La présentation des primeurs 2014 s’est plutôt bien passée si l’on en croit les rumeurs ?
M.C. : Oui. Après un été qui ne s’est pas déroulé sans inquiétude et le soulagement de la fin août, où l’inespéré s’est produit avec sept semaines de grand soleil, nous avons à l’arrivée un millésime de haut niveau que la place de Bordeaux attendait avec impatience. Il est à la fois singulier dans son expression, ses caractéristiques et son élégance. Je n’ai pas souvenir d’avoir connu de vin avec une expression de fruit aussi fraîche, aussi équilibrée, tendue, et en même temps parfaitement mûre. C’est un millésime comme on les aime, qu’on qualifie de classique et qui rassemble tout ce qui fait un grand bordeaux.
Qu’avez-vous pensé de l’absence de Robert Parker ? Est-ce un problème ou l’opportunité de redonner au négoce sa vraie position ?
M.C. : Nous n’avons pas été surpris. Robert Parker fait partie des personnes qui ont eu un rôle décisif ces trois dernières décennies dans le projet qualitatif de Bordeaux. Nous savions qu’un jour ou l’autre, il déciderait d’arrêter. Il faut juger avec objectivité et une réelle reconnaissance sa contribution. C’est la fin d’une histoire, et aussi le début d’une autre. Je pense que, pour les négociants que nous sommes, celle que l’on s’apprête à écrire est pleine de nouvelles possibilités. Nous allons avoir la responsabilité de parler du produit plutôt que du prix, comme on peut le voir dans la presse anglo-saxonne. Attention, nous ne remettons pas en cause le rôle du critique, mais plutôt celui de la notation qui dicte le fonctionnement du marché.
Personne ne se plaint jamais du prix d’une Ferrari, en revanche tout le monde se plaint du prix des premiers crus de Bordeaux, particulièrement en France. Pensez-vous que le système bordelais s’éloigne du consommateur ?
M.C. : Non. Le marché du vin évolue comme tous les autres. Et il est aujourd’hui soumis à une demande beaucoup plus mondiale qu’il y a trente ans. Je ne crois pas qu’il s’agisse d’éloignement. Le système bordelais prend juste en compte une réalité qui n’est plus la même.
Primeurs 2014 : interview Mathieu Chadronnier
Primeurs 2014 : interview Ariane Khaida
La saison des primeurs 2014 bat son plein, rassemblant des dégustateurs du monde entier. Qu’en dit la place de Bordeaux ?
A.K. : Malgré les doutes légitimes qu’on peut entretenir sur notre objectivité en tant que Bordelais sur la qualité du millésime (rires), nous avons de très bons vins et nous sommes rassurés par l’avis de nos clients, qui est unanime.
Êtes-vous d’accord avec ceux qui pensent que les primeurs sont en panne depuis trois millésimes ?
A.K. : Oui, et ce serait mentir de dire le contraire. Il y a eu deux millésimes bons, mais pas exceptionnels, au moment même où une redistribution des cartes au niveau du marché avait lieu. Certains marchés qui étaient très présents jusqu’au 2010 se sont retirés sur les millésimes suivants. Enfin, les parités euro-dollar sur les millésimes 2011, 2012 et 2013 nous ont été défavorables, notamment aux Etats-Unis.
Quelles recommandations feriez-vous aux propriétaires sur la fixation des prix ?
A.K. : Après avoir vu le système des primeurs en pleine tourmente, nous avons le devoir de réussir cette campagne. Avec ce millésime, nous avons une opportunité extraordinaire de donner envie à nos clients du monde entier de revenir dans le jeu des primeurs, de prendre à nouveau des positions, et de réanimer ce système qui est unique au monde et qui fonctionne merveilleusement bien. La seule inconnue à ce jour, c’est le prix. Augmenter ou baisser par rapport à 2013 ? Finalement, il n’y a pas vraiment de règles. Il y a autant de cas que de propriétés. Le prix pourra se calculer sur la base des niveaux de stock ou de la répartition géographique des marchés historiques des propriétés. Chacune d’entre elles devra fixer le prix en fonction des éléments qui lui sont propres et non en fonction du pricing de ses voisins. Nous sommes prêts à les aider dans ce sens.
