables de défier le temps, mais ce n’est qu’à partir des millésimes 1988, 1989 et 1990 que l’on commence à parler des deux moustachus de Chacé. Ils constituent alors un modèle cultural et culturel pour toute la génération montante du Saumurois qui s’affirme avec Jean-Pierre Chevalier au Château de Villeneuve, les Vatan au Château du Hureau ou Thierry Germain aux Roches Neuves au milieu des années 1990.

La relève

Dans le sillage de ces précurseurs, les meilleurs vignerons de l’appellation voient croître la demande pour leurs grandes cuvées. Une remise en cause salutaire se met en place. Celle-ci entraîne d’importants changements, dont une baisse des rendements et un élevage plus long, l’objectif étant d’obtenir des vins plus concentrés, sans pour autant abuser d’une extraction trop poussée. A l’image du Grand Clos du Château de Villeneuve, les sélections parcellaires se développent et, de plus en plus, chaque cuvée est réfléchie en fonction d’un terroir spécifique. Néanmoins, ce type de démarche reste encore beaucoup trop timide car l’assemblage des parcelles et l’âge des vignes restent majoritaires pour l’élaboration des crus. Cette tendance tend à régresser avec l’arrivée d’une nouvelle vague de vignerons, soucieuse de travailler la vigne de la façon la plus naturelle par rapport à un terroir précis. Les vins au fruité pur et à la texture raffinée se multiplient, de nouvelles figures émergent : Yves et Arnaud Lambert, Eric Dubois, son cousin Bruno, Antoine Sanzay, Mathieu Vallée, sans oublier le renouveau du Clos Cristal.

2009 est exceptionnel pour ceux qui ont su garder de la fraîcheur, il faut en effet se méfier des degrés trop forts qui donneront des vins complètement déséquilibrés. Sur ce type d’année les ténors du Champigny ont certainement réalisé leur meilleur millésime. Il y a à la fois de la richesse, de la souplesse et surtout de la fraîcheur ; c’est le type de millésime à encaver en magnum.

Michel Bettane

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La Chine, l'Europe et le vin de Bordeaux

Bernard Farges, le président du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux (CIVB) se félicite de l’accord conclu entre les représentants des filières viticoles européenne (Comité européen des entreprises vin) et chinoise (Chinese Alcohol Drinks Association). La procédure d’enquête antidumping et anti-subventions sur l’exportation des vins européens lancée en juillet 2013 par les autorités chinoises est abandonnée.

« Cet accord consiste en la mise au point, sur les deux prochaines années, d’un programme d’actions d’assistance et de coopération entre l’Union Européenne et la Chine, dans différents domaines allant de la technique et la recherche à la promotion. Ces actions permettront un approfondissement de la connaissance réciproque entre opérateurs européens et chinois. »

3 500 entreprises bordelaises avaient déjà répondu à la demande d’enregistrement prévue par cette enquête et du côté européen comme en Chine, premier pays d’exportation en volume et 2e en valeur pour les vins de Bordeaux en 2013, les autorités avaient appelé à un dialogue entre les professionnels.

Il a bien eu lieu et a permis, précise Bernard Fargues, de « dépasser les suspicions initiales. Le programme de coopération renforcera les relations entre l’Union Européenne et la Chine et permet d’envisager, avec l’abandon de la procédure d’enquête, le futur de nos exportations sur ce marché stratégique dans un climat apaisé. »

Derenoncourt et le millésime 2013, une mise au point

En accordant une interview au Figaro, Stéphane Derenoncourt a déclenché une tempête de réactions. Que ses mots aient dépassé sa pensée ou que la rédaction du quotidien ait été obligé de raccourcir le texte d’origine, le mal était fait et nombreux sont ceux qui nous ont dit leur rancœur. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi de poser la question qui fâche au célèbre consultant, pour qu’il puisse s’expliquer, se justifier. Regardez cette excellente interview, elle apporte un éclairage nouveau. La parole est à la défense.

Nicolas de Rouyn