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Place aux jeunes


Les vignerons indépendants viennent de se doter d’une nouvelle section « jeunes vignerons indépendants ». Son président, élu le 12 avril, s’appelle Mathieu Rozel. Il est vigneron dans la Drôme et jeune de vingt-six ans. C’est épaulé par deux vice-présidents, Anne Dubois de Montreynaud, vigneronne dans l’Hérault, et Thomas Collonge, vigneron du Rhône, qu’il dirigera cette section composée de 28 membres nommés par leurs fédérations départementales respectives.

Le président des vignerons indépendants de France, Michel Issaly s’est dit « très heureux de la création de cette section. Ces jeunes de moins de 40 ans nous remplaceront, nous, les « cheveux blancs », ils sont notre avenir, ils sont leur avenir, celui de leur métier, celui de la viticulture. C’est dans cet esprit que nous avons pris le parti de ne pas leur confier un dossier en particulier, mais de les laisser maîtres de déterminer les chantiers qu’ils souhaitent ouvrir et rejoindre. » 

L’objectif de ce nouveau groupe est de rendre plus audible la parole des jeunes vignerons et de mettre à profit le dynamisme dont ils font preuve sur leurs exploitations. Matthieu Rozel a remercié le conseil d’administration des vignerons indépendants et Michel Issaly pour leurs attentes et leur confiance dans cette nouvelle section. Il a précisé que l’une de ses premières missions sera « d’aider chaque membre à créer des commissions “jeunes” au niveau départemental ou régional, afin de créer
une dynamique au sein du réseau.
 »

Les mythes






Jeudi à Londres, dans le cadre d’une vente de charité au profit du fonds de soutien aux membres des Services Secrets britanniques en situation de précarité et de détresse, la maison de vente Artcurial mettait aux enchères
une rare bouteille de whisky The Macallan 1962, dont l’étiquette avait été signée par James Bond en personne, c’est-à-dire Daniel Craig, ainsi que par le bad guy de Skyfall, Javier Bardem. Ce whisky dont la distillation date de
la même année que le lancement de la saga cinématographique (avec Dr No) a été adjugé neuf mille six cents livres (on en lit plus ici en anglais).

Aujourd’hui, c’est à Paris que la même maison mettra en vente une sélection de quatre cent cinquante et un lots,
soit environ deux mille bouteilles, provenant de la cave de l’hôtel Crillon. C’est à 14 h 30, dans le cadre du palace tout récemment fermé pour une rénovation qui devrait durer jusqu’en 2015, que seront proposés différents grands crus classés, champagnes et eaux de vie, des plus accessibles (premier cru classé de Sauternes Château Climens 1996, 25 euros) aux plus exceptionnels, comme ce cognac Remy Martin Louis XIII composé d’un assemblage historique de près de mille deux cents eaux-de-vie conservé dans une carafe en cristal Baccarat, une pièce éditée
à 786 exemplaires et estimée 6 000-7 000 euros. Le catalogue est .

Qu'est-ce qu'on fait ce week-end ?





Le village Loupiac, et plus exactement son site gallo-romain, accueillera samedi et dimanche des producteurs
de liquoreux venus de toute la France. Sauternes ou Alsace, Coteaux du Layon ou Cote du Jura, ils seront une vingtaine à présenter leurs spécialités aux amateurs (la liste des exposants est ). Comme chaque année, l’ambiance de ce salon de vins, durant lequel l’Ecole du vin de Bordeaux proposera des initiations à la dégustation, s’adaptera au site qui l’accueille. Outre la visite des vestiges, les visiteurs comme les vignerons pourront assister à des combats de gladiateurs et participer à des ateliers, de mosaïque ou de calligraphie. Pour les enfants, chamboule-tout et promenades à dos d’âne sont prévus, ainsi qu’un atelier de confection de boucliers gallo-romains. Et puisque vous serez en plein cœur de ces appellations regroupées sous le nom de Sweet Bordeaux, pour quoi ne pas en profiter pour aller visiter, tout près de là, la Maison des vins de Cadillac, dotée depuis peu d’un Musée de la vigne et du vin qui vient de recevoir le Best Of Wine Tourism 2013 Or, dans la catégorie Art et Culture ?