2014, plus rive gauche que rive droite
On s’est désormais habitué à des années climatiquement hétérodoxes : dans ce registre, 2014 n’échappe pas à cette règle débutée avec notre décennie. Si le printemps fut beau et le mois de juillet pas exceptionnel mais satisfaisant, c’est cette fois le mois d’août qui désespéra les vignerons. Triste comme un été sans lumière, parfois pluvieux, jamais très chaud, il fit prendre à la vigne un retard de maturité qui n’annonçait rien de folichon. Mais, là aussi, on connait maintenant des mois de septembre ouvrant en Gironde un été indien. Celui-ci fut exceptionnel : chaud, ensoleillé, avec juste ce qu’il faut d’ondées permettant à la vigne de reprendre ses forces, et remarquablement long puisque la première moitié du mois d’octobre fut encore plus chaude et lumineuse que la quinzaine d’avant. Les cépages bordelais, merlot mais surtout les tardifs cabernet franc (à Saint-Emilion et Pomerol) et cabernet sauvignon (en Médoc et dans les Graves) ont pu atteindre leur parfaite maturité en sucre comme en tanin. Dans une telle configuration, ce sont les grands terroirs médocains, aidés par des cabernets sauvignons qu’on n’a pas goûté aussi bien depuis le millésime 2010, qui imposent leur intensité, leur maturité et leur profondeur. Les grands mais aussi bon nombre de « classiques » de Margaux, Saint-Julien, Pauillac et Saint-Estèphe tirent superbement leur épingle du jeu : ce seront des vins de grande garde. Leur profil peut rappeler 2005 : de la puissance, de l’énergie et surtout beaucoup de fond. Bref, des vins que l’on peut longuement oublier en cave pour fêter plus tard de grands moments. Le paysage est plus disparate sur la rive droite, où les tanins de beaucoup de crus notamment à Saint-Emilion sont apparus revêches. Les meilleurs ont su ne pas trop extraire pour produire de jolis vins fins et veloutés.
Les Super Bordeaux
2014 est une année particulière à Bordeaux. C’est, après 32 ans de règne, la première de « l’après-Parker ». Après avoir cédé l’an dernier sa lettre confidentielle, mais très influente, The Wine Advocate à des investisseurs singapouriens, Robert Parker a annoncé qu’il renonçait définitivement aux dégustations de primeurs. Mieux, il a accompagné cette annonce d’un constat lapidaire, donné au magazine spécialisé anglais The Drinks Business : « Bordeaux a un problème avec la jeune génération. Les grands bordeaux sont devenus une caste, les gens ne peuvent plus se les offrir et, donc, regardent ailleurs. »
Les membres de la « caste » des grands bordeaux – propriétaires et négociants – se sont en effet largement appuyés sur les notes de Parker pour commercialiser mondialement un nombre de plus en plus limité de grandes étiquettes au détriment de toutes les autres. En occupant sans partage le devant du terrain médiatique, cette micro élite a laissé accroire que tous les bons bordeaux sont hors de prix. « Il y a eu une dérive du marché à laquelle s’est ajoutée une arrogance commerciale chez les crus les plus spéculatifs, dit le consultant œnologique Stéphane Derenoncourt. D’une offre cohérente, en rapport qualité-prix, on est passé à un système dans lequel le vin n’est plus un produit, mais un objet. Aujourd’hui, on achète un lafite comme on achète un sac à main. » Et au même prix.