Printemps des Liquoreux, lieu-dit Saint-Romain, 33410 Loupiac.
Samedi 20 avril 2013, de 10 h à 19 h. Dimanche 21 avril 2013 de 10 h à 18 h. Entrée libre
Pass dégustation (verre + accès à tous les exposants) : 4 €.
Visite du site archéologique : 3 €.

Les bordeaux 2012 en primeur, des dégustations difficiles

Michel Bettane revient de Bordeaux. Il a goûté des centaines de vins. Plusieurs fois. Ce qu’on appelle un avis autorisé. Il y en a très peu.

Plus que jamais les dégustations des bordeaux du millésime 2012 en primeur ont été un grand succès en matière de relations publiques, conduisant à Bordeaux des centaines de professionnels, journalistes ou marchands venus du monde entier. Plus que jamais également les échantillons ont été variables d’un jour sur l’autre, parfois d’une heure sur l’autre, et d’une bouteille à l’autre, sans faire fléchir la détermination de nombreux experts à en donner une description précise et porter sur eux un jugement assuré, immédiat et le plus souvent établi à partir de la dégustation d’un seul échantillon. Certes, cette semaine de dégustation a été retardée de plus de deux semaines en raison de la date elle-même tardive de la fin des vendanges, qui ont duré jusqu’à la troisième semaine d’octobre. Mais le froid continu des mois d’hiver et du début du printemps n’a pas fait bouger pour autant le vin en cave et les vins présentaient souvent une jeunesse extrême, avec des prises de bois plus ou moins harmonieuses, masquant souvent la nature du fruit et du tannin. Ces mêmes échantillons se montraient fragiles à l’air, ce qu’on pouvait facilement repérer en comparant la dégustation d’un échantillon issu d’une bouteille pleine et un autre de la même bouteille aux deux tiers vide : les arômes et les textures des deux présentaient souvent de notables différences pour un palais un peu affûté. On arrivait aux mêmes conclusions en assemblant au cours des dégustations horizontales à l’aveugle dans un même verre plusieurs vins de châteaux d’une même appellation, ce qui souvent donne une bonne idée du style général du millésime dans l’appellation concernée. Cette année, aucun vin ne s’assemblait correctement avec un autre, soulignant ainsi le manque de stabilité de chacun de chaque échantillon. Dans ces conditions, beaucoup de dégustateurs ont eu tendance, on le comprend, à se sentir plus à l’aise avec les vins les plus avancés, soit par un boisé plus prononcé et flatteur, soit pour des vins blancs par des remuages de lies récents, accentuant les arômes, mais interdisant par là une vision précise de la structure du produit, de son rapport au terroir et au millésime.
Plus déconcertant encore, le choix de présentation des échantillons par les producteurs eux-mêmes pouvaient différer du tout au tout. La principale différence tenait comme toujours à la philosophie générale de travail. Sur la Rive gauche, dans la majorité des cas, les assemblages définitifs se font en janvier et en grand volume, avec une forte proportion de vin de presse (souvent supérieure à 10 %) qui structure plus fermement les tannins. Sur la Rive droite, les lots issus de chaque cépage et de chaque parcelle sont élevés beaucoup plus longtemps à part avec à la clé des échantillons préparés uniquement pour ces dégustations, et une façon différente d’extraire les tannins en vinification rend les vins de presse beaucoup moins utilisables. Lorsqu’ils dégustent à l’aveugle de nombreux journalistes étrangers et même français ne connaissent absolument pas l’état d’évolution des échantillons et, hélas (nous l’avons vérifié), ne se doutent même pas de l’existence de ces différences. Par ailleurs, les propriétaires et leurs maîtres de chais changeaient souvent, d’un jour à l’autre, d’origine de barriques, trouvant un jour les tonneaux X plus aimables et le lendemain les tonneaux Y, avec toutes les différences aromatiques et tactiles qu’on peut imaginer. On le voit, le casse-tête reste entier et nous insistons encore pour que les amateurs n’accordent pas à nos premiers commentaires une valeur définitive.

Un millésime de caractère
Aucun millésime récent n’a présenté un profil comparable et ne peut servir de point de repère. Qu’on en juge.
Une fin de vendange anormalement tardive vers le 20 octobre pour les derniers cabernets et sous un déluge d’eau, mais un début de vendange fin septembre des plus normaux, sous un soleil radieux, le tout lié à une très grande hétérogénéité dans une même parcelle et, parfois, sur un même pied de vigne. Le débourrement, la floraison et la véraison, très longs et très irréguliers, ont obligé les producteurs souhaitant faire du bon vin à un travail incessant pour corriger cette hétérogénéité en supprimant les raisins trop tardifs et en luttant sans cesse pour préserver les vignes des attaques de mildiou sur des sols constamment détrempés par les pluies incessantes du printemps.
L’été très chaud, très sec, inverse la donne, bloque les maturités sur les sols manquant de réserves en eau,
mais permet sur les meilleurs terroirs les arrêts végétatifs indispensables à la pleine maturité du raisin, atteinte le plus souvent sur les merlots et les cabernets francs ; plus difficile, mais possible, en raison des faibles charges sur les pieds, sur les cabernets-sauvignons, mais pas avant les 7 ou 8 octobre et très difficile sur le petit-verdot.
Hélas, dès les premiers jours d’octobre, la pluie tombe tous les jours, heureusement pas trop battante. Elle perturbe les vendanges et ce passage tourne au déluge vers le 18 octobre, mais il ne restait que quelques dizaines d’hectares non vendangés. Les extraordinaires progrès dans la réception et le tri du raisin ont sauvé la récolte des vins rouges. Difficile d’imaginer une façon plus douce d’égrapper que dans les égrappoirs actuels et impossible avec les tables de tri et les trieuses optiques de rentrer un raisin qui ne soit pas aussi parfaitement mûr et sain que possible.
Ce qui aurait donné des vins très irréguliers il y a encore quinze ans a produit des vins de tête complets, titrant souvent plus de 13° naturels (où sont passé les 11° des grands millésimes légendaires de naguère ou les 9°,5 des années pluvieuses ?), avec des indices tanniques de 65, 70, 75 voire 95 (record établi par Cos d’Estournel) infiniment supérieurs à ceux des 1928 , 1945 ou 1961. Les vins blancs secs rentrés eux aussi avant les pluies d’octobre sont mûrs et réguliers, mais pas toujours excitants. Enfin et hélas pour eux, les vins liquoreux du Haut-Sauternais ont gravement souffert des pluies finales et quelques crus célèbres ont décidé de ne pas sortir de grand vin, leurs meilleurs lots étant loin de valoir ceux des millésimes précédents. Seul un secteur de Barsac a pu,
en raison de sa précocité, procéder à une première trie de qualité digne du niveau actuel de la région et de l’attente du public.

Premières impressions
Les premières dégustations, corrigées par ce qu’on peut savoir du millésime et des raisins vus et goûtés pendant les vendanges confirment le caractère solide et complexe de cette année si éprouvante. Les arômes sont encore peu développés, mais assez caractéristiques des cépages et des terroirs et d’une très bonne maturité globale.
Les vins de la Rive droite, vendangés un peu plus tôt et donc un peu plus longuement élevés et un peu adoucis par les notes lactiques et vanillées de cet élevage, sont apparus à beaucoup comme les plus complets. Pour ma part j’y ai trouvé une grande diversité entre les grands terroirs et les terroirs secondaires. Les grands terroirs de Pomerol (et dans une mesure un peu moindre du reste du Libournais) ont donné des vins infiniment plus équilibrés,
très séducteurs et peut-être, si les prix baissent un peu, à nouveau à la portée des amateurs européens. Mais pour la garde longue (dix ans ou plus) et malgré leur tannin plus sévère (mais très racé pour celui qui sait déguster des vins jeunes) les cabernets de la rive gauche, harmonisés par des merlots supérieurs à ceux de 2011 et même de 2010, ont produit des vins de plus grande amplitude et densité de sève. La réussite semble homogène de Léognan à Lesparre, du moins dans toutes les bonnes propriétés. Reste la question des moins bons raisins, disparus des cuves destinées au premier vin et même aux seconds, objets eux aussi d’une sélection attentive. Leur vin n’est pas présenté dans ces dégustations primeurs et l’on ne peut guère espérer un niveau très intéressant contrairement à 2009, par exemple, où les vins « génériques » sont des plus agréables. Et, hélas, beaucoup de propriétés secondaires ne peuvent travailler comme les meilleures, ce qu’on retrouve dans des vins sans charme et sans personnalité qui ont de moins en moins de place dans un marché international qui pourtant ne demanderait qu’à les acheter.