Or, il existe à Bordeaux plus de grands vins que partout ailleurs, souvent à des tarifs très accessibles, et seul l’incroyable conservatisme du système bordelais nous rend cette réalité invisible. Otez l’inextricable entrelacs de classements, de référencements de négociants fameux, de « notes Parker », et vous découvrirez de nombreux vins méconnus s’appuyant sur de grands terroirs, parfois excentrés, parfois appartenant à des appellations trop vastes ou hétérogènes pour être globalement considérés au plus haut niveau et réalisant un travail ambitieux depuis des années. Ceux-là peuvent rivaliser avec les plus grands de la région, en primeurs bien sûr, mais aussi après dix ou quinze ans de bouteille.
Il y a 25 ans, la découverte de ce que la presse américaine a nommé les « Super Tuscans », ces vins toscans de grande ambition, mais aussi de grand terroir parfois inédit, a permis de faire bouger les lignes d’un vignoble italien encore engoncé dans des habitudes et une image trop traditionnelle. En nous inspirant de cet exemple, nous avons qualifié ces inconnus célèbres de « Super Bordeaux ». Ils forment aujourd’hui une catégorie à part, exigeante et brillante, et leur rôle dépasse largement la mission d’apporter un supplément de découverte ou une pincée d’originalité dans une hiérarchie convenue. Pour rassurer Robert Parker, ces châteaux peuvent judicieusement contribuer à rajeunir l’image globale de Bordeaux, à redonner envie aux amateurs de s’intéresser à nouveau à cette région plus dynamique et passionnante qu’on veut bien le dire.
Comte Liger Belair, Vosne-romanée Échezeaux 2006
Vosne-romanée Échezeaux 2006
LE VIN : Nez profond, on sent une intensité avec un tanin qui vibre et qui se place bien, il y a une assise élégante et des accents de rose et de fraise. La finale saline est d’une grande précision. Grand vin de gastronomie.
18,5/20
CONTACTER LE PRODUCTEURLE DOMAINE : Progressivement, Louis-Michel Liger-Belair installe son domaine au tout premier rang de la Bourgogne. Pour y parvenir, il pratique une des viticultures les plus strictes et disciplinées de la côte. Son fleuron, la-romanée, ressemble d’ailleurs de plus en plus aux autres grandes romanées y compris en matière de prix ! S’il peut y avoir encore un progrès, cela concernera le boisé qui masque parfois en vin jeune la pureté initiale du fruit.
Ce fauteur de trouble déteste le sauternes ou bien ?
C’est du jamais vu.
Voilà qu’un président de région, espèce en voie de disparition, appelle à une manif pour que la LGV Bordeaux-Toulouse écrabouille comme il faut le Sauternais et ses vignobles fragiles. On voit d’ici la manif et on n’a pas fini d’en rire. C’est quoi, le slogan à scander par les quatorze manifestants (selon la police, 45 selon le président de région) ? J’espère bien que Juppé va interdire ce trouble à l’ordre public. Alain, si tu nous regardes…
Ou alors, nos amis bordelais vont à la manif chacun avec une quille de sauternes (le barsac est encouragé aussi et les plus jeunes manifestants ont le droit d’apporter une demi-bouteille de Perrier, soyons œcuméniques)…lire la suite sur le blog bonvivant
Pape-Clément, pour le plaisir de boire
[col width= »six »]Propriété historique majeure avant d’être le vin d’un homme, Pape-Clément est à son meilleur depuis 1985-1986, époque de la reprise par Bernard Magrez. C’est une des quelques propriétés bordelaises mythiques, de celles qui symbolisent et résument toutes les qualités que l’amateur recherche dans un grand vin rouge de Bordeaux. Pape-Clément y ajoute une personnalité qui lui est propre. Depuis environ un quart de siècle, Bordeaux n’a jamais produit de meilleurs vins. Il n’y a plus de millésime médiocre et les crus progressent encore. Cette verticale 2009-1988 en fait, une fois de plus, la démonstration éclatante. Pourtant, il y a dans les vins du château Pape-Clément une constance qu’on ne retrouve pas partout. Pape-Clément est avant tout un cru qui donne une définition claire de son terroir. Le caractère truffé et précis du grain, la texture et le soyeux de la chair, c’est l’essence même d’un grand pessac. Combien de propriétés peuvent afficher une telle régularité sur une séquence de vingt-cinq ans ?