Michel Bettane

Les Primeurs, c'est pas la vie de château

Plus de mille vins à déguster en une semaine, des échantillons à des stades divers d’avancement, des prises de bois plus ou moins intégrées avec des tanins harmonieux ou dissociés, voire parfois revêches. Et il faut multiplier les dégustations, de châteaux en syndicats viticoles puis en négociants pour vérifier que les échantillons concordent. Beaucoup de concentration est nécessaire, les journées sont interminables, les dents noircissent à vue d’œil dès les premiers rouges du matin et les gencives sont agressées par les tanins trop accrocheurs.

Et ce millésime 2012 ? 
Enterré par les tapageurs qui jouent du buzz, ceux que nous n’avons pas rencontrés dans les dégustations, mais qui savent. Défendu par ceux qui ont à le vendre, c’est assez normal.

À notre avis, il n’est ni premier de la classe ni support à bonnet d’âne. Il aurait été pitoyable il y a 30 ans, les pluies et les conditions sanitaires délicates l’auraient malmené. Mais la viticulture de grand cru sait désormais gérer ces millésimes délicats et ceux qui ont fait l’effort de trier ont été récompensés. Il ne faut pas chercher en 2012 la plénitude d’un 2010, mais on verra de la fraîcheur, le fil rouge du millésime dans toutes les appellations. Ce seront des vins de consommation plus rapide mais d’un réel intérêt. Si les sauternes sont inégaux, les barsacs s’en sont mieux sortis. Les pessacs sont bien réussis, les pomerols sont étonnamment harmonieux. Moins homogènes à ce stade, les saint-émilion comptent nombre de réussites. Sur l’autre rive, la réussite est assez générale de Pauillac à Margaux. Les saint-estèphe sont moins charmeurs, ils ont besoin de plus de temps, mais les chefs de file,
les seconds crus sont réussis et montrent le potentiel du millésime.

Après cette folle Semaine des primeurs, une autre phase complexe démarre pour les propriétaires. À quel prix de sortie fixer ce millésime ? Une partie de la presse internationale a jeté le bébé avec l’eau du bain, l’euro est fort,
la conjoncture économique occidentale ne brille pas et l’accueil par les Asiatiques d’un millésime qui sera peu spéculatif n’est pas clair. D’un autre côté, ce qu’il y a dans le verre n’est pas si mal et nous prenons sans risque le pari qu’on se régalera bientôt avec ceux des bons vignerons. Dilemme.
Tous les détails, vin par vin, avec les 600 meilleurs bordeaux 2012, à partir de lundi sur MyBettaneDesseauve.

Alain Chameyrat

Les primeurs, via Legrand






Comme tout autre achat de vins, mais peut-être plus que tout autre, l’achat en primeurs nécessite de prendre quelques précautions quant à la fiabilité, qui doit être absolue, du vendeur. Source hautement recommandable,
la Maison Legrand Filles et Fils réitère cette année son suivi en temps réel des sorties Primeurs 2012 en boutique et sur son site via ce blog (qui s’accompagne d’une newsletter quotidienne, d’un lien Twitter et d’un flux RSS,
il ne vous reste qu’à vous inscrire).

Dalmeran, l'accord parfait 2013





Nous vous avions parlé ici du prix organisé par Béatrice et Neil Joyce et qui porte le nom de leur château des Alpilles, Dalmeran (ils en ont un autre à Châteauneuf-du-Pape). Pour cette septième édition, les règles n’ont
pas changé, il s’agissait toujours pour les jeunes chefs d’accorder leurs idées aux vins de la maison, plus précisément un rosé et un rouge d’AOC les-baux-de-provence. C’est Philippe Houy, l’actuel chef saucier du restaurant étoilé de Christian Etienne à Avignon, qui s’est vu remettre le Prix Dalmeran 2013 par le président
du jury, Edouard Loubet. Ce jeune chef de 34 ans a su se démarquer avec, sur le rosé 2012, une recette de
Tielle de Seiche revisitée, Poulpe à la galicienne, Tartare de Langoustines et pamplemousse et, sur le rouge 2007, une Poitrine de Pigeon aux Huîtres, Duo d’Asperges et Morilles, jus au poivre RSA. Pour l’amateur, on précise
que Dalmeran c’est aussi un blanc et une huile d’olive, Provence oblige.