Bernard Magrez était un industriel des vins et spiritueux, loin des logiques des grands vins.[/col][col width= »six »] Cependant, Il a tout de suite compris que Pape-Clément était un grand cru et qu’il fallait le mener comme tel. Peu à peu, il a affiné le processus d’élaboration en soignant les détails à toutes les étapes du process, sans jamais perdre de vue l’objectif de tout propriétaire de grand cru classé : le sommet. Les anglais disent qu’il n’y a pas de grands bordeaux sans grands marchands. Les Américains prétendent qu’il n’y a pas de grands bordeaux sans grands critiques. On s’aperçoit surtout qu’il n’y a pas de grands bordeaux sans grands propriétaires, administrateurs, actionnaires. Tous les grands bordeaux sont poussés sur le chemin du succès et de l’amélioration permanente par des propriétaires qui y mettent leur passion, leur argent, leur temps et leur capacité à prendre des décisions au bon moment. Bernard Magrez a joué ce rôle pendant les trente dernières années, et le résultat est là. Certes, Il y a des équipes qui ont très bien travaillé, mais surtout il y a un cap qui a été défini et une impulsion qui ne faiblit pas.[/col]
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Le Minzingue
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Menu
19,80€ (au déjeuner)
Accueil : jusqu’à 22h. Salons. Air conditionné.
Fermé le dimanche et le lundi. Fermé en Août.
3, places Étienne-Pernet – 75015
Métro : Commerce ou Félix Faure
01 45 32 48 54
Jean-Louis Piqueronies
Pascal Brosset
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Ce bistrot « marchand de vins » comme le signifie son enseigne argotique propose de nombreux vins de soif et de comptoirs au verre ou en différentes contenances de pichet à des prix tentateurs ! Sa décoration particulièrement éclectique annonce cependant la dominante de la cuisine grâce au panneau de la ville d’Aurillac bien en vue dans la salle, et nous ne serons pas trompés sur la qualité des produits viandes et fromages en provenance d’Auvergne ! Dans l’ensemble, une tradition bistrotière bien ficelée servie avec efficacité.
À LA CARTE :
- Œuf cocotte au foie gras 9,50€
- Clafoutis de camembert 9€
- Gratin de queues d’écrevisses 9,50€
- Pavé de bœuf salers 19,80€
- Côte de cochon aux trois fromages 18,50€
- Potée de ris de veau 28€
- Quenelle royale de brochet 18,50€
- Tarte tatin 8€
- Profiteroles maison 9€
- Baba au rhum 9€
Notre sélection
- Chiroubles, Domaine Cheysson 24€
- Fleurie, Domaine Depres 24€
RÉSERVER[/col]
DÉCOUVREZ LA SÉLECTION LEBEY
Crédits photo d’ouverture : Mario Ruiz
L’AOC languedoc a 30 ans
Parmi les différentes festivités qui émailleront cette année anniversaire de la naissance officielle de l’appellation languedoc (le décret date du 24 décembre 1985), le salon des vins qui se tiendra ces 26 et 27 avril à la Maison des vins du Languedoc (Lattes) est l’occasion de découvrir, et acheter, les vins de cent cinquante vignerons. Si la journée de lundi est réservée aux professionnels, le grand public des amateurs est attendu dimanche de 1à h à 19 h pour des dégustations et des ateliers portant sur les blancs du languedoc et la notion de terroir (11 h et 17 h, participation 5 € sur réservation au 04 67 06 04 44). On découvrira ici la liste des domaines présents et là le programme des événements prévus tout au long de 2015.
Salon des vins du Languedoc, 26 et 27 avril 2015.
Entrée : 5 €, plus de renseignements ici.