Nicolas de Rouyn

Du champagne à Bordeaux

Pour ceux qui ne connaissent pas Bordeaux, ou alors de très loin, sachez que la Maison Badie « fut fondée
en 1880 par Madame Badie, dans le superbe immeuble du XVIIIe siècle que le magasin occupe toujours. L’activité était alors tournée vers l’épicerie fine et les produits rares. Plus tard, les frères Badie spécialisèrent l’offre sur les vins et spiritueux et devinrent un acteur incontournable de la distribution des vins de Bordeaux. La maison Badie
fut la première à proposer aux particuliers, ses allocations de vins en primeur des meilleurs crus de Bordeaux.
»
Elle a été rachetée en 1991 par un négociant important de la place de Bordeaux. Jeudi soir, cette même maison organise au Pressoir d’Argent, le restaurant du Grand hôtel de Bordeaux (aujourd’hui, on ajoute « & Spa »)
dirigé par le chef étoilé Pascal Nibaudeau, un dîner Veuve Clicquot pour lequel il convient de réserver sa place
en cliquant ici (le curieux y découvrira le menu comme les vins). Pierre Casenave, l’œnologue de la Maison de Champagne sera présent.

Le champagne pour ce qu'il n'a pas

Attention, nouvelle tendance. Tous les fashionistas battent des cils. Comme il s’agit des champagnes sans sucre, l’émotion est à son comble.

Le champagne, trois cents millions de bouteilles par an et plus. Dont la moitié est ingérée par les seuls Français.
Si la performance est épatante, le risque de lasser les élites guette. Ce n’est pas le moment, bien sûr. Déjà les mauvais chiffres creusent des rides aux fronts radieux des responsables de Reims et d’Épernay.
Mais la Champagne a plus d’un tour dans son sac, des crises, elle en a vu d’autres et de bien pires. Un problème ? Une idée, et chaque fois qu’un Champenois a une idée, elle fait le tour de la planète. Avant-hier, c’était le blanc de blancs, un champagne blanc issu de raisins blancs, une vision aérienne, presque light. Hier, c’était le rosé (un champagne blanc coloré de quelques gouttes de vin rouge issu des pinots champenois), quelque chose de féminin, le rose sans doute. Aujourd’hui, voici le non-dosé. C’est le même champagne que d’habitude mais sans sucre ajouté. C’est au moment d’ajouter la liqueur de dosage (ou d’expédition) que le chef de cave intervient en diminuant ou en supprimant purement (c’est le cas de le dire) et simplement le sucre de cette liqueur qui contient aussi un tout petit peu de vins de réserve.

Très vite, les non-dosés sont passés du statut d’anecdote à celui, plus glamour, de média-darling. Et comme les connaisseurs ne sont jamais en retard d’une niche où installer leur avance, ces bouteilles qu’on ne trouve pas partout tiennent le premier rôle aux endroits où il faut être bu. Pourquoi ? Au-delà de l’effet de mode, il y a une réalité-produit, comme disent les services de marketing des maisons. D’abord, les assemblages sont modernes,
au sens où ils privilégient un certain type de vin, plus tendu, plus incisif, plus frais. Premier effet sur le palais des consommateurs, c’est rafraîchissant – évidemment – et cela semble plus léger. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer. La maison Ayala vient de sortir un coffret qui contient une bouteille de son brut classique et une autre du même assemblage, mais sans sucre. Ce qui permet d’étalonner son propre goût en soumettant ces deux vins à une dégustation horizontale (vous n’êtes pas obligé de boire couché ; horizontale veut dire deux vins de la même origine ou année ou terroir, par opposition à verticale, qui désigne une dégustation de plusieurs millésimes différents d’un même vin). C’est une bonne idée parce qu’elle est pédagogique et que, ce faisant, elle propulse l’amateur vers la connaissance qui, comme chacun sait, est l’ennemie du vice. Ces deux vins sont issus en majorité de la récolte 2005, avec une part de 2004 et des vins de réserve de millésimes antérieurs. L’autre réalité-produit est l’aspect diététique supposé, très dans l’air du temps, le non-dosé plaît pour ce qu’il n’a pas (le sucre).

Faut-il en déduire que tous les autres champagnes sont bourrés de sucres ? Non, bien sûr. La plupart des bruts sont dosés entre douze et quinze grammes de sucre par litre. Souvent, les cuvées dites de prestige, les champagnes les plus chers, sont dosés à moins de dix grammes. Don-pérignon, par exemple, est à huit grammes et dom-pérignon-œnothèque 1995 est à quatre grammes. Devant chaque cuvée, le chef de cave décide de la quantité de sucre qu’il va ajouter selon deux principes. Le respect du style-maison et la capacité de la cuvée à recevoir plus ou moins de sucre. Chez Billecart-Salmon, autre exemple, la cuvée clos-saint-hilaire 1998 ne reçoit pas un gramme de sucre,
de même que la grande-cuvée. L’opérateur a jugé que les vins vivraient mieux sans dosage. Pour autant, la maison ne communique pas sur cette information. Un peu comme ces grands vignerons qui travaillent leurs vignes en biodynamie sans en assurer la publicité. Ce n’est pas une manoeuvre ou de la fausse pudeur, mais cette idée très française qu’on est pas obligé de faire entrer ses dans la cuisine.

Aujourd’hui, beaucoup de maisons élaborent une cuvée non dosée, mais pas toutes. La raison la plus souvent évoquée tient à l’esprit de la marque, le champagne non dosé n’entre pas dans la case. La réalité est plus prosaïque. Les non-dosés ne sont pas des blockbusters et les volumes de vente restent faibles, voire insignifiants. Pourtant, chez quelque-uns, on sent poindre une once d’intérêt. Là, les raisons sont plus diverses. Ajouter une ligne au catalogue, et des chances supplémentaires de faire des ventes dans un contexte pour le moins morose. Trouver un débouché trendy à des stocks difficiles à gérer dans l’esprit-maison, certaines marques y réfléchissent sérieusement.
Nous pensons que le non-dosé est une chance pour le champagne en général. Pourquoi ? Deux raisons. Un. Cette variété gustative est de nature à fédérer un public nouveau peu amateur des dosages habituels ou, ça existe, surjouant la phobie du sucre. Deux. Le non-dosé, c’est très bon, très frais, très été. Le favori du moment sur ma terrasse : Ultra, le non-dosé de la gamme D de Veuve Devaux et dans un registre un peu moins aigu, le Brut Extrem’ de Nicolas Feuillatte. Essayer et on en reparle.

Nicolas de Rouyn

Et si la loi Evin n’était qu’une petite combineau bénéfice de Cahuzac ?

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C’est un tweet de Bernard Burtschy qui m’a mis sur la piste du petit développement qui suit. Où il est question de comptes en Suisse, de concordances de dates, de l’industrie pharmaceutique. Et de Jérôme Cahuzac.
Et d’un conditionnel prudent, l’erreur est toujours possible.
Voyons cela.
L’aigrefin s’est beaucoup vanté d’avoir été le rédacteur de la loi dite Evin. C’est-à-dire que sur l’impulsion et les idées générales de son ministre, il en a assuré la philosophie, les tenants, les aboutissants et l’écriture au nom de la santé publique. Il est l’auteur du flou législatif qui a permis aux prohibitionnistes de s’engouffrer dans la brèche. La scène se passe en 1991, époque où le monsieur a ouvert son compte bancaire en Suisse.
Le monsieur est un chirurgien esthétique, il gagne assez bien sa vie pour avoir le temps de passer à la vitesse supérieure via la politique, c’est pratique. Deux choses passionnantes à mettre en parallèle. D’une part, le croisement des courbes de consommation de vin et d’anxiolytiques en France. La première s’écroule, la seconde grimpe en flèche. D’autre part, le fait que de gros…lire la suite